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  • Entretien avec Daniel Panetto, président de l'Union des commerçants de loisirs et de presse

    Résumé : sur les 5 dernières années, le nombre de points de vente presse a diminué d'environ 2,5 % par an. Les kiosques parisiens ont été les plus touchés par la crise de la presse. Au niveau national, un tiers des points de vente gagnent très bien leur vie, un tiers normalement et un tiers pas bien, sachant qu'ils peuvent exercer ou non des activités en parallèle. On est passé d'un marché de journaux à grand tirage à une diversité des publications sous forme de magazines qui écrivent sur le temps long. Les magazines génèrent 70 % du chiffre d'affaires. Des opportunistes utilisent le réseau de distribution pour vendre des objets sans trop de rapport avec la presse comme les râpes à fromage (quid des figurines et des modèles miniatures ?) que certains distributeurs voudraient ne plus être obligés de diffuser. C'est l'un des points de la réforme de la loi Bichet d'octobre 2019, les autres étant l'ouverture à la concurrence du réseau de distribution Presstalis (vu ses difficultés) et la fusion des régulateurs actuels avec l'ARCEP. La "presse" se divise en 3 catégories : la presse d'Information Politique et Générale (IPG), soit environ 50 titres dont la loi Bichet de 1947 impose la diffusion, les produits journalistes agréés (commission paritaire) qui sont tout aussi éligibles aux aides à la presse soit 3000-3500 titres et le reste.

    Je suis dubitatif face à cette obligation de diffusion de la presse IPG. Fakir et le Ravi sont classés IPG et je les trouve jamais dans plusieurs points presse de ma ville (environ 100 000 habitants). Siné mensuel, lui aussi classé IPG, est disponible depuis très récemment dans mon point de vente presse préféré. Cette obligation est-elle appliquée ? Son application est-elle contrôlée ? Existe-t-il des dérogations ?


    Quelle est l’évolution des points de vente de journaux en France ?
    Il y a 23 627 points de vente au 31 mai 2019. Contre 26 000 ou 27 000 il y a cinq ans… Et le chiffre, malheureusement, continue de décliner. Ces points de vente sont assez hétérogènes : pour certains, la presse est l’activité première du magasin, pour d’autres, plus petits, c’est plus accessoire. Mais tous participent à la capillarité du réseau en France.

    Il y a trente ans, les ventes de quotidiens et d’hebdos généralistes représentaient l’essentiel de vos ventes. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas…
    Il n’y a plus qu’une dizaine de quotidiens nationaux… En revanche, les magazines représentent l’essentiel du chiffre d’affaires : 70 % au niveau national, 20 % presse quotidienne. Les 10 % restants, ce sont divers produits, imprimés ou pas, qui sont livrés également par les messageries de presse. La France est le pays qui propose l’offre la plus riche et qui vend le plus de magazines au monde !

    À Paris, il y a maintenant de « nouveaux kiosques ». Ils vendent aussi des porte-clés, des billets de bus, etc. Bonne nouvelle ?
    Les kiosques parisiens se sont pris la crise de la presse quotidienne nationale de plein fouet. Ils en étaient les principaux vendeurs. Alors, est-ce qu’on est content de vendre autre chose que de la presse quand on a la presse attachée au coeur ? Pas forcément. Après, il y a des modèles économiques qui font que, hélas, on n’a pas vraiment le choix… Au niveau national, un tiers des marchands de journaux gagnent très bien leur vie, un tiers normalement, et un tiers pas bien. Parmi ce dernier tiers, la plupart sont à Paris.

    Oui, mais vous reconnaissez que certains abusent du système et que vous êtes parfois obligés de distribuer des objets qui n’ont rien à voir avec la presse comme — c’est assez pittoresque — des râpes à fromage ou des pastilles Pulmoll.
    En 1947, à la sortie de la guerre, la loi Bichet donnait à tous les éditeurs le droit d’utiliser le réseau pour diffuser la presse quotidienne, nationale et régionale. Il y avait quelques magazines, mais très peu. C’était une volonté de garantie démocratique. La loi de 1947 a permis aux éditeurs d’enrichir l’offre, c’était très bien. Cette loi va être rediscutée dans les semaines à venir, nous y reviendrons. Mais au fil du temps, il y a des petits malins ou des opportunistes — et, pour certains, tricheurs —, qui ont compris qu’il y avait un magnifique réseau assez corvéable et qui l’ont utilisé. Ils ont compris qu’il suffisait de mettre un produit, imprimé ou pas, comme une râpe à fromage, dans les tuyaux de la messagerie pour que 23 000 marchands la proposent en même temps !

    […]

    Vous ne croyez pas à la mort de la presse papier.
    La presse a subi des secousses, comme toutes les activités économiques dans ce pays et dans le monde. Elle n’y a pas échappé. Une fois qu’on a dit ça, les gens continuent de lire. S’ils y trouvent leur compte, ils vont continuer de lire. La problématique, c’est le temps dont ils disposent aujourd’hui. Des concurrences sont venues prendre (le la place, non pas en termes d’information, de culture etc., mais en termes de temps. Le temps disponible a été atomisé par l’arrivée d’Internet, des téléphones mobiles, etc. Le temps passé auparavant sur la lecture papier a été explosé. Les chaînes d’infos omniprésentes, comme les radios… Tout cela concurrence la presse ; pour autant le papier n’est pas mort ! La presse s’est toujours très bien vendue le week-end, ça reste le cas. Et on va vers des temps de lecture de plus en plus long. L’info chaude, les news, on a tous des téléphones mobiles et des notifications qui vibrent toutes les cinq secondes dans notre poche; évidemment, on n’a plus la même appétence pour tels ou tels journaux. Pour autant, on achète des magazines à 19 euros. C’est bien pour les lire, ce n’est pas pour dépenser de l’argent ! C’est à ça qu’il faut s’adapter. C’est pour ça que je suis optimiste.

    D’autres exemples de titres qui marchent bien ?
    Toutes les ventes sont en baisse. Mais il y a encore des titres qu’on dit « de niche » qui ont du succès. Je ne sais pas si ce terme est approprié. Peut-être qu’on l’emploie parce que ce sont des tirages qui n’ont plus rien a voir avec ce qu’on a connu. Mais en réalité ce sont des titres à centres d’intérêt, de savoir, de culture. L’histoire par exemple marche bien. Même si nous ne sommes plus du tout sur les mêmes volumes de ventes qu’on a connus auparavant.

    […]

    Alors, à quoi va servir cette réforme [N.D.L.R : de la loi Bichet ] ?
    Précisons qu’au moment où je vous réponds, la loi n’est pas encore votée. je suis désolé, mais pour que vos lecteurs comprennent, je dois entrer un peu dans la technique. Les marchands de journaux reçoivent la bagatelle de plus de 6000 titres ! Du Monde à la râpe à fromage, dont nous avons parlé précédemment. Il y a une cinquantaine de titres classés « information politique et générale [IPG] » dont fait partie Siné Mensuel. Ceux-là, pour nous, ils sont importants parce que ce réseau a été construit autour de ces titres. Nous avons toujours dit que le marchand doit s’interdire d’avoir un droit sur leur diffusion [ N.L.D.R : la loi Bichet l'interdit ]. Ils appartiennent au débat, à la culture démocratique. Si on enlève ces titres, il en reste 6000. Sur ces 6000, entre 50 et 60 % ont la commission paritaire, c’est-à-dire qu’ils sont considérés comme des produits journalistiques, à base d’articles, et bénéficient à ce titre de la TVA réduite à 2,10 % au lieu de 20 %, des aides au portage ou à la distribution postale. Ces titres-là, je continue à dire qu’ils doivent rester visibles, et à arriver dans les points de vente. Nous n’avons jamais dit autre chose.

    Vous souhaitez pouvoir intervenir sur les autres produits.
    Sur tout ce qui n’est pas la presse… Sur tous les produits qui n’ont pas de commission paritaire, soit environ 40 % de ce qu’on doit vendre. Il ne s’agit pas de choisir à la place de mes confrères mais de leur dire : « Vous avez le droit de le refuser. » Ça ne veut pas dire qu’ils vont le refuser, mais ils n’ont pas d’obligation à continuer à le recevoir. On peut reprendre l’exemple de la râpe à fromage par exemple, ou des pastilles Pulmoll. C’est sur ces produits-là que je peux avoir mon mot à dire.

    Cerise sur le gâteau, la concurrence devrait être ouverte aux messageries de presse d’ici 2025. Donc les coopératives risquent de disparaître au profit de boîtes privées qui ne verront que le profit et ce sera la fin des petits éditeurs.
    Dans la chaîne de distribution, personne ne se passe de titres qui font des ventes et qui participent à l’économie du système, fussent-ils petits… Parce que plein de petits, ça finit par faire un chiffre d’affaires extrêmement important ! Dans cette filière, on a collectivement intérêt à se parler, à se dire les choses et a sortir du catastrophisme ambiant : quel que soit le titre qui m’est livré, que ce soit un petit ou un gros, ce qui m’intéresse, c’est que j’aie un client qui veuille l’acheter.

    Dans le Siné Mensuel de septembre 2019.

    Sat Nov 2 19:02:42 2019 - permalink -
    - http://shaarli.guiguishow.info/?D3b19g
  • Centrales nucléaires : on a eu très, très chaud

    Article "piqûre de rappel" inutilement alarmiste. Cet été 2019, 4 réacteurs nucléaires ont du être arrêtés et 7 ralentis à cause de la température extérieure. 4 réacteurs été concernés l'année dernière et 17 lors de la canicule de 2003… L'IRSM, qui assure le suivi technique des centrales aux côtés de l'ASN émet des doutes sur la résistance aux températures actuelles des matériels de sécurité des centrales. Il y a des conflits d'usage de l'eau : l'irrigation et le nucléaire assèchent les fleuves en même temps en plein été. Le nucléaire, comme d'autres industries, rejette des saloperies dans la flotte.

    Circulez, y a rien a voir. La com’ d’EDF nous l’a asséné tout l’été : la canicule ne pose aucun problème aux centrales nucléaires, tout serait prévu… Pas si sûr, selon des enquêtes que nous avons consultées.

    En cette fin d’été, la France est devenue toute jaune et les cours d’eaux sont quasi à sec. Un phénomène devenu récurrent d’année en année, accéléré par la canicule. Or qui dit manque d’eau, dit problème pour les centrales nucléaires bordant les fleuves. Les centrales, rappelons-le, ne sont rien d’autre que de grosses bouilloires, les réactions nucléaires chauffant l’eau à 330° C. La vapeur actionne les turbines et ça donne de l’électricité ! Or si l’eau ainsi chauffée reste (la plupart du temps !) en circuit fermé, les centrales utilisent aussi un circuit d’eau de refroidissement pour condenser cette vapeur. De l’eau forcément fraîche, qu’elles pompent directement dans les fleuves, entre 2 et 3 m3 par seconde. L’eau prélevée ainsi sera ensuite rejetée, mais pas sans dommages : sa température est plus élevée, ce qui n’est pas sans conséquences sur l’écosystème fluvial, et surtout, pas garantie à 100 % sans produits chimiques ou radioactifs…

    Jusqu'ici tout va bien (selon EDF)

    Du coup, si le débit est insuffisant (pas assez d’eau pour refroidir sans vider le fleuve !) ou l’eau du fleuve trop chaude, la centrale est logiquement contrainte de s’arrêter. La centrale de Golfech sur la Garonne et le réacteur 4 de la centrale de Tricastin sur le Rhône ont dû s’arrêter lors de la canicule de fin juillet. Sept réacteurs (Saint-Alban 1 et 2, Tricastin 3, Dampierre 5 et 4, Belleville 1, Blayais 3) ont connu une réduction de puissance. Mais pas de souci à en croire EDF qui indique à Siné Mensuel : « Ces adaptations n’ont rien d’exceptionnel en cette période de l’année et n’ont aucun impact sur la continuité d’approvisionnement en électricité. » Ajoutant que « depuis 2008, EDF a développé un programme de modifications dit “grands chauds” sur ses installations afin de leur permettre de faire face aux conséquences du changement climatique, notamment l’augmentation de la fréquence des épisodes de canicule, de sécheresse et de tempêtes. » Tout va bien, alors !

    Vite dit. Car question mise en place du programme « grands chauds », EDF s’avance un peu. Dans un avis du 6 février 2019, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) fait le bilan des études d’EDF prouvant que les « matériels de sûreté » tenaient bien le choc en cas de fortes températures. Il en ressort que les experts ne valident pas les calculs d’EDF concernant la température maximale que peuvent encaisser les dits matériels, en particulier ceux installés tout exprès pour faire face aux catastrophes ! Pour Charlotte Mijeon, porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire : « Certains équipements, comme les diesels de secours (utilisés en cas de pépin, une obligation post-Fukushima, NDLR) qui, soit dit en passant, ne sont pas dans un état génial, doivent être aussi refroidis par l’air extérieur. Après les canicules de 2005 et 2006, EDF a mis des matériels en plus pour les refroidir, mais visiblement ça ne suffit pas, et ça inquiète l’IRSN… »

    Poissons cuits à l'étouffée

    Plus embêtant, la dépendance des centrales à un débit minimum pose des conflits d’usage. Ainsi l’année dernière, le lac de Vassivière dans les Alpes a été quasiment vidé pour maintenir un débit minimum dans le Rhône. Empêchant les gens de se baigner… À force de tirer sur la limite de débit des cours d’eau, les centrales nucléaires pourrissent aussi la vie des poissons. Car, on l’a dit, qui dit centrales nucléaires dit rejet (même faible) de matières radioactives et chimiques dans les fleuves. C’est ainsi qu’on retrouve le fameux tritium dans la Loire qui a fait paniquer tout le monde cet été… Or comme l’explique la porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire : « Lorsque la température augmente et que le débit des cours d’eau diminue, l’impact de ces nuisances s’accroît. Les milieux aquatiques, déjà fragilisés, sont mis à rude épreuve par la moindre dilution des polluants et par les rejets d’eau chaude. Ceux-ci agissent comme une barrière qui réduit considérablement les chances de survie des poissons grands migrateurs comme les saumons et truites des mers. » Qui veut manger une petite truite bouillie assaisonnée au tritium ?

    Dans le Siné Mensuel de septembre 2019.

    Sat Nov 2 18:04:24 2019 - permalink -
    - http://shaarli.guiguishow.info/?hAh7RA
  • Quand les hommes construisent des murs [ végétaux ]…

    Des ceintures d'arbres aux États-Unis (1934), en Chine (1978) et en Afrique (2007) afin de lutter contre l'avancée des déserts, les vents de poussière et de sable ainsi que les inondations. Ces initiatives sont hallucinants : 220 millions d'arbres sur 30 000 km² par-ci, 66 milliards sur 500 000 km² (!!!) par-là, et encore 117 000 km² par là-bas. :O

    Nous connaissons la propension des hommes à élever des murs entre eux. Nous les connaissons moins comme bâtisseurs de murs naturels, ou plus précisément comme planteurs d’arbres et d’espèces de plantes variés pour contrer les catastrophes écologiques. Les great green wall (« grands murs verts ») empêchent la dégradation des sols. Le premier exemple remonte aux années 1930.

    États-Unis
    Le projet Shelterbelt a été mis en œuvre pour contrer le Dust Bowl dans les années 1930. Ce vent de poussière destructeur dont l’origine provient de la sécheresse couplée au surlabourage. La terre des plaines du Sud situées à cheval sur le Texas, l’Oklahoma, le Kansas et le Colorado fut ravagée pendant la décennie surnommée Dirty Thirties. Privés de nourriture et plongés dans la misère, des millions d’Américains avaient été contraints de fuir vers l’ouest. John Steinbeck tira son roman Les Raisins de la colère de cet épisode tragique. Sommé de réagir, Roosevelt créa l’une des premières agences environnementales du pays, qui a lancé la plantation de 220 millions d’arbres sur une ligne allant du Canada au Texas, soit une superficie de 29 900 km² pour une largeur de 160 km. Quatre-vingts ans plus tard, cette réalisation constitue l’acte le plus abouti du gouvernement américain pour répondre à une crise écologique.

    1934-1942. 8 ans pour planter 220 millions d'arbres.


    Chine
    Durant le Grand Bond en avant initié par Mao Tsé-toung, les Chinois ont rasé des pans entiers de forêts et anéanti la biodiversité, provoquant la Grand Famine et une augmentation de la température de 2 °C en cinquante ans. Le désert de Gobi tout proche a pu dès lors avancer à sa guise, détruisant les prairies à coup de tempêtes de sable et provoquant des inondations à répétition. 400 millions de Chinois sont aujourd’hui encore concernés. En 1978, l’État prit ses responsabilités et décida de planter une barrière de 4480 km au sud de la Mongolie. Un édifice colossal censé se terminer en 2074. Le défi est si grand qu’en 2018, 60 000 soldats ont été appelés pour s’occuper de 84000 km² (l’équivalent de la superficie de l’Irlande). Aujourd’hui, malgré quelques ratés, 66 milliards d’arbres ont été plantés. D’après les images de la Nasa, 5 % de la superficie du pays est devenue plus verte depuis deux décennies. Pour autant, l’empire du Milieu demeure le plus gros pollueur au monde et ses émissions de CO2 continueront d’augmenter jusqu’à 2030, au moins.

    Il s'agit de la Grande muraille verte de Chine.

    Un projet similaire est en cours en Afrique : la Grande muraille verte pour le Sahara et le Sahel.

    Dans le Siné Mensuel de juillet-août 2019.

    Sat Nov 2 13:12:17 2019 - permalink -
    - http://shaarli.guiguishow.info/?uq-TeQ
  • Des taulards se remettent en selle

    L'équithérapie, l'utilisation du cheval comme médiateur thérapeutique afin de compléter des soins médicaux pour des handicaps ou des difficultés physiques ou mantales, prescrite à des détenus. 10 ateliers par an, encadrés par les psychologues et un surveillant de la prison et financés par un hôpital psychiatrique, destinés à des détenus en fin de peine. Notions distillées : confiance, soin à l'autre, affirmation de soi sans violence, cohérence entre son attitude mentale et corporelle, etc.

    Des détenus de la maison d’arrêt de Valence (Drôme) suivent des ateliers de médiation avec le cheval. Reportage aux écuries de la Véore.

    Bonite est un cheval qui a besoin de voir ce qui se passe autour de lui. Pas moyen de lui imposer longtemps de se retrouver face au mur pour se faire brosser. Mahmoud, 24 ans, le comprend, « personne n’aime ça », et lui non plus. fin juillet, il sortira de prison après plusieurs séjours ces dernières années. Avec Adil et Kader, âgés de 24 et 25 ans, ils ont eu l’autorisation de sortie pour suivre les ateliers d’équicie de Marie Manvieux. L’équicie, c’est un métier de médiation avec le cheval à visée thérapeutique et d’apprentissages sociaux reconnu depuis 2014 au répertoire national des certifications professionnelles. Ce matin de printemps, Marie Manvieux, infirmière depuis dix-huit ans a la prison de Valence, leur propose le cinquième et dernier atelier aux écuries de la Véore, à Beaumont-lès-Valence, dans la Drôme. Cavalière depuis l’enfance, Marie s’est formée deux ans dans le cadre de la formation professionnelle pour « allier mon métier d’infirmière, tourné sur la relation à l’autre, à la relation avec le cheval ». Depuis 2016, elle anime dix séances par an avec des détenus de la maison d’arrêt. Les permissions de suivre les ateliers sont accordées par le juge d’application des peines et demandées dans le cadre d’un suivi psychiatrique par le médecin et les psychologues de la prison. Les ateliers sont d’ailleurs financés par le Valmont, l’hôpital psychiatrique du secteur. Les détenus sont à la moitié ou en fin de peine et ont été choisis comme étant aptes à vivre l’expérience.

    S'affirmer

    « Je n’y arrive pas, madame! » Mahmoud peine à se faire comprendre de Bonite. L’animal fourre invariablement la croupe tout près des naseaux de sa voisine Tara, très calme entre les mains d’Adil. « Si, vous allez y arriver ! » lui répond Marie. « Vous devez être plus ferme dans votre demande mais sans vous énerver, sans violence. C’est de l’autorité bienveillante, c’est un cadre dont Bonite a besoin pour être rassurée. » Dès le premier atelier, Marie a demandé aux détenus sur quel objectif ils souhaitaient travailler.

    Pour Mahmoud, c’est l’affirmation de soi. Seul garçon et petit dernier de la famille après quatre soeurs, « il a du mal à exister », précise Marie. Autrement que par les conneries et la délinquance. La voie est étroite pour certains gars quand on leur rebat les oreilles qu’un homme, c’est fort, et que ça ne pleure pas. « Avant, je ne savais pas parler, je ne mettais que mes couilles en avant », lance Mahmoud. On a du mal à l’imaginer, avec ses cils interminables et sa silhouette frêle. C’est compliqué pour lui de trouver la juste place auprès de Bonite. Il n’a pourtant pas renoncé tout au long des cinq séances à tenter de surmonter sa peur de l’animal le plus inquiet du groupe. Ils sont finalement deux à avoir la trouille. Les gestes aujourd’hui sont lents et d’une extrême douceur.

    Adil soulève avec une totale confiance le sabot de Tara en faisant glisser sa main le long de sa jambe. Ce matin, au paddock, l’enclos aménagé près des écuries, Tara s’est spontanément dirigée vers Adil, qu’elle a reconnu. Adil a pourtant failli rater la dernière séance, celle où il va pouvoir monter Tara pour la première fois. Il a fallu plaider sa cause auprès du juge d’application des peines car il s’est battu voici plusieurs semaines et a passé quelque temps au quartier disciplinaire. À le voir prendre soin du cheval, « mon cheval » comme il dit, on sent bien qu’Adil se nourrit pleinement du moment, agit dans le calme avec une totale aisance. De quoi laisser tomber quelques heures les défenses activées en prison. Adil prend son temps aujourd’hui, touche, caresse, gratte, chuchote des mots doux à la jument. Peut-être des réserves pour l’après, la sortie de prison dans un an. « Vous savez faire plein de choses et cette attention à l’animal, c’est votre humanité, vous l’avez en vous, exploitez-la », les encourage Marie. Travailler la confiance, apporter la sécurité a l’animal, être au clair avec son attitude mentale et la posture du corps sont des notions que Marie distille au fur et a mesure. Car le cheval absorbe comme une éponge l’état intérieur de l’homme qui s’approche de lui. Il garde la mémoire de son drôle de destin, celui d’être « la plus noble conquête de l’homme ». Noble sans doute, conquête surtout, puisque l’homme a eu besoin de lui pour se nourrir, se déplacer, travailler la terre et faire la guerre ! D’animal utilitaire et militaire, il s’est transformé en animal de loisir et de compétition sportive. Un destin d’exploité depuis toujours. Le cheval sait depuis le néolithique qu’il peut être mangé par des prédateurs. Pour sa survie, il doit être capable à tout moment de fuir grâce à ses sens hyper développés. Sa peau sent tout, la vue, l’ouïe et l’odorat sont exceptionnels. « Ce qui lui permet de déceler une mâchoire crispée, des phéromones de peur, une augmentation du rythme cardiaque, un visage triste », détaille Marie. « Sa souffrance est muette, explique pour sa part Gina Pitti, dresseuse aux écuries de Berlion, à Montoison. Il n’a que son corps pour parler. » C’est finalement depuis peu que l’homme s’efforce de le comprendre et de tenir compte de ses besoins physiques et psychiques, notamment grâce aux recherches en éthologie. Impossible donc de tricher avec un cheval.

    La balade

    Pendant la balade sur le dos du cheval pour la première fois, Mahmoud, dont Bonite est guidée par Marie, se laisse porter, ferme les yeux et respire l’air du matin de printemps. Adil et Kader ouvrent grand leurs yeux sur les champs de blé et de coquelicots, entourés des collines du Vercors. Ils discutent avec Fabrice, le surveillant, et Virginie et Barbara, les psychologues, toujours présentes aux ateliers. Parfois, c’est le Spip, un membre du service pénitencier d’insertion et de probation, qui accompagne. L’occasion « de faire passer l’humain avant tout », confie Fabrice. Une goutte d’eau dans l’océan carcéral.

    Dans le Siné Mensuel de juillet-août 2019.

    Sat Nov 2 12:47:00 2019 - permalink -
    - http://shaarli.guiguishow.info/?x5HiWg
  • Des animaux à la barre

    Si je conchie sa comparaison entre le traitement judiciaire des animaux et des gilets jaunes (qui, entre autres, mélange comparutions immédiates et procès longs) et que je doute de la véracité de certains de ses exemples, cet article m'a appris des choses à l'heure où les plaintes autour des bruits des animaux (coq, cigales, canards, etc.) se multiplient, notamment que, dans le passé, des animaux ont eu à répondre de leurs méfaits devant des tribunaux laïques et ecclésiastiques, notamment, car il fallait excommunier les animaux de Dieu avant de pouvoir les éradiquer.

    Dans l'histoire, les tribunaux ont garanti aux animaux traînés devant la justice plus d’équité que la justice d’aujourd’hui n’en garantit aux gilets jaunes.

    Et si les animaux avaient plus de droits que de vulgaires gilets jaunes ? Jusqu’à une époque récente ils ont dû répondre de leurs méfaits devant les tribunaux.

    L'éléphant tueur
    En 1916, dans le Tennessee, berceau du Ku Klux Klan, un éléphant assassin de son dresseur est condamné à mort et pendu par la trompe à une grue.

    L'âne est-il coupable ?
    En 2005 dans le nord-est de la Turquie, un âne accusé d’homicide a vu sa peine de mort, prononcée par le conseil des anciens, suspendue pour complément d’enquête. « Chacun est innocent jusqu’à ce que soit rapportée la preuve de sa culpabilité » mais « nul n’échappe à la loi », a déclaré le maire.

    Les animaux auraient-ils donc droit à des garanties procédurales auxquelles échappent les humains ?

    Les procès d’anirnaux ont été nombreux sous l’Ancien Régime parce qu’on ne pouvait éradiquer limaces, vermines et autres animaux de Dieu sans qu’ils aient été préalablement excommuniés et condamnés.

    Il existait deux moyens de traîner en justice un animal. Lorsque l’acte d’un animal est la cause de la mort d’une personne, il était possible d’engager une procédure pénale devant une juridiction laïque qui la plupart du temps aboutissait à la peine de mort. Ou bien, si vous étiez un brave paysan qui a vu ses récoltes détruites par des petits animaux nuisibles, vous pouviez engager une action civile devant les tribunaux ecclésiastiques afin de les excommunier.

    Tout cela dans le respect des formes de droit.

    Les sangsues interdites de séjour
    Des sangsues et des chenilles ont ainsi été interdites de séjour par jugement contradictoire avec un certain succès.

    En 1522, Me Barthélemy Chassanée a réussi à faire annuler la citation délivrée aux rats, qui infestaient la région, par le diocèse d’Autun. Il a justement fait valoir le caractère discriminatoire de poursuites dirigées contre une minorité de rats isolés et surtout un délai de comparution insuffisant au regard du danger encouru par les rats pour se rendre au tribunal avec leur courtes pattes, au risque d’être agressés par des chats.

    Le tribunal puis la cour lui ont donné raison.

    La truie assassine
    La truie de Falaise a eu moins de chance en 1386 après avoir tué une petite fille. Placée en détention provisoire elle a été assistée d’un avocat et a reçu notification par huissier de tous les actes de la procédure. C’est donc à l’issue d’une décision inattaquable qu’elle a été nouée, écartelée, mutilée puis brûlée vivante sur la place publique.

    Il en va de même du pourceau de Saint-Quentin en 1557, condamné à être enfoui vivant dans une fosse pour avoir dévoré un petit enfant.

    Le perroquet royaliste
    La réinsertion du condamné est déjà au cœur de la réflexion judicaire. Un perroquet qui criait « Vive le roi » en 1794 a été placé par jugement en rééducation pour apprendre a dire « Vive la République » sous peine de mort, mais toute la famille de ses propriétaires, irrécupérable, a été condamnée à mort à l’issue d’une procédure expéditive.

    L'ours voleur de miel
    L’Etat peut cependant se retrouver accusé et accusateur.

    En 2008, un ours perd un procès face à un apiculteur en Macédoine. Les juges du tribunal de Bitola ont retenu la culpabilité de l’ours pour vol de miel dans des ruches et l’ont condamné à verser à l’apiculteur la somme de 140 000 denars (2 300 euros). L’ours voleur n’étant pas solvable, c’est l’État macédonien qui a dédommagé le malheureux apiculteur.

    Au risque de jugements sévères, tous ces animaux ont bénéficié de procès équitables à l’issue de procédures contradictoires.

    Allez faire un tour a la 23e chambre des comparutions immédiates : les gilets jaunes y sont traités pire que des chiens !

    Dans le Siné Mensuel de juillet-août 2019.

    Sat Nov 2 12:21:56 2019 - permalink -
    - http://shaarli.guiguishow.info/?zrNlEw
  • Entretien avec Constance Hammond, directrice de recherche émérite en neurobiologie

    Résumé : tous les êtres vivants ne disposent pas d'un cerveau au sens où on l'entend chez l'humain. Les enfants des quartiers défavorisés sont curieux, mais ils ont des problèmes d'attention et de motivation liés à leur environnement. Toutes les émotions se traduisent corporellement. L'intelligence artificielle ne sait pas conceptualiser. Il faut l'entraîner avec des millions d'images là où un humain est plus rapide. Elle sait à peine reconnaître des objets déformés. Elle est dépourvue d'émotions, qui sont des signaux positifs que l'on peut maîtriser afin de réagir au mieux à une situation qui nous dépasse (ayant une autre source, je n'ai pas extrait la question-réponse qui en traite). L'intelligence artificielle est le nom donné à simple logiciel de statistiques et de probabilités assisté par des humains précaires. L'empathie, ça s'apprend par la pratique qui, seule, reprogramme notre cerveau.

    Tous les êtres vivants ont-ils un cerveau ?
    Non. Les escargots, par exemple, ont des ganglions, sorte d’ensembles de cellules nerveuses, mais on ne peut pas vraiment parler de cerveau.

    […]

    Pour les enfants des quartiers défavorisés,la science est-elle un univers complètement étranger ?
    Ils ont une curiosité bien plus grande, ils ne sont pas inhibés. Mais ils ont des problèmes d’attention. Chez eux on se coupe la parole, ou bien la télé est tout le temps allumée. L’éducation à l’attention est mieux gérée dans les milieux favorisés. Malheureusement, les élèves les plus difficiles ne sont plus la, ils ont déjà été orientés. On voit des gamins très doués, surtout les filles je dois dire. Mais c’est difficile, la motivation tout d’un coup peut disparaître. […]

    […]

    Du point de vue du cerveau, qu’est-ce qu’une émotion ?
    Une émotion est traduite en motricité, en hormones, on change d’expression, on transpire, on rougit, le coeur bat… Toutes les émotions sont traduites corporellement. Même quand on ne le veut pas.

    […]

    Que les robots deviennent plus intelligents que l’homme, vous y croyez ?
    Absolument pas. Par exemple, pour qu’un robot puisse reconnaître un chat, il faut le nourrir de millions de photos de chats. il suffit à un enfant d’en avoir vu deux pour qu’il sache que c’est un chat. La mémoire des objets par exemple. Si je vous dis : une raquette de ping-pong, vous la visualisez, vous imaginez sa couleur, son poids, sa matière. Vous voyez le geste qui va avec. Si maintenant je vous montre une raquette de ping-pong déformée, molle, vous la reconnaissez immédiatement. Le cerveau sait conceptualiser. Avant que le robot n’y arrive… En revanche, les interfaces cerveau-machine sont un grand progrès. Par exemple, vous êtes paralysé et vous pensez à bouger votre bras. Vous y pensez très fort. La machine enregistre les ondes cérébrales qui changent. Elle ne comprend pas ce qui se passe mais elle sait que ça veut dire « bouger le bras ». Et le bras articulé bouge. Voilà une grande avancée pour toutes les personnes handicapées.

    […]

    Les gens plus empathiques sont-ils « câblés » différemment ?
    Ils le deviennent du fait de leur expérience. Si le cerveau a des constructions pré-établies, les connexions entre neurones sont différentes. Certaines régions deviennent plus importantes que d’autres suivant la vie de l’individu. Par exemple, si vous perdez la vue. La vision dans le cerveau est a l’arrière du crâne, mais ces centres-là ne servent plus a rien. Le toucher envahit alors cette zone, ce qui permet de lire le braille. Il y a une réorganisation continuelle des réseaux de neurones en fonction de ce qui nous arrive.

    Dans le Siné Mensuel de juillet-août 2019.

    Sat Nov 2 12:00:16 2019 - permalink -
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  • La présidente a les étrangers dans le pif

    La présidente d'une cour d'appel française estime que la moitié des dossiers d'étrangers (qui sont, pour partie, des étudiants et des travailleurs, hein) ne vaut rien. Elle préfère privilégier d'autres dossiers. Le Conseil d'État, sa tutelle, voit rien à y redire. N'allons pas trop vite et réfléchissons.

    D'abord, je constate que le raisonnement est circulaire : afin de s'assurer qu'une requête est infondée, il faut l'examiner. C'est parce que sa cour les a examinés qu'elle peut affirmer que la moitié des dossiers étaient « parfaitement jugés » en première instance. Il fallait donc les examiner pour s'en assurer. La cour n'a donc pas perdu son temps, elle a fait ce qui est l'essence de son boulot.

    Ensuite, je lis que cette présidente a dit que « ces appels arrivent sans aucune valeur ajoutée, ce qui nous permet d’en juger la moitié par ordonnance, comme étant manifestement non fondés ». Autrement dit, l'appel n'est pas motivé, il ne justifie rien, aucun fait nouveau est présenté. Ce n'est pas nécessaire puisque le tribunal de première instance peut avoir mal compris / interprété / jugé un dossier. En tant qu'informaticien, je reçois les demandes de recours gracieux envoyées à l'adresse email « ne-pas-repondre@ » de l'organisation pour laquelle je travaille. J'y lis des choses comme "dans votre refus, vous dites que je n'ai pas les compétences requises alors que je les ai". Argumente ? "Je suis sérieux, attentif, respectueux des consignes et soigné". Aaaaah, c'est donc pour montrer tes qualités que t'as répondu à un email dont l'adresse d'expédition est « ne-pas-repondre@ » et qui expose clairement et en gras la voie de recours à utiliser ?! Je peux comprendre l'agacement de cette présidente de cour d'appel. Plein d'éléments objectifs peuvent rendre une plainte caduque : absence d'arguments (exemple ci-dessus), absence de point de droit précis, écrits vagues et généraux, non respect du formalisme prévu par la loi (exemple ci-dessus), etc., ce qui amènera la cour d'appel à confirmer mécaniquement le jugement de première instance.

    Ensuite, je trouve très contestable de hiérarchiser les dossiers, car cela constitue une justice à plusieurs vitesses dans laquelle des thématiques voire des personnes valent mieux que d'autres. C'est comme dire qu'on va privilégier d'autres dossiers que les délits financiers (fraude fiscale, corruption, etc.).

    Enfin, je crois constater que la négation du droit de faire appel d'une décision judiciaire se généralise. Je pense par exemple à la loi Macron de 2015 qui rend obligatoire un avocat ou un défenseur syndical pour faire appel aux Prud'hommes, ce qui empêche les travailleurs pauvres ou de la classe moyenne de faire appel (tous les avocats n'acceptent pas l'aide juridictionnelle, elle est très dégressive donc elle ne couvre pas tout, les avocats qui l'acceptent sont souvent débordés donc la qualité du travail n'est pas garanti, etc.) d'une décision pourtant rendue par des non-magistrats (un point de vue plus juridique serait complémentaire).


    « Un boulet. » Ainsi a qualifié, le 15 octobre, la présidente de la cour administrative d’appel de Nancy les recours formés par les étrangers. Des propos assez surprenants, rapportés par « L’Est républicain », qui ont enflammé les syndicats. « Sur 3 800 requêtes à la cour, il y a 2 500 contentieux d’étrangers, dont la moitié ne vaut rien », a également asséné la présidente. Aussi a-t-elle décidé, « faute de moyens, de ne pas privilégier » ces affaires. Cela lui est même « égal » de les « stocker ».

    La présidente reconnaît cependant que « le droit d’appel est garanti, on ne peut rien y faire ». Trop aimable ! Interrogé, le Conseil d’Etat, tutelle de la cour administrative d’appel, n’a rien trouvé à redire à ces déclarations tonitruantes et s’est contenté de reprendre les chiffres évoqués.

    Une loi, peut-être, afin d’empêcher les sans-papiers d’ennuyer les juges avec leurs appels « infondés » ?

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 19:02:38 2019 - permalink -
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  • Blanquer cumule les handicaps

    La France n'a visiblement pas assez de pognon pour rémunérer décemment et en nombre suffisant des accompagnateurs d'élèves en situation de handicap… Ces personnels sont de plus en plus précarisés et mutualisés entre plusieurs élèves…

    « La rentrée est catastrophique pour les enfants handicapés et leurs parents. Elle est belle, l’école de Jean-Michel Blanquer ! » Jean-Luc Duval, le président du Collectif Citoyen Handicap, est à bout.

    Sur les 430 000 enfants handicapés en France, 14 000 (d’après les estimations de l’associatien) restent en effet aux portes de l'école plus d’un mois et demi après la rentrée, faute d’accompagnement suffisant. Le secrétariat d’Etat aux Personnes handicapées dit ne pas pouveir confirmer un tel chiffre, « faute d’un système d’information commun aux maisons départementales du handicap », mais promet de
    l’obtenir « fin 2020 ». Rien ne presse !

    En attendant, dans les salles de classe, le nombre d’accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) ne suit pas : l’Education nationale se vante d’avoir créé 4 500 « équivalents temps plein » (ETF) d’AESH pour cette rentrée mais oublie de rappeler qu’elle doit accueillir 23 500 élèves handicapés de plus que l’année précédente…

    Le nombre d’AESH plafonne aujourd’hui à 67 000 ETP, alors qu’il en faudrait près du double, au dire des associations. Ces personnels peu formés et ultra-précaires — au smic pour des contrats de 24h, en moyenne — ne savent plus où donner de la tête. « Je dois accompagner un enfant atteint d’autisme, un de trisomie et un autre de troubles moteurs graves, alors que deux d’entre eux devraient bénéficier d’un accompagnement personnalisé », témoigne Sylvie, AESH en Alsace.

    Pris de Cour

    Cet accompagnement au rabais — dit « mutualisé » — des élèves handicapés a la cote. La Cour des comptes le note dans un rapport de 2018 : « Le ministère ambitionne de faire en sorte que l’aide mutualisée devienne la modalité d’accompagnement par défaut, tandis que l’aide individuelle serait réservée aux élèves lourdement handicapés. »

    Une tendance qu’Isabelle Deslandres, inspectrice de l’Education nationale en Seine-et-Marne, a confirmée dans son département, lors d’une audition à l‘Assemblée, le 18 juin : « Avant 2017, nous avions 80 %
    d’accompagnements individualisés et 20 % d’accompagnements mutualisés (…). Aujourd’hui, nous avons environ 80 % [de] mutualisés et 20 % [d’]individualisés (…). L’idée n’était évidemment pas de ne plus accompagner nos élèves mais d’avoir davantage de souplesse. » Budgétaire, surtout.

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 17:43:34 2019 - permalink -
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  • Castaner monte dans les tours du 11-Septembre

    Après la Pitié Salpêtrière et Steve, notre sinistre de l'Intérieur a encore parlé trop vite en affirmant que la France a échappé à son 11-Septembre. Un message vantard sur Internet. 3 gus. Pas d'arsenal. Pas de plan. Pas de détournement d'avions. Poin poin poiiiiiiin.

    Une illustration supplémentaire qu'on ne peut pas faire confiance aux gouvernements, français ou américain même combat, quand ils annoncent avoir déjoués des attentats dans l'optique de faire adopter de nouvelles lois qui restreignent les libertés sans contrepartie.

    Le 17 octobre sur France 2, le ministre de l’Intérieur, sûr de lui, terrorise le téléspectateur : notre pays a échappé à son 11-Septembre. « Un individu, raconte-t-il, était en train de s’organiser pour cela. » Mais la police a bloqué le kamikaze et ses projets de crash aux commandes d’un avion de ligne.

    Renseignement pris, « un individu » — qui ne joue pas vraiment dans la catégorie Ben Laden — a bien été mis en examen et écroué, selon une source judiciaire, le 26 septembre pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». Mais, précisent les enquêteurs, son projet n’avait pas dépassé le stade du message Internet.

    Pieds-Nickelés en renfort

    L’affaire décolle durant l’été avec une surveillance des réseaux sociaux. Un jeune, qualifié d’« immature », se vante de préparer « un truc plus grand que le 11-Septembre ».

    Il en fait des tonnes, précise qu’il détient une arme — c’était vrai — et tente de recruter des complices. Deux Pieds-Nickelés lui répondent : le trio va se mettre en quête d’un arsenal. En vain. Aucune ébauche de plan de vol, encore moins d’un détournement. Par prudence, la DGSI décide néanmoins de les arrêter. Un seul restera au trou, les deux autres exaltés seront relâchés sans aucunes poursuites.

    C’était le 11-Septembre version Castaner.

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 17:29:55 2019 - permalink -
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  • Des taux négatifs… surtout pour le consommateur

    Les revers de la médaille des taux d'intérêt négatifs.

    • 1) Ça crée des bulles, comme l'immobilier dont le coût ne cesse d'augmenter, ce qui prive potentiellement des gens d'un toit ou contraint leur choix, alors que le crédit est vendu comme une libération ;

    • 2) Les dépôts (livret A, assurance-vie remplies d'obligations d'État) ne rapportent plus rien, surtout si l'on retranche l'inflation. Les établissements financiers compensent actuellement les pertes des assurances-vie en puisant dans leurs réserves (sans pour autant compenser l'inflation) ;

    • 3) Les taux d'intérêt faibles des banques (car ils sont indexés sur les taux de la Banque Centrale Européenne afin de rester concurrentiels et crédibles) font que les crédits rapportent moins aux banques. En France, elles compensent partiellement avec les frais bancaires généraux (+ 166 % entre 2012 et 2017 d'après la Banque de France). En Suisse et dans les pays scandinaves, elles compensent en prélevant des intérêts sur les "gros" dépôts (seuil récemment abaissé à 100 000 euros).

    Le Canard ne le mentionne pas, mais ces taux négatifs affectent également les fonds de pension et de retraites (car, comme tout le monde, ils sont contraints de prêter à taux négatif l'argent des retraites des Américains ou de l'assurance-chômage des Français). Cela affecte les créanciers par une érosion monétaire (ils prêtent, à un État, par exemple, en acceptant d'avance une perte partielle, c'est ce que signifie un taux négatif), qui est renforcée par la composition des taux d'intérêt (les intérêts générés l'année N sont soumis à des intérêts l'année N+1 qui eux-mêmes…), ce qui réduit la capacité (et la volonté) d'un acteur à investir. Les gestionnaires d'actifs / de patrimoine ne parviennent plus à justifier leur commission (comment justifier une commission sur des placements qui rapportent rien ?). La seule issue est de continuer à endetter, donc les établissements financiers financent des États, des particuliers et des sociétés commerciales défaillants… ce qui augmente leurs risques d'une perte totale et fait courir un risque global sur l'économie, comme un effondrement massif de sociétés commerciales ou de particuliers sur-endettés. Source : L'explosion des banques ?.


    C'est l'histoire d’un banquier qui se transforme en Père Noël. Au printemps 2014, Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne (BCE) — prochainement remplacé par Christine Lagarde -, décide subitement d’inonder l’Europe d’argent à bon marché. Pourquoi tant de générosité ? D’abord pour relancer la croissance européenne, écornée par la crise de 2008 : avec ce déluge d’oseille et des taux de crédit quasi nuls — voire négatifs —, les entreprises vont investir à tour de bras, et les individus consommer jusqu’à plus soif. Ensuite, Draghi entend éviter le naufrage d’un pays européen surendetté. La Grèce, l’Italie, l’Espagne — la France ? — trouveront ainsi les fonds pour financer leurs énormes déficits.

    C'était aussi pour relancer la machine après la crise de l'euro de 2011-2012. Les États étant considérés, par les marchés financiers, comme étant sur-endettés par le sauvetage des mêmes banques en 2008, ils ne pouvaient être perçus comme des garants crédibles, donc il fallait un autre rempart. Ce sera l'émission de prêts à long terme (LTRO) par la BCE (1 000 milliards d'euros). Ces prêts sont un cache-misère court-termiste inapte à résoudre une crise de sur-endettement qui se dénoue forcément sur le long terme (car il y a une pyramides de créanciers qui s'écroulent en cascade en cas de non remboursement) comme celle de 2008. Entre 2015 et fin 2018, la BCE a donc racheté pour environ 2 600 milliars d'euros de créances aux acteurs financiers privés (quantitative easing). Ce rachat est la source des taux négatifs.


    Un temps efficace, la recette ne marche plus aujourd’hui. La croissance européenne est repartie àla baisse, et de nombreux citoyens constatent au quotidien que la gratuité peut coûter cher…

    Bilan.

    L’immobilier (dé)coince la bulle

    Bons pour l’immobilier, les taux bas ? Certes, à 1,20 % en moyenne pour un prêt sur vingt ans (« meilleur-taux.com », 7/10), la facture de l’emprunteur a diminué de plus de la moitié en cinq ans. Sauf que ces taux bas provoquent une ruée des acheteurs : un record absolu de 1 million de ventes a été battu cette année. La hausse des prix — féroce — qui l’accompagne ressemble à une bulle financière. A ce sujet, la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) a récemment publié une cruelle étude.

    Oui, le pouvoir d’achat immobilier des ménages a grimpé : avec la même mensualité de remboursement, ces derniers peuvent souscrire un crédit d’un montant 23 % plus élevé qu’en 2005. Mais le mètre carré, lui aussi, a flambé. Depuis 2016, la capacité d’emprunt ne progresse plus du tout. Elle a même chuté d’environ 10 % dans des villes où la demande est forte — tels Paris ou Lyon. Merci l'inflation !

    Une épargne que rien n’épargne

    Adieu, le placement de père de famille lucratif et sans risque ! Le malaise a commencé avec le Livret A (300 milliards de dépôts), dont le taux dépend de celui des prêts entre banques « au jour le jour ». Ce dernier étant négatif, confier ses sous au Livret A devrait — en appliquant mécaniquement la règle de fixation des taux — rapporter royalement 0,3 %. Le sujet étant explosif, Bercy maintient un rendement de 0,75 %, mais pourrait le raboter à — 0,5 % au printemps . Inflation déduite, l’heureux épargnant pourra perdre chaque année 0.6 % de son nécule. Tentant !

    Pour l’assurance-vie en euros — 1 400 milliards, soit le tiers de l’épargne des Français —, c’est la même dégringolade. Normal : les fonds sont investis en obligations d’Etat françaises, donc à - 0,3 %. En puisant dans leurs réserves, les compagnies d’assurance-vie verseront, cette année encore, entre 1 et 1,50 % d’intérêt (soit moins que les 1,80 % d’inflation de 2018). Mais ces largesses ne vont pas durer.

    Des clients qui banquent toujours plus

    Leurs taux faméliques ne couvrant pas les frais de gestion, les prêts immobiliers ne rapportent plus rien aux banques. Conséquences ? D’abord, depuis le début de l’année, une purge sur l’emploi : 50 000 postes ont été supprimés dans des établissements européens tels que la Société générale, Commerzbank, Deutsche Bank, UniCredit. Le client dérouille aussi : plusieurs banques ont annoncé qu’elles entendaient frapper d’un intérêt négatif (environ 1 %) les dépôts trop cossus : supérieurs à 1 million il y a un mois, à 100 000 euros aujourd’hui. En France, « il n’y a pas de décision prise » à ce sujet, assure un porte-parole du Crédit agricole. Pour le moment.

    Les frais bancaires, eux, n’ont pas attendu, même si, gilets jaunes obligent, Macron a exigé leur gel temporaire en 2018. Selon la Banque de France, ils ont augmenté de 166 % entre 2012 et 2017.

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 17:09:29 2019 - permalink -
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  • Trump s'essuie encore les pieds sur ses alliés

    Trump a-t-il retiré ses bidasses de Turquie pour renouer des liens avec Poutine, qui soutient Erdogan et/ou car l'armée Turque est celle qui met le plus d'effectifs au service de l'OTAN et/ou parce que la Turquie s'équipe beaucoup en camelote militaire américaine ? En tout cas, « La Turquie, la Russie et l’Iran en sortent gagnants » et l'Europe reste totalement amorphe. D'après un autre article du Canard enchaîné du 23/10/2019, cet épisode renforce Macron dans sa conviction de la nécessité d'une autonomie européenne en matière de défense et d'un accord stratégique avec la Russie.

    Diplomates et militaires ont constaté qu’il n’a même pas épargné Macron, en se retirant de Syrie.

    « J'ai découvert par tweet, comme tout le monde, que les Etats-Unis décidaient de retirer leurs troupes (de Syrie) et de libérer la zone. » Le 18 octobre à Bruxelles, à l’issue du Conseil européen des chefs d’Etat, Macron a admis, devant la presse, que Donald Trump se moquait vraiment de ses alliés et de celui qu’il appelle son « copain Emmanuel ». En a-t-il été surpris ? Sans doute pas, mais quelle humiliation…

    Au Quai d’Orsay et à l’état-major des armées, personne ne le conteste, et le Président montre qu’il est bien atteint. A preuve, les propos qu’il a tenus devant les journalistes, à Bruxelles : « J ’ai compris aussi qu’une puissance de l’Otan (la Turquie) décidait d’attaquer ceux qui ont été les partenaires de la coalition internationale [et se sont battus] contre Daech. » L’Occident et l’Otan ont commis là « une faute lourde », a ajouté Macron, avant de conclure tristement : « La Turquie, la Russie et l’Iran en sortent gagnants. »

    Si Macron a osé critiquer ainsi les Etats-Unis, sans les nommer et avec une modération remarquable, le secrétaire général de l’Otan, le Norvégien Jens Stoltenberg, n’a pas trouvé, lui, un seul mot à dire lors du Conseil européen. Au risque de donner raison à ceux qui tiennent les dirigeants civils de cette institution pour des hommes de paille et de simples exécutants des volontés américaines.

    A Washington, en revanche, certains se montrent bien plus flambards. Les militaires français ont ainsi appris que le patron du Pentagone, Mark Esper, allait se rendre un jour prochain au siège de l’Otan, en Belgique. Aussi arrogant que l’est Donald Trump, il a confié à ses conseillers qu’il comptait demander aux alliés des Etats-Unis de prendre « des mesures diplomatiques et économiques, collectivement, individuellement, en réponse aux actions turques ». Mais sans trop fâcher Erdogan, bien sûr.

    Cet épisode « syrien » des relations avec Washington prouve que le « problème des Européens », comme on dit au Quai d’Orsay, ne se résume pas au seul fait qu’ils sont les obligés d’un drôle de président américain, un homme plein de morgue, grossier, imprévisible et mégalo… En réalité, c’est l’attitude et le comportement, face à Trump, des dirigeants français, allemands et britanniques qui sont « un problème ». Et leur absence de réaction, quoi que celui-ci puisse dire, proclamer ou décider.

    Européens amorphes

    Exemples : Trump a maintenu et aggravé les sanctions contre la Russie et contre l’Iran, il a supprimé toute aide humanitaire aux Palestiniens, etc. Comment ont réagi les Européens ? Ils ont à peine grogné, puis ils se sont couchés devant les oukases américains. Ils ont cessé toute exportation agricole ou industrielle vers Moscou et Téhéran puis fermé leurs usines en Iran et perdu des dizaines de milliards d’euros et de dollars.

    Pour Trump, retrouver de bonnes relations avec Erdogan, qui fricote aujourd’hui avec Poutine, valait bien de malmener ainsi ses très nombreux alliés. « La Turquie n’est pas n’importe quel pays, aux yeux de Washington » explique un général français. Son armée — la deuxième de l’Otan en effectifs — aligne 760 000 hommes. Elle a offert deux bases militaires aux Etats-Unis, plus une autre à l’Otan (Incirlik), où les Américains, qui y règnent en maîtres, ont entreposé une cinquantaine de bombes nucléaires tactiques B.61. Autre argument en faveur de la Turquie d’ Erdogan, son armée est equipée à 60 % de matériels américains : 333 avions de combat, dont 200 F-16, 2 400 blindés (aux côtés de chars Leopard allemands), 31 appareils de transport, des tonnes de missiles et de bombes, etc.

    Et Trump, qui n’a pas annoncé un arrêt des livraisons américaines, ne compte sans doute pas en rester la. Sous le regard de ses alliés ?

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 16:02:14 2019 - permalink -
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  • Une réforme de la justice arbitrée par les résultats électoraux de LRM

    En application de la réforme de la justice votée en mars 2019, et en sus de la fusion des tribunaux d'instance et de grande instance, l'exécutif prévoit de supprimer des postes de juge d'instruction, ceux qui traient moins de 50 dossiers par an. Les emplois seront préservés, les juges seront mutés dans un autre tribunal ou exerceront une autre fonction. Pourquoi pas, tant que ce redéploiement profite au justiciable. Le citoyen étant attaché à son juge d'instruction, le sinistère de la justice prend en compte les scores électoraux passés de LREM pour orienter ses décisions et prévoit d'annoncer les choix tendus après les élections municipales.

    J'ai hésité avant de relayer cet article. Après tout, tout se décide toujours en fonction des scores électoraux. Dernier exemple en date : l'ampleur de la réforme constitutionnelle à venir dépendra du score du parti présidentiel (et de son potentiel allié, l'UDI) aux municipales et aux sénatoriales. De même, la séparation des pouvoirs est constamment enfreinte, notamment entre l'exécutif et le législatif (exemple 1, exemple 2, exemple 3), mais aussi entre l'exécutif et le judiciaire (exemple 1, exemple 2). Mais, c'est justement ma résignation qui me montre qu'il y a un problème et qu'il faut en parler. Donc, rien de neuf, certes, mais il serait temps de réagir.


    Un document de la Chancellerie l’affirme : les suppressions de postes de juge d’instruction dépendent des scores macronistes.

    Quel est le point commun entre Bar-le-Duc, Mâcon, Carpentras, Belfort, Arras et Dieppe ? Pour le ministre de la Justice, c’est kif-kif : toutes ces villes et une trentaine d’autres possèdent un tribunal avec un juge d’instruction qui, selon une note « confidentielle » adressée par la Place Vendôme à Matignon, traite « moins de 50 dossiers par an » et occupe le reste de son temps à d’autres fonctions. Inacceptable !

    J'aimerais savoir comment est calculé ce chiffre. Prend-il en compte seulement les nouveaux dossiers ouverts durant une année ou aussi ceux ouverts les années précédentes sur lesquels le juge doit encore se pencher ? 50 dossiers par an, ça fait un dossier par semaine. Est-ce suffisant pour assurer une justice de qualité ? C'est ce que j'aimerais que l'on me dise.


    Voilà pourquoi la Chancellerie veut supprimer ces oisifs et expédier leurs affaires dans les grands tribunaux d’à côté. Une chouette idée, non ? Pas sûr. Car les magistrats mais aussi les élus sont allergiques à toute diminution de leurs « acquis ». Quant aux électeurs, ils vouent un certain attachement au juge d’instruction, symbole du « petit juge » seul contre les puissants. Même si, aujourd’hui, moins de 3 % des affaires pénales passent par lui.

    Le sabre et la balance

    La prudence s’impose donc, d’autant que les élections municipales approchent. Pas question de faire perdre des points à La République en marche. Le très fidèle directeur des affaires judiciaires de Nicole Belloubet a concocté des « éléments de langage », d’une extrême finesse, censés rassurer le petit monde des hermines : « Il s’agit de répondre à la solitude du juge d’instruction (…). Même s’il est supprimé, [un] poste à temps plein sera conservé (…). Donc, on ne dévitalise pas la juridiction. » Clin d’œil bien léger aux avocats : « En plus, ça rajoutera du contentieux (le juge d’instruction se transformant en juge des affaires courantes) et le barreau s’y retrouvera ! » Si, avec ça, tout le monde n’applaudit pas…

    Mais ces arguments ne sont qu’un hors-d’œuvre. A la note a été joint un grand tableau où figurent « les juridictions dans lesquelles les chefs de cour seraient susceptibles de nous proposer une suppression de l’instruction contre l'introduction d’une autre compétence spécialisée. »

    Tentations macronistes

    De la justice pesée au trébuchet ? Presque, car l’inventaire est agrémenté, pour chaque ville et son tribunal, des scores d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle, et de LRM aux législatives et aux européennes. Ainsi que des couleurs politiques des élus, députés et maires. Autrement dit. des arguments bassement électoraux risquent de fausser les plateaux de la balance (lire encadrés)…

    Un exemple avec Montluçon, où le juge d’instruction traite 22 dossiers par an. Supprimé, donc, pour cause d’anémie ? Eh bien, pas si sûr ! Le député appartient à la majorité présidentielle, le maire est LR, Macron y a obtenu 24,4 % au premier tour en 2017, LRM 23,4 % aux législatives et 19 % aux européennes. Va-t-on risquer une nouvelle baisse en irritant l’électeur Marcheur ? Même dilemme à Arras et à Saint-Omer, leurs députés LRM, leurs maires UDI et de super résultats macronesques aux trois dernières élections… Pas de problème à Alençon, en revanche, où le député est socialiste, ni à Argentan, où il est LR ? C’est à voir, étant donné les excellents scores récoltés par LRM lors des trois scrutins. Et vu les tentations de rallier la majorité qui saisissent certains élus d’opposition… « Il s’agit d’un travail interne au ministère, a répondu la Chancellerie. Il est normal de tenir compte des impacts électoraux comme de la qualité de la justice. » En effet.

    Le plus urgent est donc d’attendre. Car, comme le précise la note « confidentielle » du cabinet Belloubet citée ci-contre, dans les villes potentielles « cibles électorales », les magistrats chefs de juridiction seront priés de « différer les annonces ». Sous-entendu : après les municipales de mars. Encore une preuve éclatante de la séparation des pouvoirs en France. Et surtout de l’indépendance de la justice, dont se glorifient tous les gouvernements en s’asseyant dessus…


    L'aveu

    Retranscription d’une note « confidentielle » adressée à Matignon par le ministère de la Justice. Pour superviser la réforme, la présence de Xavier Chinaud, conseiller du Premier ministre et spécialiste de la carte électorale, est vivement souhaitée.

    Nous serions preneurs d‘une réunion avec X. Chinaud et les experts des élections municipaies de LaREM pour que nous puissions avoir une idée des communes potentiellement concernées qui représenteraient des cibles électorales pour les municipales afin de faire différer les annonces par les chefs de cour des schémas retenus

    Ce document montre à quel point les suppressions de postes de juge d’instruction sont guidées par le souci d’une bonne administration de la justice !

    Aux côtés de Chinaud, les « experts des élections municipales » sont priés d’organiser une « réunion » pour décider. C’est après avoir passé à la loupe les élus en place, les possibles alliances électorales et les scores de LRM - obtenus ou à prévoir - que l’on aura une idée précise des magistrats instructeurs sacrifiés ou épargnés…


    Le palmarès des juges menacés

    Ils traitent moins de 50 dossiers par an et sont susceptibles de disparaître, selon le tableau établi par la Chancellerie. Mais pas sûr ! Ces juges d’instruction sauveront — ou non — leur peau au gré des calculs électoraux concernant les villes où ils officient et des étiquettes politiques de leurs élus. Celles-ci sont parfois obscures. Ainsi, DVD signifie « divers-droite », SE « sans étiquette », GDR réunit des communistes et des divers-gauche, et Libertés et Territoires un peu de tout…

    Si la suppression du poste de magistrat instructeur est décidée, l’annonce n’aura lieu qu’après les élections. Un horrible casse-tête !

    Albertville : député et maire LR
    Albi : député LRM. Maire DVD
    Alençon : député et maire PS
    Argentan : député LR. Maire PS
    Arras : député LRM. Maire UDI
    Avesnes-sur-Helpe : 2 députés LRM. Maire UDI
    Bar—le-Duc : député Libertés et Territoires
    Belfort : 1 député UDI, 1 député LR. Maire LR
    Bergerac : député LRM. Maire DVD
    Brive-la-Gaillarde : député LR. Maire LR
    Cambrai : député UDI. Maire UDI
    Carcassonne : 2 députés LRM. Maire DVD
    Carpentras : 1 député LRM. 1 député LR. Maire LRM
    Castres : 2 députés LRM. Maire SE
    Compiègne : 1 député LR. 1 député LRM. Maire LR
    Dieppe : député GDR. Maire PCF
    Fontainebleau : député et maire LR
    Les Sables-d’Olonne : député LRM. Maire LR
    Lisieux : député LR. Maire SE
    Mâcon : député LRM. Maire LR
    Montluçon : député LRM. Maire LR
    Moulins : député GDR. Maire LR
    Saintes : député LRM. Maire DVD
    Saint-Omer : député LRM. Maire UDI
    Saint-Quentin : député et maire LR
    Sarreguemines : député LRM. Maire LR
    Saverne : député LR. Maire ex-LR
    Sens : député LRM. Maire LR
    Soissons : député LRM. Maire DVD
    Thionville : député LRM. Maire (ex-LR) DVD
    Tulle : député LRM. Maire PS
    Vannes : député LRM. Maire ex-LR
    Verdun : député LRM. Maire PS
    Villefranche-sur-Saône : député et maire LR

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 15:42:32 2019 - permalink -
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  • Les déroutes départementales

    La taxe sur le foncier bâti tombera dans les caisses des communes, plus dans celles des départements, afin de compenser la perte de la taxe d'habitation. Les départements recevront un bout de TVA. Deux choses me sidèrent. 1) Nous faisons n'importe quoi : on compense, par une taxe, un changement de bénéficiaire d'une autre taxe pour compenser la suppression partielle d'une troisième taxe. WAAAAAT ?! Il ne faut pas s'étonner de la hausse de la défiance des contribuables envers l'impôt ! 2) Nos élus savent s'opposer vigoureusement à l'exécutif quand il s'agit de sauver leur tête (les départements financent des services appréciés des citoyens). Dommage que ça ne soit pas plus souvent.

    Un vent révolutionnaire a soufflé sur le 89e Congrès de l’Assemblée des départements de France (ADF), qui s’est tenu pendant trois jours la semaine dernière à Bourges.

    Les présidents de département, toutes tendances confondues , ne digèrent pas le fait qu’on leur enlève la taxe sur le foncier bâti (transférée aux communes, pour compenser la perte de la taxe d’habitation) et qu’on la remplace par une part de TVA, bien plus aléatoire.

    « Heureusement qu’Edouard Philippe ne vient pas, confiait même Dominique Bussereau, le président de l’ADF, il aurait été mal accueilli. »

    C’est donc sa ministre Jacqueline Gourault qui a fait face à la révolte, le 18 octobre. Les congressistes s’étaient initialement mis d’accord pour ne pas l’applaudir, ni avant ni après son discours : rien qu’un silence glacial.

    Mais, quand la ministre de la Cohésion des territoires leur a vanté la réforme du foncier bâti, votée le matin même par les députés, leur sang n’a fait qu’un tour. Près des trois quarts d’entre eux se sont levés et ont quitté la salle pour aller chanter dehors « La Marseillaise ».

    Ne leur reste plus qu’à faire chanter Jacqueline Gourault…

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 14:54:32 2019 - permalink -
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  • [ 363 sans-papiers fichés S pour soupçon de radicalisation islamique ont été expulsés de France entre 2017 et novembre 2019 ] Le scoop du Conseil

    363 sans-papiers fichés S pour soupçon de radicalisation islamique ont été expulsés de France entre 2017 et novembre 2019. Je trouve ça peu crédible (comment débusque-t-on ces personnes puisqu'elles émettent très peu de signes matériels de radicalisation ?), d'autant que la seule autre source est BFMTV… En tout cas, Macron propose de renforcer toujours plus la surveillance dans les services (de renseignement ?) sensibles, en prison, à l'école et dans les associations. Ça fait juste 30 ans que ça renforce dans le vide…

    « Depuis 2017, nous avons expulsé 363 étrangers fichés S. » Emmanuel Macron s’est félicité, au cours du Conseil des ministres du 21 octobre, de la lutte menée contre la radicalisation et le communautarisme.

    Il a quand même tenu à préciser qu’il fallait améliorer le criblage dans les services sensibles et le renseignement en prison. Et que la surveillance de certaines associations et écoles coraniques devait être renforcée.

    A part ça, rien à craindre !

    Dans le Canard enchaîné du 23 octobre 2019.

    Fri Nov 1 14:41:11 2019 - permalink -
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  • Environ 90 milliards d'euros d'éxonération de prélèvements sociaux en 2019 et le Medef en appelle de nouvelles

    D'après le rapport 2019 sur la Sécurité sociale de la Cour des comptes, les niches sociales (exonérations de prélèvements sociaux) s'élèveraient à environ 90 milliards d'euros en 2019. Le gouvernement et le Parlement avaient calculé et présenté environ 66 milliards d'euros de niches sociales dans la loi 2019 de financement de la Sécu, soit environ 32 milliards de plus que ce qu'ils avaient affiché dans la loi de 2013. Ces 32 milliards d'euros correspondent principalement au Pacte de responsabilité mis en œuvre depuis 2014 pour 9 milliards d'euros par an auxquels s'ajoutent 18 milliards d'euros par an de CICE, devenu une exonération de cotisations sociales en 2019. Ainsi, le bond est fulgurant, mais au global, l'État gagnera en impôt sur les sociétés ce que la Sécu (branches maladie et famille) perdra en cotisations. L'écart entre les 90 milliards d'euros (environ) calculés par la Cour et les 66 milliards calculés dans la loi 2019 de financement de la Sécu vient principalement de mesures évoquées dans la loi mais non reprises dans le tableau de synthèse de celle-ci (exonération ou réduction de CSG sur les revenus de remplacement autres que retraites et chômage pour 4,3 milliards d'euros, par exemple) et de mesures évoquées dans la loi mais non chiffrées (exonération de CSG sur les retraites de base et les allocations chômages, pour 4,3 milliards d'euros, par exemple).

    Il y a quelques semaines, la presse nous rapportait que Gattaz, l'ancien patron du Medef, exhorte Roux de Bézieux, le nouveau patron du Medef, à s'engager à créer 2 millions d'emplois sur 5 ans en se basant sur son exemple… qui a été un échec puisque le CICE et le Pacte de responsabilité n'ont pas créés 1 million d'emplois entre 2014 et 2019. Je me demandais ce que le Medef allait demander en échange. Le Medef veut de nouvelles exonérations de prélèvements sociaux, sur le financement des transports en commun ou sur le financement de la dépendance / journée de solidarité, par exemple. Le gouvernement y pense, sans contrepartie annoncée, mais ne sait pas comment compenser, dans le budget des communes, ces rentrées d'argent. Je trouve dingue de refuser d'inscrire les sociétés commerciales dans un environnement économique global, comme si une société commerciale était indépendante de tout (transports, handicapés, éducation) et ne s'inscrivait pas dans une société humaine qui la dépasse : à quoi bon générer de la valeur économique si l'on en fait rien d'utile pour l'ensemble de la société ?


    On croyait que le Medef et la plupart des chefs d'entreprise français n’étaient pas trop mécontents de la politique fiscale de Macron. Le CAC 40 se porte bien ; les dividendes et les bénéfices augmentent, merci.

    Yep, versement record de dividendes en France et dans le monde en 2018.


    Pourtant, on apprend dans « Le Figaro » (10/10) que « les impôts de production plombent les entreprises ». Le président délégué du Medef, Patrick Martin, précise la pensée patronale : « La baisse de l’impôt sur les sociétés n’est pas suffisante. » Et il se désole de n’avoir rien trouvé dans le projet de budget pour 2020 « pour diminuer ces impôts et taxes sur les facteurs de production », comme le « versement transport » [ financement des transports en commun en IdF ou dans les bleds qui l'ont mis en œuvre ] ou la « contribution de solidarité » [ financement de la dépendance (âge ou handicap), autre nom de la journée de solidarité ].

    Cet émouvant appel au secours prouve au moins que les dirigeants du Medef n’ont pas perdu l’appétit.

    […]

    Autre sujet de mécontentement pour le Medef : le rapport de la Cour des comptes sur la Sécu, rendu public mardi dernier. « Les propositions des magistrats financiers, préviennent “Les Echos” (9/10), ne manqueront pas d’agacer le patronat. » Il faut dire que les experts de la Rue Cambon soulignent cruellement « le poids croissant des allégements généraux de charges patronales, estimés à 52 milliards d’euros », soit 26 milliards de plus qu’en 2013.

    Mais, qu’on se rassure, le gouvernement n’est pas près de fermer le robinet.

    Dans le Canard enchaîné du 16 octobre 2019.

    Thu Oct 31 15:53:01 2019 - permalink -
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  • Signé Buren

    Vache de découverte signalée par « Le Figaro » (12/10) : « Des chercheurs japonais ont peint des bovins pour que leurs robes imitent celles des zèbres. Ils attirent ainsi deux fois moins d'insectes. » Explication : « Les pittoresques rayures noires et blanches perturberaient la vision des insectes, les empêchant de négocier correctement leur atterrissage sur les corps des zèbres. »

    Mais que fait la SPA contre ces crashs ?

    L'explication me paraît trop simple vu la malveillance des insectes. Je penche pour une diversité de facteurs explicatifs.

    Dans le Canard enchaîné du 16 octobre 2019.

    Thu Oct 31 14:02:31 2019 - permalink -
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  • Langue de bouée

    « Le Parisien » (11/10) a fait le compte : « Il existe environ 2 000 prix littéraires français, dont certains sont insolites. » Parmi ces derniers, « le prix de la page 111, qui récompense depuis 2012 la meilleure page 111 d'un roman de la rentrée, ou le prix de Chlore, créé en 2017, qui couronne la meilleure scène de piscine ».

    Les recalés pourront se consoler avec le prix du Vestiaire.

    Dans le Canard enchaîné du 16 octobre 2019.

    Thu Oct 31 14:01:54 2019 - permalink -
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  • La discrète pompe à millions de l‘Elysée

    En 2020, le budget de fonctionnement de l'Élysée devrait être de 121 millions d'euros, dont 11 millions pour réaménager le palais, agrandir les locaux du quai Branly et poursuivre les travaux du fort de Brégançon (150 000 euros). Pour compenser, l'hôtel particulier dans lequel réside l'état-major particulier du Président devrait être vendu en 2022 (je n'y crois pas trop, où sera relogé le petit personnel du Président ?). Le budget sera déficitaire, donc il faudra piocher 4 millions d'euros dans les réserves (16,5 millions d'euros). Une gestion en bon père de famille responsable, on vous dit ! N'y a-t-il pas d'autres priorités ? Restaurer des bâtiments, historiques ou non, qui tombent en ruine, par exemple, car il y a des millions de mal-logés (insalubrité, menace d'effondrement, etc.) en France…

    Soucieux de faire croire que ses dépenses resteront sages en 2020, l’Elysée vient de se livrer à un festival de pirouettes comptables. Les documents transmis aux parlementaires, qui vont voter la loi de finances, affichent des prévisions de dépenses de 110,4 millions. Il y aura 11,2 millions de plus.

    Ce rab inattendu ne figure pas dans les tableaux de présentation du budget. Il est planqué dans d’autres pages, consacrées au « schéma directeur immobilier de la présidence de la République ». Censé s’achever en 2022, ce programme de travaux vise à agrandir les locaux utilisés par l’Elysée dans ses anciennes écuries du quai Branly et à réaménager le palais lui-même.

    Si le ministère de la Culture allongera 5,2 millions au titre des monuments historiques, le reste du financement est plutôt original. Six millions seront payés par un compte spécial du Trésor réservé à la gestion du patrimoine immobilier de l’Etat.

    Immeuble baladeur

    Ce mécanisme est qualifié de « très surprenant » par les experts. En pratique, l’obole du Trésor est considérée par Bercy comme une « subvention » versée pour financer les travaux engagés par Macron.

    Mais pourquoi la somme ne figure-t-elle pas au budget ? Le ministère des Comptes publics assure qu’il s’agit d’une simple « avance » consentie sur la vente future d’un immeuble occupé par la Présidence au 14 rue de l’Elysée. Estimé à 27 millions d’euros pour 1 400 m2, cet hôtel particulier — qui abrite aujourd’hui l’état-major particulier du chef de l’Etat — doit être cédé en 2022. En principe…

    Le fort de Brégançon pourra, au passage, bénéficier de quelques menus travaux. L’an prochain, 150 000 euros sont prévus pour achever la rénovation des cuisines, et de salles de bains et d’installations techniques. Avec les chantiers déjà engagés dans le fort depuis 2018, plus de 400 000 euros auront ainsi été consacrés à cette résidence.

    Les cuisines du chef

    Les traditionnelles dépenses affectées aux « moyens généraux » de l’Elysée grimpent également fortement. Une partie de la hausse est justifiée par le transfert de certaines charges de sécurité assumées jusqu’alors par la Place Beauvau. Subsiste néanmoins un « bonus » de 1,8 million pour « améliorer » les autres crédits de repas, de réception, de paperasserie ou de gestion quotidienne de Brégançon…

    Les sommes votées par le Parlement et les discrètes subventions de la Culture ou de Bercy ne suffiront pourtant pas à régler la douloureuse. Une fois de plus, Macron va être contraint de piocher dans les réserves financières de 16,5 millions laissées par son prédécesseur Hollande : il y puisera 4 millions l’an prochain, après avoir siphonné 2,1 millions en 2017, 5,7 millions en 2018 et 2,5 millions cette année ! De l’aveu même du Château, ce mouvement devrait se poursuivre jusqu’à la fin du mandat et laisser les réserves à peu près à sec…

    Dans le Canard enchaîné du 16 octobre 2019.

    Thu Oct 31 14:00:17 2019 - permalink -
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  • La diète de trop pour les hostos

    Selon le projet de loi de financement de la Sécu 2020 actuellement débattu au Parlement, une partie des dépenses estimées des hôpitaux ne sera pas financée, ce qui contraindra mécaniquement les hostos à réaliser 800 millions d'économies en 2020. Les 754 millions d'euros annoncés par la sinistre de la santé sont un redéploiement, c'est-à-dire qu'on flèche pour les urgences de l'argent jusque-là consommé par d'autres services des hôpitaux (source : Siné mensuel d'octobre 2019). En 15 ans, le coup de rabot s'élèverait à 8,6 milliards d'euros. :O Les patients sont mis en danger : les soignants consignent, dans des registres officiels (OSIRIS au sein de l'APHP, par exemple), des erreurs de prescription (confusion létale entre chlorure de sodium et chlorure de potassium, par exemple), des situations hors de contrôle et d'autres pratiques erronées quotidiennes dues à la fatigue et à la surcharge de travail (source : le Canard enchaîné du 04/09/2019). Les infirmières et les aides-soignantes renoncent à leur vocation plutôt que d'avoir des idées suicidaires et des salaires de merde. La sinistre de la santé estime que le budget 2020 prévu préserve l'hôpital, cherche l'erreur.

    Je pense qu'il faut revenir à des raisonnements simples. Voulons-nous un service public de soins ? Oui ou non. Quels domaines de la médecine doit-il couvrir (j'imagine qu'environ personne est partant pour financer des pratiques de charlatans, etc.) ? Quelle qualité de service doit-il assurer (des soignants à bout de souffle est-il tolérable ? Atteindre des heures dans un couloir voire décéder par absence de soins est-il acceptable, etc.) ? Des réponses simples à ces questions simples permettent de nous décider collectivement puis d'évaluer le coût associé au service désiré. Une fois que c'est fait, les citoyens assument et payent via un unique impôt compréhensible et non déguisé. Point barre. Simple. Ça ne part pas dans tous les sens.

    Au secours, l’hôpital coule ! Mais Macron n’y peut rien : « La crise actuelle à l’hôpital, c’est une crise qui vient de loin, qui vient de vingt ans de serrage de boulons », s’est défaussé Jupiter le 3 octobre, à Rodez, lors d’un débat sur les retraites. Le mieux est donc… de poursuivre ce régime de malade !

    Le budget 2020, annoncé le 30 septembre en Commission des comptes de la Sécurité sociale, n’inverse nullement la vapeur. il impose même un nouveau « serrage de boulons » : les hôpitaux devront encore réaliser 800 millions d’économies cette année ! A l’heure où ils traversent une crise d’une ampleur inédite, il fallait oser…

    Le budget (l’Ondam hospitalier, dans le jargon) progressera de 2,1 %, là où les dépenses augmentent mécaniquement de 4 %. Un énième coup de rabot « incompréhensible », a dénoncé la Fédération hospitalière de France (FHF) : « C’est une douche froide, a tonné son président, Frédéric Valletoux. Je pensais que le gouvernement avait mesuré l’urgence d’apporter de l’oxygène aux établissements de santé. » Eh non !

    Faire bloc

    En quinze ans, selon la FHF, les économies effectuées s’élèvent à 8,6 milliards. Continuous gaiement : à ce rythme, l’hôpital public va tout bonnement « s’effondrer », avertit le Collectif Inter-Hôpitaux, qui, loin d’une bande de doux dingues, réunit la crème des professeurs de médecine et des centaines de soignants. Lors d’une assemblée générale effervescente, le 10 octobre, ces casseurs d’ambiance ont réclamé un budget hospitalier à la hauteur des dépenses, et 300 euros d’augmentation afin de revaloriser les salaires « indignes » des infirmiers et des aides-soignants.

    Les huiles de la faculté ne savent plus comment faire comprendre « la gravité de la situation » : « La médecine d’urgence n’est que (…) le premier maillon à craquer. Demain, la crise pédiatrique risque de faire très mal », a averti le professeur Bruno Riou, le très raide doyen parisien. Et ce n’est qu’un début : « l’effondrement de certaines structures » a déjà commencé.

    Sous perf

    A Paris, faute de personnel pour les faire tourner, 900 lits sont actuellement fermés. Les soignants fuient en masse des salaires trop bas et des conditions de travail délirantes. « Tous les jours, je reçois dans mon bureau des infirmières en larmes qui partent. On est devenus des manageurs de la colère », a témoigné une cadre lors de l’assemblée générale du 10 octobre. « Un jour, je suis arrivée dans mon service. Je me suis dit : “C’est la que je vais me pendre." C’est la que je suis partie [de l’hôpital] », a raconté une aide-soignante. Une infirmière de la Pitié-Salpêtrière, elle, avait du mal à retenir ses larmes : « Je vis dans une chambre de garde depuis un an car je n’arrive pas à me loger avec mon salaire. »

    Dimanche 13 octobre, sur CNews, Agnès Buzyn a reconnu « un problème de rémunération ». Mais, dans « Les Echos » (9/10), elle s’est aussi félicitée sans rire : « Avec ce projet de loi (de finances), nous préservons l’hôpital. »

    Plus c’est gros, plus ça casse ?

    Dans le Canard enchaîné du 16 octobre 2019.

    Thu Oct 31 12:53:41 2019 - permalink -
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  • Accroissement des inégalités aux États-Unis et en France

    En 2018, les 400 américains les plus riches ont été taxés à hauteur de 23 % (contre 70 % dans les années 1950), soit un taux inférieur à celui des 10 % de personnes les plus pauvres de la population (26 %).

    D'après l'INSEE, la France devrait suivre le même chemin (plus modérément tout de même) à cause, entre autres, de la flat-tax (de son vrai nom prélèvement forfaitaire unique - PFU -). Quelle surprise ! Vraiment ! Il s'agit de calculs temporaires, la version définitive est prévue pour septembre 2020. S'ils sont confirmés, la France comptait 9,1 millions de personnes, soit 14,3 % de la population, qui vivaient en dessous du seuil de pauvreté (60 % du revenu médian) en 2018. Environ 250 000 personnes de plus qu'en 2017. La hausse des revenus financiers et la baisse des prestations sociales augmentent ou diminuent le revenu médian et donc le seuil de pauvreté. Le renoncement à taxer les hauts revenus et la pression sur les prestas sociales cristallisent cette situation en annihilant les effets d'un système de redistribution.

    La hausse des revenus financiers + le PFU + la baisse de l'allocation logement + la baisse de la taxe d'habitation + la bascule cotisations sociales dont le chômage vers la CSG + la hausse des taxes pétrolières et du tabac contribueraient à la hausse du taux de pauvreté. La réduction des loyers sociaux et la revalorisation de certaines prestations sociales (allocation adulte handicapé, solidarité vieillesse) contribueraient à la baisse du taux de pauvreté. La transformation de l'ISF en IFI, qui accentue « légèrement » les inégalités n'est pas mesurée dans ces calculs, pas plus que le chèque énergie qui réduit tout aussi « légèrement » les inégalités.

    Il y a huit ans, le milliardaire américain Warren Buffett critiquait la politique fiscale de son pays en affirmant payer moins d’impôts, en proportion, que sa secrétaire. Sa déclaration, un peu exagérée à l’époque, serait aujourd’hui parfaitement vérifiable, selon le « New York Times » (6/10).

    En 2018, pour la première fois depuis que de telles statistiques existent, les 400 Américains les plus riches ont eu droit à un taux d’imposition sur leurs revenus inférieur à celui des 10 % les plus pauvres de la population. Une conséquence de cadeaux fiscaux successifs dont les derniers en date, offerts par Donald Trump, ont fini de marquer la tendance : taxés à 70 % sur leurs revenus en 1950, les plus privilégiés n’étaient plus prélevés qu'à hauteur de 23 % en 2018…

    A ce régime, c’est à se demander pourquoi les 400 plus riches ne sont pas plus nombreux !

    Dans le Canard enchaîné du 9 octobre 2019.

    Sun Oct 27 21:09:43 2019 - permalink -
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