Article "piqûre de rappel" inutilement alarmiste. Cet été 2019, 4 réacteurs nucléaires ont du être arrêtés et 7 ralentis à cause de la température extérieure. 4 réacteurs été concernés l'année dernière et 17 lors de la canicule de 2003… L'IRSM, qui assure le suivi technique des centrales aux côtés de l'ASN émet des doutes sur la résistance aux températures actuelles des matériels de sécurité des centrales. Il y a des conflits d'usage de l'eau : l'irrigation et le nucléaire assèchent les fleuves en même temps en plein été. Le nucléaire, comme d'autres industries, rejette des saloperies dans la flotte.
Circulez, y a rien a voir. La com’ d’EDF nous l’a asséné tout l’été : la canicule ne pose aucun problème aux centrales nucléaires, tout serait prévu… Pas si sûr, selon des enquêtes que nous avons consultées.
En cette fin d’été, la France est devenue toute jaune et les cours d’eaux sont quasi à sec. Un phénomène devenu récurrent d’année en année, accéléré par la canicule. Or qui dit manque d’eau, dit problème pour les centrales nucléaires bordant les fleuves. Les centrales, rappelons-le, ne sont rien d’autre que de grosses bouilloires, les réactions nucléaires chauffant l’eau à 330° C. La vapeur actionne les turbines et ça donne de l’électricité ! Or si l’eau ainsi chauffée reste (la plupart du temps !) en circuit fermé, les centrales utilisent aussi un circuit d’eau de refroidissement pour condenser cette vapeur. De l’eau forcément fraîche, qu’elles pompent directement dans les fleuves, entre 2 et 3 m3 par seconde. L’eau prélevée ainsi sera ensuite rejetée, mais pas sans dommages : sa température est plus élevée, ce qui n’est pas sans conséquences sur l’écosystème fluvial, et surtout, pas garantie à 100 % sans produits chimiques ou radioactifs…
Jusqu'ici tout va bien (selon EDF)
Du coup, si le débit est insuffisant (pas assez d’eau pour refroidir sans vider le fleuve !) ou l’eau du fleuve trop chaude, la centrale est logiquement contrainte de s’arrêter. La centrale de Golfech sur la Garonne et le réacteur 4 de la centrale de Tricastin sur le Rhône ont dû s’arrêter lors de la canicule de fin juillet. Sept réacteurs (Saint-Alban 1 et 2, Tricastin 3, Dampierre 5 et 4, Belleville 1, Blayais 3) ont connu une réduction de puissance. Mais pas de souci à en croire EDF qui indique à Siné Mensuel : « Ces adaptations n’ont rien d’exceptionnel en cette période de l’année et n’ont aucun impact sur la continuité d’approvisionnement en électricité. » Ajoutant que « depuis 2008, EDF a développé un programme de modifications dit “grands chauds” sur ses installations afin de leur permettre de faire face aux conséquences du changement climatique, notamment l’augmentation de la fréquence des épisodes de canicule, de sécheresse et de tempêtes. » Tout va bien, alors !
Vite dit. Car question mise en place du programme « grands chauds », EDF s’avance un peu. Dans un avis du 6 février 2019, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) fait le bilan des études d’EDF prouvant que les « matériels de sûreté » tenaient bien le choc en cas de fortes températures. Il en ressort que les experts ne valident pas les calculs d’EDF concernant la température maximale que peuvent encaisser les dits matériels, en particulier ceux installés tout exprès pour faire face aux catastrophes ! Pour Charlotte Mijeon, porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire : « Certains équipements, comme les diesels de secours (utilisés en cas de pépin, une obligation post-Fukushima, NDLR) qui, soit dit en passant, ne sont pas dans un état génial, doivent être aussi refroidis par l’air extérieur. Après les canicules de 2005 et 2006, EDF a mis des matériels en plus pour les refroidir, mais visiblement ça ne suffit pas, et ça inquiète l’IRSN… »
Poissons cuits à l'étouffée
Plus embêtant, la dépendance des centrales à un débit minimum pose des conflits d’usage. Ainsi l’année dernière, le lac de Vassivière dans les Alpes a été quasiment vidé pour maintenir un débit minimum dans le Rhône. Empêchant les gens de se baigner… À force de tirer sur la limite de débit des cours d’eau, les centrales nucléaires pourrissent aussi la vie des poissons. Car, on l’a dit, qui dit centrales nucléaires dit rejet (même faible) de matières radioactives et chimiques dans les fleuves. C’est ainsi qu’on retrouve le fameux tritium dans la Loire qui a fait paniquer tout le monde cet été… Or comme l’explique la porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire : « Lorsque la température augmente et que le débit des cours d’eau diminue, l’impact de ces nuisances s’accroît. Les milieux aquatiques, déjà fragilisés, sont mis à rude épreuve par la moindre dilution des polluants et par les rejets d’eau chaude. Ceux-ci agissent comme une barrière qui réduit considérablement les chances de survie des poissons grands migrateurs comme les saumons et truites des mers. » Qui veut manger une petite truite bouillie assaisonnée au tritium ?
Dans le Siné Mensuel de septembre 2019.