En gros, Macron va la jouer "c'pas ma faute, c'est celle du méchant Sénat pas gentil" et, si ça ne marche pas, la réforme consistera uniquement à ajouter une dose de proportionnelle aux élections législatives. Ce dernier point permettra l'entrée de petits partis au Parlement (RN, NPA, DLF, Les Patriotes, etc., bonjour), de redécouper les circonscriptions électorales afin de s'offrir un matelas de voix pour la présidentielle de 2022, et de rendre encore moins claires les règles de l'élection législative afin que le citoyen soit encore plus paumé. Tout bénéf', quoi (je suis ironique).
Sur les autres sujets de cette révision constitutionnelle, je reprends ce que j'ai déjà écrit :
La patate chaude de l'échec
Juste après la présentation du nouveau projet de révision constitutionnelle, le 28 août en Conseil, le chef de l’Etat a donné à ses ministres quelques éléments de langage pour défendre la réforme.
« Dans vos interventions médiatiques, leur a-t-il dit, mettez l’accent sur la proportionnelle, sur la réduction du nombre de parlementaires et sur la réforme du Cese, parce qu’elle répond à un besoin de représentation des citoyens et de la société. »
Macron voulait surtout préparer ses ministres à la probable offensive de Larcher contre le projet.
« En absence d’accord, a-t-il insisté, il faudra souligner la responsabilité du Sénat, rappeler que nous avons fait un certain nombre d’avancées dans sa direction et dans ce qui est ressorti du grand débat, ce qui têmoignait de notre volonté de consensus. C’est la majorité sénatoriale qui a choisi d’empêcher la réforme. »
S’il n’y croit pas lui-même…
Une fleur à Bayrou
En tout cas, Macron planche déjà sur la parade. Constatant que le Sénat bloque toute révision constitutionnelle, le gouvernement dénoncera le conservatisme indécrottable de la Haute Assemblée et proposera une seule réforme : un changement de scrutin pour les législatives qui relève de la loi ordinaire et de la seule Assemblée nationale, où les macronistes ont une large majorité.
Il s’agirait d’introduire une forte dose de proportionnelle sans changer le nombre de députés : 577. Le projet initial prévoit 15 % de députés élus au scrutin de liste, et il pourrait atteindre 20 % (soit 115 députés) pour complaire à l’ami François Bayrou. Intérêt supplémentaire de l’opération : procéder à un redécoupage aux petits oignons des circonscriptions.
Mais il y a urgence : il faudrait adopter ledit projet rapidement, afin de procéder à un redécoupage avant juin 2021 , soit un an avant le scrutin.
Bah ! Macron ne pourra pas refuser ça à Bayrou… Surtout après lui avoir fait avaler la couleuvre Goulard.
Dans le Canard enchaîné du 4 septembre 2019.