Résumé : circuit de distribution de la presse et coûts associés :
le Ravi revient chez les marchands de journaux même si chaque exemplaire vendu coûte un peu d'argent. Un luxe - peut-être éphémère - que seuls vos abonnements permettent !
Le chiffre est aussi imparable que déprimant. Chaque exemplaire du Ravi vendu 4,40 euros dans le réseau presse ne nous rapporte rien. Pire : en 2019, il nous a coûté 70 centimes. La diffusion du mensuel régional pas pareil chez les marchands de journaux se fait donc totalement à perte.
À l'inverse, nous encaissons sans intermédiaire la totalité du montant des abonnements, 44 euros labo annuel. Pour ce prix, de votre côté, vous payez 4 euros chaque exemplaire livré chez vous onze fois dans l'année et vous pouvez lire sur leravi.org, durant douze mois, nos nombreuses enquêtes et reportages publiés chaque semaine en ligne. Enfonçons le clou : si vous voulez financer notre indépendance tout en économisant quelques euros, souscrivez un abonnement. Et si vous ne voulez lire qu'un numéro ou même un seul article, c'est aussi, désormais, possible sur leravi.org, pour un euro le premier mois, 4,40 les suivants.
Bloqués dans les gares
Mais revenons aux kiosques. Comment arrive-t-on à pareille contre-performance, à devoir payer pour être lu ? Afin de se diffuser chez les marchands de journaux, il faut passer par une coopérative, soit Presstalis, soit MLP (Messageries lyonnaises de presse). La première, en redressement judiciaire, devient France Messagerie. le Ravi est distribué par les MLP.Pour un petit titre comme le nôtre, distribué uniquement dans les six départements de Provence-Alpes-Côte d'Azur, arriver à être visible est une gageure. Seuls les éditeurs qui ont la puissance financière, souvent parce qu'ils vivent de la publicité, d'envoyer de nombreux exemplaires qui ne seront pas vendus parviennent à ne pas être « noyés » au milieu des nombreuses publications.
le Ravi pour vendre un exemplaire en kiosque doit en imprimer quatre. Trois seront donc détruits sans avoir jamais été feuilletés. En 2019, le coût par an pour acheminer de l'imprimerie jusqu'aux MLP 20 500 exemplaires ensuite diffusés en kiosque s'est élevé à 2500 euros. Ce n'est pas tout. Les MLP prélèvent sur chaque exemplaire vendu un pourcentage pour se rémunérer, beaucoup, ainsi que le vendeur de journaux, un peu. Le pourcentage dépend du volume des ventes et du ratio entre nombre d'exemplaires vendus et nombre d'exemplaires déposés. Pour nous, toujours en 2019, la commission prélevée par les MLP s'est élevée à 72 % du prix du numéro. Disons-le autrement : nous n'encaissons que 28 % du prix de vente. Il faut soustraire également des coûts liés à la fabrication des exemplaires destinés aux kiosques qui restent heureusement marginaux.
Mais ce n'est toujours pas tout ! Nous devons aussi passer par un prestataire qui joue les intermédiaires avec les MLP pour faire les « réglages », c'est-à-dire déterminer à quels endroits et dans quelles quantités sont envoyés les exemplaires. La société qui travaille pour le Ravi le fait avec sérieux. Mais il y a un écart entre la théorie et la pratique.
Nous essayons, par exemple, depuis plusieurs années, d'être présent systématiquement dans tous les points Relay des gares. Notre prestataire donne ainsi l'ordre d'y diffuser des exemplaires, notamment à Toulon et à Nice. MLP s'exécute et les exemplaires ne sont jamais sortis des cartons dans les gares de Toulon et de Nice, malgré nos protestations répétées. le Ravi est ainsi non exposé dans de nombreux lieux où il est censé être vendu. Coût de la prestation par an : 3300 euros. Résumé sous forme de rappel : une fois soustraits les commissions, les prestations, les frais de diffusion et d'impression, pour chaque exemplaire vendu 4,40 euros nous perdons 70 centimes.
Rencontres impromptues
Lorsque toute la France à été confinée en mars, par précaution nous sommes sortis du réseau kiosques et n'avons imprimé, dès mai, le journal que pour les abonnés. Aux effets de la crise sanitaire du Covid se sont rajoutés ceux du dépôt de bilan de Presstaliss. Car, en Paca, MLP passe par la Sad (Société d'agence et de diffusion), filiale régionale de Presstaliss liquidée. Vous suivez toujours ? Concrètement, suite à un légitime mouvement social, la distribution de la presse a été, notamment à Marseille et dans le Var, très fortement entravée. Déstabilisant un peu plus un système à bout de souffle et, en bout de chaîne, des vendeurs de journaux paupérisés. Système dont la réforme, à l'issue incertaine, soumet de plus en plus la distribution de la presse aux logiques du marché, tournant le dos aux idéaux du conseil national de la Résistance cherchant à garantir le pluralisme de la presse. Avec, partout, mois après mois, des points de vente qui baissent le rideau.Conclusion ? Elle est paradoxale. Car nous voilà pourtant, avec ce numéro daté juillet-août, de retour chez les marchands de journaux ! Pourquoi ne pas les quitter ? La question est récurrente depuis des années dans les discussions de la rédaction ét de La Tchatche, l'association qui édite le Ravi. Une fois de plus, nous avons fait le choix de ne pas nous priver des rencontres impromptues avec des nouveaux lecteurs dans les kiosques, maisons de la presse et autres marchands de tabac. Un journal est fait pour être lu. Partout. Tout le temps. Coûte que coûte. Y renoncer serait une perte d'une autre nature que financière.
Mais nous ne sommes pas sûrs de pouvoir vous offrir indéfiniment ce qui est devenu un luxe. Tout va dépendre de notre capacité à financer notre indépendance et en particulier de la courbe de nos abonnements. Ils sont en hausse depuis un an. Et il faut impérativement, grâce à vous, que cette hausse se poursuive.
Article publié dans le numéro 186 (juillet-août 2020) du Ravi, journal satirique en PACA.
De Charles V au grand Charles (de Gaulle), de Mazarin à Chirac, de Barre à Guéant, les gouvernants de tout bord ont longtemps respecté cette tradition française consistant à profiter des discrètes liquidités de l'État.
1358-1939 - De la cassette royale à la cagnotte républicaine
La Ve République n'a décidément rien inventé. Six cents ans très exactement avant l'arrivée du grand Charles (de Gaulle) à l'Elysée, c'est un autre Charles qui officialise la pratique des fonds secrets, échappant à tout contrôle, En 1358, le roi de France, Charles V, obtient des états généraux (assemblée réunissant la noblesse, le clergé et le tiers état) le droit d'utiliser un cinquième du produit des impôts sans avoir à rendre de comptes à quiconque. Le pli est pris.
Trois siècles plus tard, le cardinal Mazarin applique cette règle à la lettre, pour son plus grand profit personnel. Premier ministre de la Régence puis du jeune Louis XIV, il pioche sans vergogne dans la caisse : sur un budget de 140 millions de livres tournois, il prélève la bagatelle de 28 millions, qu'il claque selon son bon plaisir.
Les révolutionnaires de 1789 - et même ceux de 1798, qui ne jurent pourtant que par la démocratie directe - ne trouvent pas grand-chose à redire au système : la République, en guerre contre l'Europe des rois, a grand besoin de fonds secrets. Napoléon renforce encore l'opacité : pour éviter de laisser des traces, on ne prélève plus l'argent sur le budget, mais il est versé - hors de vue d'un Parlement pourtant à la botte du régime - au ministère de l'Intérieur par la Ferme des jeux (une sorte de Française des jeux avant l'heure). Curieusement, il faut attendre le retour de la royauté pour qu'une - très timide - évolution ait lieu. En 1818, trois ans après la restauration de Louis XVIII sur le trône, une rubrique « dépenses secrètes » apparaît dans le budget du ministère de l'Intérieur soumis aux députés. Affolé par sa propre audace, le gouvernement la fait disparaître presto l'année suivante. Elle est de retour en 1821, mais elle inclut désormais des dépenses caritatives, pour que les curieux ne s'y retrouvent pas.
À la Chambre, les (rares) opposants montent quand même au créneau. Ils accusent - déjà ! - le ministère de l'Intérieur de se servir des fonds secrets pour créer « une caisse des élections » et acheter la presse. Les années suivantes sont marquées par le retour de la loi du silence. En 1827 - sous le règne de Charles X, le roi ultra -, le montant précis des dépenses secrètes n'est même plus indiqué, malgré les protestations véhémentes de quelques députés libéraux.
Il faut attendre Louis-Philippe et sa royauté parlementaire pour que le contrôle des Assemblées reprenne un peu de vigueur. Les fonds secrets sont alors débattus chaque année, en même temps que le budget. Mieux : pour obtenir une rallonge en cours d'année, le gouvernement est obligé de passer par le vote d'une loi spécifique (1). La monarchie de Juillet s'accommodera fort bien de cette procédure un brin contraignante : quand le régime tombe, en février 1848, l'existence des fonds secrets n'est plus guère contestée, y compris par les républicains, qui rêvent de disposer d'une cagnotte de ce genre le jour où ils seront au pouvoir.
Autre clarification : sous Louis-Philippe, le budget commence à faire la différence entre les fonds secrets mis à la disposition du gouvernement pour ses « bonnes œuvres » et ceux qui sont destinés aux espions de l'époque. Ainsi, les ministères des Affaires étrangères et de la Guerre disposent, comme l'Intérieur, de leur propre cassette pour leurs actions clandestines.
Il n'est pourtant toujours pas question de contrôler l'usage qui est fait de ce magot. On vote les crédits, mais seul le roi peut en contrôler l'utilisation ! C'est l'unique dépense qui échappe à tout contrôle parlementaire…
La Seconde République voudra en finir avec cette exception. En juillet 1848, l'Assemblée nationale constituante met en place une commission spéciale chargée de contrôler les dépenses de la police secrète. Cinq mois plus tard, l'arrivée au pouvoir de Louis-Napoléon Bonaparte (futur Napoléon II) sonne la fin de la récré et la disparition de la commission…
En septembre 1870, les républicains du gouvernement provisoire s'empressent de la rétablir. Pas pour longtemps : Adolphe Thiers, ancien ministre de Louis-Philippe qui prend les rênes du gouvernement en février 1871 et écrasera la Commune de Paris trois mois plus tard, supprime de nouveau la commission de contrôle. Elle ne reverra le jour qu'en 1946, dans une version très édulcorée (lire pages suivantes).
La III République se contente, elle, de copier les manières du régime royal : le montant des fonds secrets est discuté une fois par an au Parlement, mais, comme toujours, personne ne doit savoir à quoi a servi ce bel argent ! Le ministre de l'Intérieur se borne à présenter un état global des dépenses au président de la République, qui le paraphe sans trop poser de questions.
La caisse secrète de l'armée est soumise à un régime spécial. Aucun « pékin » (civil) n’a le droit d'y fourrer son nez ! Le quitus de la comptabilité est donné uniquement par l'un des deux sous-chefs du grand état-major. Il faut l'affaire Dreyfus pour que la Cour de cassation découvre incidemment que la Section de statistique (une appellation qui camoufle le service du renseignement militaire) s'est servie d'une partie de cette tirelire pour recueillir des infos sur les hommes politiques et la presse (2)…
À la même époque, le scandale de Panama lance une autre polémique sur les fonds secrets. Accusé, comme de nombreux politiques, d'être un « chéquard », c'est-à-dire d’avoir palpé de l'argent pour favoriser le vote d'une loi facilitant la récolte de fonds pour le percement du canal de Panama, l'ancien président du Conseil (Premier ministre) Maurice Rouvier se défend comme un beau diable. S'il a pris l’oseille, c'était, jure-t-il, pour combattre le boulangisme (du nom du général Georges Boulanger, qui envisagea un coup d'Etat au tournant des années 1880-1890). Et Rouvier d'insister : « Si j'ai dû accepter le chèque, déclare-t-il en substance, c'est que le montant des fonds secrets était insuffisant. » Grandiose et imparable argument ?
Vingt ans plus tard, avec la Grande guerre, *plus personne ne remet en question l'utilité des fonds secrets et ne réclame de justificatifs… si ce n'est pour régler des comptes politiques. En 1917, Clemenceau sonne la charge contre le ministre de l'Intérieur Louis Malvy, accusé d'avoir financé en douce « Le Bonnet rouge », un journal d'extrême gauche - plus ou moins converti, en 1914, à l'Union sacrée - soupçonné d'être à la solde des « boches ».
Sous la IIIe République, les fonds secrets sont surtout utilisés pour garnir les discrètes enveloppes remises aux journalistes et les liasses de billets destinés à soutenir les titres amis ou à rendre plus aimables ceux de l'opposition. Le Quai d'Orsay et Matignon sont alors réputés pour leur grande générosité. En témoigne l'histoire du « Quotidien », fondé en 1923, qui se vante d'être « un journal honnête pour d'honnêtes gens ». À l’origine organe officieux du Cartel des gauches, financé par le roi du cognac Jean Hennessy, il finira par être arrosé par tous les gouvernements successifs.
Les organisations parapolitiques passent également à la caisse. André Tardieu - un député radical de droite qui sera ministre à plusieurs reprises entre 1929 et 1932 - se vantera d'avoir financé sur les fonds secrets les ultra-conservatrices Croix-de-Feu du colonel de La Rocque. L'affaire débouchera, en 1937, sur un procès en diffamation qui se terminera en eau de boudin. Comme souvent, dès qu'il est question de secrets et d'argent.
(1) « Les fonds secrets ou la méfiance légitime », par Pierre Karila-Cohen, « Revue historique », 2005.
(2) « La naissance du renseignement étatique en France au XIXe siècle, entre bureaucratie et politique », par Sébastien Laurent, « Revue d'histoire du XIXe siècle », 2007.
1946-1958 - Les arrangements très “spéciaux” de la IVe République
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les anciens résistants qui fondent la IVe République ne songent pas un instant à supprimer ou à réduire l'usage des fonds secrets. La clandestinité leur a montré l'importance d'une pareille cagnotte. Ils se contentent de lui donner un nouveau cadre juridique, d'apparence plus stricte et plus démocratique, qui restera en vigueur durant cinquante-cinq ans mais ne sera jamais vraiment appliqué… Le 27 avril 1946, trois mois après le départ du général de Gaulle de la présidence du gouvernement provisoire, son successeur, le socialiste Félix Gouin, promulgue une loi de finances rectificative dont l'article 42 traite longuement des fonds secrets. La première innovation est purement cosmétique : exit l'adjectif « secrets », on ne parle plus que de fonds speciaux. Surtout, ces sommes sont désormais centralisées entre les mains du président du Conseil (l'actuel Premier ministre).
Celui-ci est chargé la répartir les liasses. Les services de renseignement se taillent la part du lion avec les « fonds spéciaux à destination particulière », comptabilisés au sous-chapitre 20-01 de la ligne budgétaire 37-9 1. Le solde, dont l'usage est laissé à la libre-disposition de Matignon, est catalogué dans un autre sous-chapitre (le 10-01), sombrement intitulé « Fonds spéciaux du gouvernement ». En pratique, cette dernière portion représentera, bon an mal an, 10 % du total des crédits secrets - pardon, spéciaux !
La loi de 1946 stipule [ sic (une loi dispose, elle ne stipule pas) ] par ailleurs que les ministres sont tenus de rendre des comptes précis au patron du ouvernement, qui reste le seul responsable de l'emploi des fonds spéciaux. Le texte prévoit même qu'un décret de quitus constate leur bonne utilisation, ministère par ministère, une fois par an et chaque fois qu'un titulaire quitte ses fonctions. Ces comptes sont tenus d'indiquer « explicitement » les « provisions reçues », les « sommes dépensées » et les « reliquats disponibles », ceux-ci devant être reversés au budget de l'État.
Il n'en sera rien. Ni Félix Gouin ni ses successeurs ne prendront de décret de quitus, aucun compte détaillé ne sera jamais rendu, aucun reliquat ne sera reversé dans les caisses publiques et le Parlement devra se contenter de voter à l'aveugle les sommes réclamées par le gouvernement. Seuls les paragraphes de la loi qui permettent au chef du gouvernement de recevoir l'argent seront appliqués.
Le 19 novembre 1947, le socialiste Paul Ramadier signe un décret. Cette fois, il s'agit de mieux encadrer la partie des fonds secrets réservée aux barbouzes pour la « sécurité extérieure ». Ce texte fait suite à l'affaire du colonel Passy, du nom de l'ancien chef des services de renseignement de la France libre accusé - trop vite - par les communistes d'avoir détourné une partie de la caisse de son service. Le décret Ramadier prévoit de créer une commission spéciale de vérification, présidée par un président de chambre à la Cour des comptes, qui remettra chaque année à Matignon un rapport sur les conditions d'emploi des crédits. Las ! cette commission est un trompe-l'œil : elle ne dispose d'aucune compétence juridictionnelle, n'a pas le droit de se prononcer sur la véracité des factures présentées et doit se borner à constater que les additions tombent juste… Très vite, l'utilisation des fonds spéciaux - du moins la part laissée au bon plaisir du gouvernement - redevient un sujet de polémique. En 1950, le Parti communiste accuse le gouvernement (de droite) de Réné Pleven d'avoir financé par ce biais le mouvement proaméricain Paix et Libertés. La même année, le radical Marc Rucart fait un sacré foin au Conseil de la République (Sénat). Il accuse le ministre de l'Intérieur, le radical-socialiste Henri Queuille, d'avoir gonflé en douce l'enveloppe des fonds spéciaux en détournant une partie des 160 millions de francs en liquide dévolus, chaque année, à la police pour ses « frais d'enquête et de surveillance ». Cet argent n'est - en principe - pas destiné à faire de la politique mais à rémunérer les indics et à offrir des primes aux poulets les plus méritants. Il vaudra, cinquante années plus tard, quelques ennuis à l'ancien ministre de l'Intérieur de Sarkozy Claude Guéant (lire plus loin).
L'affaire Quenille sera vite enterrée et le ministère de l'Intérieur pourra continuer de jongler avec ses « frais d'enquête » durant plus d'un demi-siècle…
1958-1969 - À fond les caisses
En revenant au pouvoir, en mai 1958, de Gaulle s'empresse de verrouiller la cassette des fonds secrets. Il n'a pas oublié qu'il se serait retrouvé sans un sou vaillant, le 17 juin 1940, au moment de partir pour l'Angleterre, si un homme providentiel ne l'avait rejoint devant l'hôtel bordelais où il venait de passer la nuit. Envoyé par Paul Reynaud - qui a quitté le veille au soir la tête du gouvernement, pour être remplacé par Pétain -, le messager était chargé de remettre au futur chef de la France libre une enveloppe destinée à couvrir ses premiers frais. À l'intérieur : 100 000 francs en liquide (environ 46 000 euros), prélevés dans les coffres de Matignon…
Première décision du premier président de la Ve République : les « fonds spéciaux » (nouveau nom des fonds secrets depuis 1946) sont considérablement augmentés. La part réservée aux barbouzes (les « fonds spéciaux à destination particulière ») est multipliée par deux. Celle laissée à la disposition de Matignon (les « fonds spéciaux du gouvernement ») grimpe encore plus : à la fin de la IVe République, cette enveloppe tournait aux alentours de 100 millions d'anciens francs par an ; en 1960, c'est 7,6 millions… de nouveaux francs, soit 760 millions anciens ! En 1963, le magot grimpe même jusqu'à 890 millions de centimes…
À l'Assemblée, dominée par les partisans du retour du Général, personne n'ose s'insurger contre cette envolée. Au Sénat, quelques élus grognent. Mais le gouvernement leur oppose un silence hermétique. En juillet 1961, lors d’un débat budgétaire, le sénateur socialiste Antoine Courrière revient à la charge à plusieurs reprises et propose de ratiboiser les fonds spéciaux de 5 millions de nouveaux francs. Réponse exaspérée et lapidaire du ministre des Finances, Wilfrid Baumgartner : « Dans ce domaine, il existait une sorte de tradition, qui était de ne pas trop insister. Et sans demander à personne de ne pas insister… »
La procédure de retrait du fric destiné aux bonnes œuvres du pouvoir est alors toujours la même - elle le restera peu ou prou jusqu'à la suppression des fonds spéciaux du gouvernement, en 2002. Chaque mois, une équipe de Matignon se rend à la paierie générale du Trésor munie de grandes sacoches destinées à accueillir un douzième des crédits annuels. L'argent lui est remis en billets neufs de 500 francs qui viennent tout droit de la Banque de France, laquelle en a relevé lés numéros au préalable.
Sacrée entorse à la loi de 1946 sur les fonds spéciaux, le pouvoir gaulliste ne laisse plus le Premier ministre gérer le magot. L'usage des biftons est désormais supervisé directement par le Général et Jacques Foccart, son homme de l'ombre, dont les fonctions effectives sont bien plus larges que celles de secrétaire général des Affaires africaines et malgaches.
Les membres du gouvernement n'ont droit qu'à des rogatons. Ministres et secrétaires d'Etat touchent des liasses de billets, plus ou moins épaisses en fonction de leur rang, pour arrondir leurs fins de mois, distribuer des primes aux membres de leur cabinet et cajoler quelques relais électoraux. Le Premier ministre est mieux traité. Assez bien, en tout cas, pour que Georges Pompidou - qui a succédé à Michel Debré, en 1962 - puisse se servir de sa part pour acheter quelques toiles de maître ! Recu à dîner par le locataire de Matignon en novembre 1963, le journaliste Claude Mauriac raconte, dans son journal (paru en 1975), avoir alors remarqué sur les murs « un Ernst, un Fautrier et un remarquable de Staël ». Et Mauriac de poursuivre : « Georges me dit (…) : "Je les ai achetés avec les fonds secrets, employant ainsi l'argent réservé d'habitude à arroser les partis." » Pendant que Pompon finance les artistes et se constitue une jolie collection personnelle, le grand Charles s'occupe des choses sérieuses. Une partie des fonds spéciaux vient compléter le budget de fonctionnement de la Présidence. Mais le Général prend surtout soin de l'intendance des troupes gaullistes. Un soin si grand qu'il signe parfois lui-même les ordres de versement en faveur de tel ou tel. L'Union pour la nouvelle République (UNR, le parti gaulliste) se voit, bien entendu, dotée de belles valises de billets. Tout comme d'autres succursales du pouvoir, tel le Service d'action civique** [ NDLR : en apprendre plus sur le SAC ], qui rassemble les gros bras (et même quelques truands) chargés des basses œuvres gaullistes.
Mieux : à chaque élection, municipale ou législative, de Gaulle et Foccart établissent personnellement la répartition des enveloppes entre les candidats UNR. Pour les municipales de mars 1965, cha- cun d'eux a droit à 10 000 francs par tour de scrutin, soit l'équivalent de 15 000 euros [ sic, le Canard se trompe probablement ]. Mais ce fric connaît parfois une destinée étonnante, comme l'a raconté Jacques Foccart dans ses Mémoires (Fayard). Au lendemain des municipales, le Général examine ainsi les sommes versées aux candidats de la majorité. Parmi ces derniers figure son propre beau-frère, Jacques Vendroux, qui a été réélu - à la surprise générale - dès le premier tour à la mairie de Calais. Vendroux doit donc rendre les billets qui lui ont été remis en prévision du second tour de scrutin. Mais le Général lâche : « Laissez cet argent à mon beau-frère. Il en profitera pour faire la bamboula !» Nul ne sait si l'intéressé a vraiment « fait la bamboula », mais de Gaulle avait le sens de la famille.
L'élection présidentielle de décembre 1965 vaut bien un traitement spécial : pour assurer son succès, le pouvoir débloque environ 14 millions de francs en liquide. Ce montant, astronomique pour l'époque, représente à lui seul le double des fonds spéciaux dont disposaient l'Elysée et Matignon en 1963 ou en 1964.
Flambée de cash, aussi, à l'approche des scrutins référendaires. Pour celui d'avril 1969 (qui conduira à la démission du Général), le pouvoir ne se contente pas de faire main basse sur l'argent disponible. Affolé par les sondages, qui ne sont pas bons, il siphonne en douce 19 millions de plus dans les caisses de l'Etat, Un hold-up réalisé grâce à deux décrets secrets, qui ne sont pas publiés au « Journal officiel », signés les 2 et 22 avril 1969. Par un simple jeu d'écriture, les crédits sont prélevés sur le chapitre budgétaire 37-95, consacré aux « dépenses accidentelles et imprévisibles ». Une réserve normalement prévue pour faire face aux situations de crise, comme les catastrophes naturelles. Pas aux menaces de raclée électorale. Le vote a lieu le 27 avril. Le lendemain, le Général quitte l'Elysée. Le même jour, le chef de l'Etat par intérim, le président du Sénat, Alain Poher, prend ses fonctions au Palais. Dans les armoires blindées, il ne trouvera pas un rond. Que des trombones et des élastiques. Partir sans laisser d'espèces…
1969-1995 - Du mou dans les liasses
Est-ce un effet de l'affaire Markovic, ce dossier délétère monté, à l'automne 1968, par des barbouzes gaullistes pour tenter de discréditer Georges Pompidou et l'empêcher de briguer la succession du Général ? Une fois élu, en juin 1969, le nouveau président n'augmente pas les fonds spéciaux. Il les diminue même un peu. Les vieilles habitudes reviennent pourtant très vite, et le contenu de la cassette mise à la disposition du Sdece (actuelle DGSE) et du GIC (les grandes oreilles, chargée [ sic ] des « écoutes administratives ») finit par repartir à la hausse. En 1974, son montant (article 20-01) atteint 103 millions, contre 63 millions en 1969. En revanche, la hausse est plus faible pour l'enveloppe laissée à la discrétion du gouvernement (article 10-01). Celle-ci passe de 9,2 millions en 1969 à 13,5 millions en 1973 (année des élections législatives), avant de baisser un peu l'année suivante.
À peu près au même moment, la gestion des fonds spéciaux dévolus aux services de renseignement devient de plus en plus opaque. Une discrète réforme scinde en deux l'article 20-01 du budget de Matignon : le pactole est désormais réparti entre le sous-article 20-10, réservé à la DGSE, et le 20-20, qui correspond à d'obscures « dépenses diverses ». Non sans mal, les parlementaires finiront par découvrir que les grandes oreilles comptent parmi les bénéficiaires de ces « dépenses diverses »…
À la mort de Pompidou, son successeur ouvre un peu plus les robinets. Elu en mai 1974, Valéry Giscard d'Estaing fait voter, dès juillet, une loi de finances rectificative qui donne un coup de pouce de 10 % aux fonds spéciaux : leur total grimpe à 130 millions, dont une quinzaine pour la part gouvernementale. Seul vrai changement : le partage du magot est rééquilibré entre l'Elysée et Matignon. Les Premiers ministres successifs de VGE, Jacques Chirac puis Raymond Barre, en profitent largement (lire pages suivantes).
En mai 1981, quand les socialistes arrivent au pouvoir, ils trouvent à leur tour tiroirs et coffres vides. En cherchant bien, le directeur de cabinet de Mitterrand, André Rousselet, finit par découvrir « un coin déchiré de billet de 500 francs » oublié dans un coffre. Seule exception : le ministre de l'Intérieur de Giscard, Christian Bonnet, a la délicatesse de laisser à son successeur 1 million de francs en coupures de 500.
Les barons socialistes, qui avaient déposé en 1979 un amendement pour supprimer les fonds spéciaux, s'en acclimatent fort bien. La loi de finances de 1982 augmente de 20 % la part gouvernementale, qui passe à 81 millions de francs - l'inflation, il est vrai, est de 14 % par an. Les trésoriers du PS et, dans une moindre mesure, ceux du PC ne se plaindront pas de ce coup de pouce providentiel. Comme sous les précédents régimes, les ministres sont supposés utiliser cette manne pour améliorer les fins de mois des membres de leur cabinet et de leur petit personnel, taillables et corvéables à merci. Mais certains ne se montrent guère partageux. Un socialiste de premier plan prend ainsi l'habitude de garder pour lui seul la part des fonds dévolue, en principe, à toute son équipe.
Mais les temps changent. Les fonctionnaires et les juges se font plus sourcilleux et sont moins impressionnés par les coups de menton des représentants du pouvoir. Vainqueur des législatives de 1986, Chirac s'installe à Matignon et pense utiliser à son tour les vieilles ficelles gaullistes. Comme le faisait Mongénéral, il veut prendre, en juillet 1987, un décret secret, qui ne sera pas publié au « Journal officiel », pour augmenter de 8 millions sa part de fonds spéciaux. Mais le contrôleur financier chipote. Il refuse tout d'abord d'y apposer sa signature, au motif que ce genre d'opération doit passer par le Parlement. Il finira par céder quelques jours plus tard… Le fisc fait, lui aussi, la fine bouche. Il était de tradition, aux Impôts, d'arrêter les investigations dès qu'un contribuable sortait le joker « fonds spéciaux ». Désormais, les fonctionnaires ont le toupet de demander des explications ! Le publicitaire Gérard Colé, payé 1,5 million de francs, en billets de 500, pour les bons conseils qu'il a dispensés, entre 1988 et 1991, à François Mitterrand et à Michel Rocard, se verra notifier, un peu plus tard, un redressement fiscal de 4 millions, justifié par son incapacité à expliquer l’origine de son oseille. Et pour cause : toute la comptabilité des fonds spéciaux était détruite chaque année par les directeurs de cabinet du chef de l'Etat et du Premier ministre…
Les magistrats s'en mêlent également. Le 20 juillet 1995, le juge d'instruction Eric Halphen perquisitionne le siège du Parti républicain, proche de l’ex-Premier ministre Edouard Balladur. Il découvre dans un coffre 2,4 millions de francs en billets neufs de 500 francs. Tous ont été mis en circulation le même jour : le 22 mars 1995, soit deux mois avant la défaite de Balladur à la présidentielle et son départ de Matignon. Le trésorier du parti, Jean-Pierre Thomas, botte en touche : il explique que ces liasses viennent des fonds spéciaux et que la justice n'a donc pas à s'en mêler. Ce pare-feu paraît un peu faiblard, comme le souligne alors « Le Canard », car une loi de 1990 interdit à l'Etat de subventionner une formation politique (en dehors du mécanisme officiel de financement des partis). L'affaire va malgré tout s'arrêter net, car le parquet, aux ordres du gouvernement, refuse d’ouvrir la moindre enquête sur le sujet.
L’argument « fonds spéciaux » sera pourtant réutilisé un peu plus tard par le trésorier de la campagne d'Edouard Balladur pour tenter d'expliquer aux juges l'origine du flot de liquide dont disposait le candidat. Une affaire qui finira par s'évaporer, comme les autres, dans les méandres des procédures judiciaires.
D'après le Canard enchaîné du 27 janvier 2021 armé d'un PV de la police judiciaire, entre le 6 mars et le 14 avril 1995, dans les dernièrres semaines de la campagne présidentielle, les services du premier ministre (Balladur, donc) ont retiré 29,74 millions de francs des fonds secrets. Rien permet d'affirmer que c'est un cadeau d'adieu ou le financement de la campagne de Balladur comme le prétendent Nicolas Bazire (ancien directeur de campagne de Balla) et René Galy-Dejean, trésorier de la campagne (qui reconnaît 3 millions de francs). D'après L'année Canard 2021, Balla ne nierait pas que les 10,25 millions proviennent des fonds secrets mais, s'il le reconnaisait, il serait contraint de rembourser les 37 millions de francs des concours de l'État à sa campagne, or il aurait affirmé à l'un de ses proches « Je n'ai pas envie de ruiner mes enfants ». Sur ce sujet, voir aussi.
Le même numéro du Canard expose que, durant son séjour à Matignon (25 mois), Balladur aurait versé 37 millions de francs de fonds secrets au RPR. Le RPR déclare avoir financé la campagne de 95 de Balladur à hauteur de 10 millions. Gain : 27 millions de francs.
1995-2002 Le commencement de la fin
Quand il s'installe à l'Elysée, en mai 1995, Jacques Chirac a droit à une agréable surprise : juste avant de quitter ses fonctions, son prédécesseur, François Mitterrand, a fait remettre - contre recu - 49 millions de francs en liquide au directeur de cabinet du nouveau président. C'est le solde des fonds spéciaux inutilisés par l'ancien chef de l'Etat après ses quatorze ans de mandat [ NDLR : montant qu'il convient de relativiser avant de juger tonton ]. Chirac n'aura pas cette délicatesse : comme de Gaulle, Pompidou ou Giscard, il ne laisse pas un fifrelin en quittant la Présidence, en 2007. Et, pendant son mandat, le même Chirac jongle avec les billets. Côté cour, il décide de baisser de 27 millions de francs le budget des fonds secrets prévu pour 1996. Côté jardin, il les réaugmente, en cours d'année, de 70 autres millions, dont une bonne dizaine sont destinés aux « bonnes œuvres » du pouvoir.
Mais la machine se grippe vite. À la suite de sa dissolution ratée de 1997, le Président se retrouve contraint à la cohabitation avec Lionel Jospin. Il lui faut donc partager le magot avec l'adversaire. Surtout, les ennuis judiciaires de l'ancien maire de Paris mettent en pleine lumière son usage pour le moins baroque des fonds spéciaux. Déjà empêtré dans les affaires des HLM parisiens, des lycées d'Ile-de-France et du financement illicite de son parti, le RPR, Chirac est rattrapé par la question de ses dépenses personnelles. Début 2001, des juges découvrent qu'il a versé 2,4 millions de francs en liquide pour payer ses voyages privés en avion durant les vingt-sept mois qui ont précédé la présidentielle de 1995, Interrogé par les poulets, son agent de voyages confesse que le maire de Paris lui faisait porter des enveloppes contenant « essentiellement des billets de 500 francs ». Jacques Chirac, précise-t-il, n'hésitait pas à l'appeler pour savoir si son « pli » était arrivé à bon port.
L'affaire sort dans la presse en juin 2001 et fait un sacré barouf, à moins d'un an de la présidentielle. Pour se sortir de ce mauvais pas, l'Elysée prétend alors que ces liasses provenaient des fonds spéciaux touchés par Chirac quand il était Premier ministre. La gaffe ! C'était reconnaître que le liquide mis à disposition du gouvernement avait pu servir à son enrichissement personnel…
Cette fois, la pilule ne passe pas. Dans la majorité de gauche, de nombreuses voix s'élèvent pour exiger la réforme des fonds spéciaux. Le député radical de gauche, Alain Tourret, est l'un des plus véhéments. À l'automne 2000, il avait déjà osé réclamer la fin des primes en liquide distribuées dans les cabinets ministériels. Il s'était attiré cette réponse lapidaire du ministre de la Fonction publique d'alors, Michel Sapin « L'utilisation des fonds secrets doit rester secrète. » [ NDLR : c'est cohérent avec la loi Sapin 2 qui a introduit les transactions judiciaires d'intérêt public, une faible protection des lançeurs d'alerte, etc. ]
Avec l'affaire des billets d'avion, Jospin est contraint de hausser le ton. D'autant que Chirac, en 2001, profite de son intervention télévisée du 14-Juillet pour prendre les devants et passer à la contre-offensive. Avec son culot habituel, le Président proteste de ses bonnes intentions et lance : « Pour éviter le soupcon, gelons-les (les fonds secrets) et faisons en sorte que ne puissent être dépensés que des chèques, sous le contrôle d'une commission. » Il a également recours à sa vieille tactique : « mettre de la merde dans le ventilateur », comme il le dit élégamment, chaque fois qu'il se trouve en difficulté. Et Chirac de s'écrier « Matignon a 95 % des fonds, et l'Elysée moins de 5 % ! » Sous-entendu : Jospin est le premier à se goinfrer.
En fait, le chef de l'Etat a mélangé les torchons et les serviettes, additionnant l'argent réservé aux services de renseignement à celui dont dispose l'exécutif, Mais le mal est fait : le Premier ministre est sur la défensive. Fin juillet, Matignon publie un communiqué où le chef du gouvernement donne des chiffres précis sur la répartition des fonds spéciaux et reconnaît l'existence d'« un reliquat de 102 millions de francs » accumulé depuis 1997 par Matignon. Jospin a beau préciser que le solde sera reversé au budget de l'Etat à la fin de son mandat, la nouvelle fait l'effet d'une petite bombe : le Premier ministre s'est constitué une cagnotte dont même la Cour des comptes ignorait l'existence…
Le film s'accélère, le 10 octobre, quand le premier président de la Cour des comptes, François Logerot, rend au Premier ministre un rapport que celui-ci lui a commandé en juillet. Son contenu est ravageur pour tous les gouvernements successifs. Logerot y explique que les textes qui encadrent l'utilisation des fonds spéciaux depuis 1946 {lire pages précédentes) n'ont jamais été appliqués. Il raconte comment ce chapitre budgétaire est devenu une sorte de gloubi-boulga comptable, où l'on retrouve aussi bien les frais des petits-fours servis à l'Elysée et à Matignon, les primes de cabinet et des dépenses en faveur d'actions humanitaires que de mystérieux « frais de fonctionnement exceptionnels ». Pour couronner le tout, la séparation légale entre les fonds spéciaux destinés aux services de renseignement et ceux du gouvernement n'a pas toujours été respectée. François Logerot conclut son rapport en reprenant à son compte les propositions d'Alain Tourret : les fonds spéciaux ne doivent être conservés que pour les actions des barbouzes couvertes par le secret-défense ; ceux qu'utilise le gou- vernement sont voués à disparaître.
Matignon va suivre à la lettre les recommandations du rapport. La réforme est votée le 6 novembre, à l'occasion du vote du budget pour 2002 (année du passage à l'euro). Six mois plus tard, peu après sa défaite à la présidentielle, Jospin publie un communiqué où il rend compte de l'usage de sa cagnotte de 102 millions de francs. Il y précise que le solde, soit 2,76 millions d'euros (18 millions de francs [ sic ! ]), a été reversé intégralement au Trésor public (voir document p. 128).
Désormais, les primes de cabinet figurent sur les bulletins de paie et toutes les factures sont censées être réglées par chèque ou par virement. Pour la première fois dans l'Histoire, l'exécutif se retrouve - officiellement, du moins - privé d'argent liquide.
Raymond se Barre avec l’oseille
Le professeur d'économie Raymond Barre, qui aimait tant donner des lecons de rigueur à ses compatriotes, cultivait en secret un goût pour les fonds spéciaux. En atteste la journée du lundi 11 mai 1981 : quelques heures seulement après l'élection de François Mitterrand, plusieurs collaborateurs du Premier ministre sortant se rendent discrétos rue Notre-Dame-des-Victoires, à la paierie générale du Trésor. Ils en repartent peu après, les bras chargés de très exactement 7 494 713,89 francs en liquide. C'est tout ce qu'il reste d'argent disponible sur le compte 900-10 ouvert par le Trésor public au nom du locataire de Matignon et réservé alors aux fonds spéciaux.
Un premier écrémage avait déjà eu lieu le 4 mai, à moins d'une semaine du second tour. Cette fois, 3 908 315 francs avaient disparu. Le 13 mai, un ultime raclage des tiroirs est organisé. Il s'agit de récupérer une jolie liasse de bons du Trésor (payables au porteur) qui dormait dans les bureaux de Raymond Barre. Bilan : 1,05 million de francs versés par le payeur général à l'émissaire du Premier ministre. Le total des sous pompés par Barre atteint donc la somme de 12,5 millions de francs.
Si étrange que cela puisse paraitre, le gourmand Raymond ne s'était pas mis hors la loi en siphonnant tout ce flouze. La loi lui interdisait seulement de toucher aux crédits ouverts pour la période postérieure à l'élection du 10 mai. Cette obligation a été respectée à la lettre, mais le professeur de vertu Raymond Barre n'était pas pour autant obligé de se tirer avec l'oseille.
Inutile de préciser qu'il n'a jamais accepté de dire ce qu'il avait fait du magot.
Seule certitude : son passage à Matignon (1976-1981) correspond pile-poil à un accroissement important de son patrimoine personnel. Barre s'était d'ailleurs lancé, dès 1979, dans la construction d'une villa au milieu de la très courue presqu'île de Saint-Jean-Cap-Ferrat, non loin de Nice, Cette opération avait été entourée d'un épais brouillard comptable et administratif : recours à un prête-nom, prix officiel du terrain ridiculement bas, permis de construire délivré - par l'Etat - à la vitesse de la lumière et travaux menés tambour battant.
Le dossier Raymond Barre ressurgira dans les colonnes du « Canard » le 3 juillet 2019. Le Palmipède révèle alors que le fisc a découvert en Suisse un trésor caché par Big Raymond : 11 millions de francs helvètes (6,8 millions d'euros) qui dormaient sur un compte ouvert au Crédit suisse de Bâle. Quand Barre est mort, en 2007, sa famille a hérité de cette fortune. Rattrapée par les impôts, elle a été contrainte de passer à la caisse.
Si rien ne permet d'affirmer avec certitude que ces 11 millions de francs suisses provenaient des fonds spéciaux, l'affaire a tout de même permis de mettre en lumière l'étonnant bas de laine accumulé par l'ex-« meilleur économiste de France » (dixit Giscard). Comme en atteste sa déclaration de succession, Raymond Barre possédait, outre ses biens suisses et sa villa de Saint-Jean-Cap-Ferrat, estimée par le fisc à 4 millions d'euros, un paquet d'actions d'une valeur de 2 574 000 euros. Un patrimoine qui valait son pesannt d'or… en Barre.
Argent secret et espions
Réservés désormais aux seuls services de renseignement, les fonds spéciaux représentent aujourd'hui 67,2 millions d'euros par an. Mis principalement à la disposition de la DGSE (sécurité extérieure), mais aussi du GIC (écoutes administratives) et de la DGSI (sécurité intérieure), ce pactole est aujourd’hui rarement dépensé en espèces.
Son utilisation, classée secret-défense, est soumise, en principe, au contrôle des parlementaires. A la fin de 2001, Jospin a créé la Commission de vérification des fonds spéciaux - composée de deux sénateurs, de deux députés et de deux magistrats de la Cour des comptes -, destinée à remplacer l'instance croupion instaurée en 1947, dans laquelle ne siégeaient que des hauts fonctionnaires. La « commission Jospin » n'est pas restée inactive, mais elle n'a jamais rendu public le résultat de ses investigations.
Il a fallu attendre la réforme de 2013 pour que la situation évolue. Désormais, cette commission est rattachée à la Délégation parlementaire au renseignement et ne comprend plus de délégués de la Cour des comptes. Depuis 2016, elle est censée publier tous les ans un rapport d'activité soigneusement expurgé de toute information confidentielle. Si les derniers documents disponibles ne mettent en évidence aucune irrégularité majeure, la Commission n’a pas résisté au plaisir de souligner que les gouvernements successifs n'ont pas cessé de jongler en douce avec le montant des fonds spéciaux. Par exemple en pompant en cours d'année les crédits mis de côté pour les « dépenses accidentelles et imprévisibles ». Ou en profitant du vote de lois de finances rectificatives pour doper discrètement la cagnotte des services spéciaux !
Le temps béni des partis de cash-cash
L'histoire des fonds secrets renvoie à une époque où tout (ou presque) pouvait se régler en cash. Jusqu'au début des années 70, l'usage des cartes bancaires reste très marginal, et les salaires, comme les factures, sont souvent payés en espèces. Nul ne s'offusque alors de voir un quidam sortir d'épaisses liasses de billets pour acheter une voiture, un tableau, voire un bien immobilier. Ces habitudes bien ancrées vont longtemps perdurer.
En particulier chez les politiques et leurs fournisseurs (imprimeurs, afficheurs, organisateurs de meetings…) Ce petit monde a d'autant moins de raisons de se gêner que, avant 1988, aucune loi n'encadre le financement des partis ou des campagnes électorales. Sous la première cohabitation (1986-1988), un grand journal du soir peut ainsi accepter sans ciller une jolie enveloppe de billets en paiement d'une demi-page de publicité électorale.
Devenu Premier ministre en mai 1988, Michel Rocard verse même 300 000 francs en espèces à une entreprise de décoration pour faire installer, dans son domicile privé, un dressing-room et une immense bibliothèque en chène. Questionné plus tard par des policiers chargés d'enquêter sur les comptes du décorateur, Rocard n'ose pas évoquer les fonds spéciaux. Il se contente d'expliquer, sans rire, aux poulets que ce pactole provenait d'un « don familial » !
Il faudra attendre l'approche du passage à l'euro pour que la loi restreigne fortement l'usage des billets. En 2000, la barre passe, pour les citoyens français, à 50 000 francs (7 622 euros), avant d'être abaissée, peu après, à 20 000 francs (3 049 euros), puis à 1 000 euros seulement en 2015 ! En prime, les numéros des grosses coupures et les noms de leurs déposants (ou de ceux qui les retirent à la banque) sont désormais systématiquement relevés par les établissements financiers, et tout mouvement suspect est signalé à Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy. À croire que le liquide est devenu indigeste…
La caisse des keufs
La police a continué d'utiliser en douce d'importantes sommes d'argent en liquide bien après le 1er janvier 2002 et la suppression, par Lionel Jospin, des fonds spéciaux dans les ministères…
C'est le sarkozyste Claude Guéant qui a vendu la mèche, au début de 2013. Pour expliquer, face aux juges, le paiement en cash de nombreuses factures personnelles, Guéant a expliqué qu'il avait touché des « primes de cabinet » en espèces quand il était dircab du ministre Sarkozy, entre 2002 et 2006.
Cette manne avait été prélevée sur les « frais d'enquête et de surveillance » prévus au budget pour payer les indicateurs des poulets et pour régler de menus frais (taxi, restau, matériel divers…). Représentant 12,9 millions d'euros en 2002 et 10,5 millions en 2013, ce flouze, dépensé sans contrôle, était disponible en espèces dans un bureau de la Place Beauvau. Durant une éternité, il a été géré par une certaine « Madame Henriette », de son vrai nom Georgette Boisseau-Deschouarts. Entrée sous Pétain à l'Intérieur, cette dame en est ressortie en… 2007, sous Sarko, à l'âge de 86 ans ! À la fin de sa carrière, cette contractuelle remettait chaque mois 10 000 euros à Guéant, qui en conservait la moitié pour sa pomme.
La révélation de cette gymnastique financière a fait un triomphe. Après une enquête interne et un référé de la Cour des comptes, le ministère a dû se résoudre à supprimer l'usage de la fraîche. De son côté, Guéant s'est retrouvé condamné à 2 ans de prison, dont 1 an ferme, pour détournement de fonds publics. Et pour s'être montré trop coulant avec le liquide…
Dossier publié dans le numéro 153 (octobre 2019) des Dossiers du Canard enchaîné.
Un énième jeu vidéo Harry Potter publié en 2018. Sur smartphone. J'y joue sur mon PC GNU/Linux avec Anbox.
RPG. Monde semi-ouvert (il faut débloquer les lieux + il y a des contraintes financières et temporelles, donc on ne bouge pas totalement comme on veut).
Toujours en développement, de nouveaux chapitres de l'histoire principale sont publiés (à la publication de ce shaarli, on est au chapitre 13 de la 7e année).
Le jeu se déroule dans les années 80 (83-90, d'après mes calculs). Après la chute de Voldy (et donc la mort des parents de Harry) et avant la scolarité d'Harry.
Sur le fond, le jeu est génial. Immersion dans le monde imaginé par Rowling, références permanentes à cet univers, nouvelle aventure avec des galères à résoudre, etc.
Sur la forme, ce jeu est nul :
Triche :
Il y a plusieurs années, une collègue m'avait dit qu'elle a « rien à cacher ».
Récemment, j'ai utilisé son smartphone personnel afin de réaliser des captures d'écran pour l'une de mes documentations (depuis, j'ai demandé l'achat de smartphones professionnels de test pour l'équipe).
Sur l'une des captures d'écran, le menu des applis apparaît partiellement. Elle me demande de caviarder ladite capture (au passage, j'avais inscrit cela dans ma liste des choses à faire avant sa demande).
Tiens… Rien à cacher ? Cohérence, où es-tu ?!
Au demeurant, elle a parfaitement raison : une liste de logiciels en dit long sur une personne : passions & loisirs, situation amoureuse voire identité sexuelle (une appli de rencontres pour les gays, ça ne trompe pas), personnalité (jeu de stratégie ou jeu kikoo ?), infos médicales (suivi de ceci ou de cela), autre (banque ? supermarché ? jeux d'argent compulsifs ?), etc.
Comme quoi, des raisonnements vaseux s'affaissent avec le temps (et c'est une bonne chose). :)
On notera que j'aurais pu publier la capture d'écran """"anonymement"""" (sans y associer un nom, une origine), mais que ce n'est pas le sujet : la possibilité qu'on puisse l'identifier, c'est ça qui, in fine, pose problème, à juste titre, à cette collègue. L'anonymisation des infos intimes / personnelles, c'est du pipeau. Dans le cas présent, les captures mettent en scène un iPhone… alors qu'il y a une seule possesseure dans le service (et caviarder la capture n'en masquera pas la source, du coup, mais ça ne révélera rien de plus que ce qu'elle a déjà voulu rendre public)… Certaines applis permettent aussi de l'identifier grâce à ses passions connues de tous.
Pris dans plusieurs tâches en même temps, j'ai machinalement effectué un dd
d'une ISO de winwin 10 21H1 sur une clé USB. Pauvre fou !
Hé bah, ça fonctionne… presque. :D Démarrage sur la clé USB OK. Choix de la langue + lancement de l'installeur OK. Trouver le disque dur… échec (le classique du pilote manquant).
Utiliser Rufus, la même ISO, et la même machine : l'installeur trouve le disque dur. :O
D'après notre supervision, l'adresse IP de management d'une pile de commutateurs réseau cesse de répondre au ping un vendredi soir à 21 h. Ces switchs servent des bureaux et sont rangés dans des placards à balais (en gros) que l'on nomme des locaux techniques (oui, lol).
J'ai déjà connu le disjoncteur qui se désarme sans raison apparente ainsi qu'une réaction normale suite à un orage, mais…
Cette fois-ci, c'est la multiprise qui a rendu l'âme, comme ça. Je ne pensais pas qu'une multiprise basique (sans fonction onduleur ou de régulation du signal) pouvait tomber en panne. Je n'avais jamais pensé à la question vu que j'ai jamais connu ça dans ma piaule (c'est évidemment un biais statistique : je n'ai pas autant de multiprises qu'au boulot).
D'après mes collègues et leur doigt mouillé, on a bien une multiprise de local technique qui tombe en panne chaque année.
[…] En complément de ma position de fonctionnaire, qui fait que je suis un peu short en terme de cash flow, j'aide des entreprises à trouver un nom. Enfin, je fais du consulting en branding/naming pour des startups, un exercice plutôt tricky. Pour adresser cette issue, j'adopte une approche étymologique qui consiste à utiliser le préfixe « my » suivi d'un adjectif suivi d'un keyword sur l'activité de la startup : « my private cock », « my smart tailor », « my gluten-free apple », elles se ressemblent toutes dans leur singularité, mais c'est valuable.
:)
En ce moment, je suis sur « My Devoted Secretary ». Si je dis : « ma secrétaire dévouée » est un progiciel de gestion des paie qui automatise le travail d'un employé type Robert ou Monique, ça sonne français. […] Alors que si je dis « My Devoted Secretary » est une IA, ou, mieux, une AI basée sur un algorithme qui va forwarder un e-mail à Ganesh, à Bangalore a.k.a Robert, son mandatory white name, pour qu'il édit une payslip, là, oui, il y a innovation, et, en plus, c'est cost-killing ! En linguistique, on appelle ça « distanciation » […], c'est-à-dire que le choix des mots… or should I say le wording va permettre de prendre de la distance par rapport aux implications réelles du business en question et par là même se délester d'un poids moral et donc de faire des affaires en toute impunité.
Gros +1.
[…] Je dirais qu'on est fluent en franglais à partir du moment où on ne sait plus trop ce qu'on raconte. Distanciation, spéculation, bulle sémantique, […] « over-ass farting ».
Gros +1.
[…] tous les plats de la Food Tech : des veggie nuggets, des avocado toasts with salmon, et tout de même des scrambled guts and tripe with liver and pig colon, du pâté si vous préférez.
:'D
Depuis sa version 78, Thunderbird intègre nativement la prise en charge d'OpenPGP. Il utilise la bibliothèque de fonctions RNP, plus des appels à GnuPG (par exemple) comme le faisait l'extension Enigmail. Ainsi, Thunderbird importe la clé OpenPGP en en faisant une copie et en protégeant sa phrase de passe avec une chaîne de caractères générée automatiquement et stockée en clair dans le profil Thunderbird de l'utilisateur. Pour protéger la phrase de passe OpenPGP, il faut définir un mot de passe principal pour le gestionnaire de mots de passe interne.
Notons que, puisque la clé OpenPGP est copiée dans Thunderbird, il n'y a pas de synchronisation automatique entre Thunderbird et GnuPG. Un changement de date d'expiration, accorder sa confiance à une clé, signer une clé, importer une signature de sa clé, etc., toutes ces actions restent cantonnées à l'un ou à l'autre des logiciels.
Comme le note un observateur, la protection par un mot de passe principal n'offre pas les mêmes garanties qu'une utilisation d'Enigmail.
Sans agent GnuPG, Enigmail demandait la phrase de passe à chaque email à déchiffrer / signer. Avec un agent GnuPG, la phrase de passe restait quelques temps en RAM (sans protection) et les emails étaient lisibles sans protection durant cet intervalle.
Avec Thunderbird 78 (et suivants), si l'on ne défini pas de mot de passe principal, les emails sont lisibles en permanence. Si l'on en défini un, il est demandé à l'ouverture de Thunderbird et il est stocké en RAM jusqu'à ce que Thunderbird soit fermé, donc les emails sont lisibles dans cet intervalle, qui est plus long que ce qu'il était avec l'agent GnuPG.
À ce jour, Thunderbird ne permet pas de configurer un délai maximal de conservation du mot de passe principal en RAM.
On notera que la bibliothèque RNP comportait un bug qui lui faisait importer une clé sans la protéger, même si un mot de passe principal existait.
ÉDIT DU 24/09/2022 : j'avais écrit qu'il est possible de configurer Thunderbird pour utiliser GnuPG afin de pallier les déconvenues sus-exposées. Or, la doc' officielle que je pointais expose précisément qu'en ce faisant, GnuPG serait alors utilisé exclusivement pour les opérations de déchiffrement et de signature, et que l'implémentation interne continuerait d'être utilisée pour les opérations de chiffrement et de vérification d'une signature. Donc, il faut quand même synchroniser les trousseaux Thunderbird et GnuPG (Thunderbird a besoin de ta clé publique pour déchiffrer la copie des emails envoyés), surtout si tu utilises ta paire de clés OpenPGP pour d'autres usages que l'email avec Thunderbird (besoin des clés publiques de tes correspondants des deux côtés). En revanche, en utilisant GnuPG, ta clé privée sera alors protégée par celui-ci (et éventuellement son agent) plutôt que par Thunderbird, ce qui contrecarre bien deux des trois points énoncés ci-dessus. FIN DE L'ÉDIT.
Dans la version 78 de Thunderbird, il n'est pas possible d'accepter un certificat x509 auto-signé (ou expiré) pour un serveur SMTP ou IMAP : la boîte de dialogue "alerte de sécurité" n'apparaît pas et le gestionnaire de certificats (dans les paramètres) ne sait pas ajouter un tel certificat (aucun problème pour un serveur HTTPS bien qu'on se demande ce que ça fout dans un lecteur d'emails…).
Solution (esquissée ici) : puisque mon serveur web utilise le même certificat que mon serveur emails, je me rends sur mon site web avec Firefox, j'accepte le risque de sécurité, je ferme Thunderbird, je copie le contenu du fichier cert_override.txt
qui se trouve dans mon profil Firefox dans le fichier cert_override.txt
de mon profil Thunderbird et je l'adapte en changeant le port et en dupliquant la ligne (une pour IMAP, une pour SMTP).
Si ton serveur web n'utilise pas le même certificat que ton serveur emails (ou que t'as pas de serveur web), tu dois pouvoir forger le contenu du fichier cert_override.txt
avec le logiciel firefox-cert-override (je n'ai pas essayé !).
GameShell = petit jeu GNU/Linux/BSD/MacOS en ligne de commande pour initier à quelques commandes Unix de base (cd, ls, rm, chmod, head, tail, find, grep, ps, kill, alias, cal, tr, nano, less, etc.) à travers 42 missions dans (et autour) d'un château (nettoyer le château, découvrir ses trésors, dérober la couronne, affronter un être maléfique, décrypter des messages, etc.). Codé par un prof de l'univ' Savoie Mont Blanc.
J'ai effectué les 42 missions. Je recommande. :)
Pourquoi tous les gestionnaires de mots de passe sous forme d'extension pour navigateur web ne se valent pas ?
L'auteur considère que les gestionnaires de mots de passe mal codés cassent les bienfaits de la compartimentation : il y a plusieurs niveaux de privilèges dans un navigateur web, et les mauvaises extensions mettent nos secrets dans le niveau le plus faible.
C'est loin d'être théorique, l'auteur a émis plusieurs rapports de bugs concernant plusieurs gestionnaires de mots de passe.
On notera que les problèmes soulevés sont conceptuels / fondamentaux, ils concernent plusieurs extensions. Comment discerner celles concernées ? 1) affiche-t-elle une icône / un menu / autre dans le contenu des pages web ? 2) apparaît-elle dans l'onglet Sources de l'onglet Débogueur des outils de développement de Firefox ? Si oui à l'une de ces questions, alors l'extension est vulnérable.
J'utilise l'extension PassFF, frontal pour le gestionnaire de mots de passe Pass. Après vérification, elle est vulnérable à ce type d'attaques. Un autre frontal, l'extension browserpass, n'est pas vulnérable.
Via Aeris.
Ici, nous utilisons snoopy
. Packagé dans Debian GNU/Linux.
Avantages : un nom cool + pas besoin de ré-inventer la roue + contrairement à la méthode Octopuce, snoopy fonctionne en présence d'un hook preexec pour bash dont je me sers pour peupler mon agent SSH.
Inconvénient : par défaut, snoopy journalise également les actions d'origine non humaine (CRON, démon, tâche de fond, etc.), mais y'a moyen de définir des filtres dans sa configuration.
On peut aussi parvenir au même but avec psacct et acct.
Tuto sur comment migrer, sans (trop) d'interruption de service, un MariaDB dont les structures binaires de données sont corrompues.
On (re)découvre :
bind()
un service réseau sur une adresse IP que l'on n'a pas (dans une configuration "reprise sur panne" avec keepalived, par exemple) sans écouter sur toutes les adresses et les interfaces (avec « :: » et « 0.0.0.0 ») ?
Les paramètres de Linux « net.ipvX.ip_nonlocal_bind » sont là pour ça.
Un prestataire me dit qu'il est possible de monter un même espace de stockage en mode bloc depuis plusieurs machines avec le protocole réseau ISCSI.
Je sais que ce n'est pas possible : ISCSI permet de monter un disque dur distant comme s'il était branché à la machine locale, pas de le partager. ISCSI = bus de données SCSI over Internet.
Mais bon, sur le moment, un peu de crédulité…
Mon collègue, qui a plus de connaissances que moi en stockage, me dit que ça paraît louche. Il teste quand même. Deux machines GNU/Linux montent, via ISCSI, un même espace de stockage de test hébergé sur notre NAS. Résultat : les données écrites depuis une machine n'apparaissent pas de l'autre côté. Il faut démonter/remonter l'espace de stockage pour voir les fichiers créés.
Discussion à trois avec notre prestataire, étonné : « ben avec VMware vSAN, ça marche : 5 hyperviseurs importent bien le même bloc de stockage ».
Mon collègue me dit alors que c'est normal : l'espace de stockage doit être formaté avec VMFS, le système de fichiers de VMware qui est un système de fichiers pour disque partagé.
Le monde du libre a ses systèmes de fichiers pour disque partagé : OCFS2, GFS2. Guiguiabloc nous illustre une utilisation d'OCFS2 (avec de jolis schémas).
Attention à ne pas confondre les systèmes de fichiers pour disque partagé avec les systèmes de fichiers répartis (CephFS, GlusterFS, RozoFS, etc.) dans lesquels les données sont… réparties et répliquées sur plusieurs machines.
Merci Alex de m'avoir appris tout ça.
Je découvre le multipath ISCSI qui permet de redonder l'accès à un espace de stockage exporté au format bloc avec le protocole réseau ISCSI. Ainsi, il est possible d'avoir deux chemins réseaux totalement distincts (câbles différents, routage différent, etc.) ou même deux têtes logicielles sur un même NAS utilisées simultanément (c'est d'ailleurs le support Dell qui nous a obligé à mettre en place le multipath ISCSI avant la mise à jour logicielle de notre NAS Unity XT).
Avec Debian GNU/Linux 10, on installe le paquet logiciel multipath-tools
(device-mapper multipath), un p'tit fichier /etc/multipath/multipath.conf
, on découvre/login avec iscsiadm
(comme d'hab) puis on monte /dev/mapper/mpathX-partY au lieu de /dev/sdX.
Merci Alex de m'avoir appris cela (et de l'avoir mis en place).
Dans un annuaire Active Directory, et dans l'implémentation libre Samba, DFS permet de mettre en place des alias sur les lecteurs partagés, d'unifier derrière un même nom des partages réseau stockés sur des serveurs de fichiers différents. Exemple : smb://nas.masociete.example/compta et smb://nas.masociete.example/direction : un même nom, mais, en réalité, les données sont stockées sur deux serveurs. Encore mieux : la syntaxe smb://nas.masociete.example/<NOM_UTILISATEUR>
peut envoyer deux utilisateurs différents sur deux serveurs de fichiers différents.
La table des correspondances est stockée dans la machine qui a le rôle DFS, qui n'est pas forcément le contrôleur de domaine.
La machine qui joue le rôle DFS effectue uniquement la redirection, les transferts de données ne passent pas par elle. Dit autrement : un ss
sur un poste de travail montrera une connexion SMB entre cette machine et le véritable serveur de fichiers, pas entre elle et la machine DFS.
Cas d'usage ?
Merci Rémi de nous avoir appris et mis en place cela.
Nous avons plusieurs centaines de machines Ubuntu 20.04 qui ne sont pas attribuées à un utilisateur précis.
Nous voulons éteindre automatiquement ces machines après une période d'inactivité.
Critères :
sleepd
est packagé dans Debian GNU/Linux, mais il ne l'est plus dans Ubuntu après la version 14.04.
Le paquet Debian fonctionne très bien sur Ubuntu :
apt download sleepd
depuis une machine Debian ;apt install libx86-1 pm-utils vbetool
sur une machine Ubuntu afin d'installer les dépendances ;dpkg -i sleepd_2.10_amd64.deb
;/etc/default/sleepd
: « -u » pour le délai avant action ; « -s /sbin/poweroff » pour éteindre la machine au lieu de la mettre en veille ; « -w » pour comptabiliser également l'activité sur d'éventuelles sessions SSH ;systemctl restart sleepd
.autopoweroff. Trop complet pour notre usage (il peut vérifier la consommation CPU et la joignabiltié de machines dont celle-ci dépend avant d'exécuter une action) donc fichier de configuration plus touffu.
CRON. Au début, je voulais écrire une tâche planifiée qui aurait tourné toutes les heures non-ouvrées et qui aurait utilisé la commande w
pour déterminer si des utilisateurs ont eu une activité récente avant d'éteindre. Deux inconvénients : 1) pourquoi réinventer la roue ? ; 2) si l'on veut désactiver l'arrêt automatique lors d'une maintenance, il faut commenter le contenu d'un fichier, ce qui est moins pratique que systemctl stop sleepd
.
Le protocole SMB version 1 utilisé au sein d'un domaine winwin (donc Kerberos) ne gère pas nativement les alias DNS (CNAME), il faut ajouter une clé de registre sur le serveur de fichiers ou enregistrer l'alias comme nom de service (SPN) Kerberos.
L'absence de prise en charge des alias DNS se constate aussi avec un client winwin 7 / 10 qui tente, en vain, de monter, en SMBv3, un partage CIFS exporté par un NAS Dell EMC Unity XT qui est membre d'un domaine Samba AD DC. Dans ce cas, impossible d'ajouter une clé de registre puisque le serveur de fichiers est le NAS Unity (et que la clé de registre fonctionne uniquement pour SMBv1). Il doit y avoir un moyen d'ajouter un Service Principal Name (SPN) Kerberos pour l'alias, mais nous n'avons pas creusé.