On est parti pour construire deux nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR 2, donc une nouvelle vague de nucléaire, afin de sécuriser l'approvisionnement électrique du pays et les compétences nationales (leur amoindrissement après Tchernobyl est, en partie, ce qui a semé la grouille dans les EPR). Entre 12 et 14 vieux réacteurs seront fermés d'ici à 2035. Le nucléaire est toujours une technocratie à l'intérieur de l'État en cela qu'il est toujours piloté par des conseillers des Mines depuis l'Élysée sans contrôle démocratique (le prochain président devra assumer le choix des EPR 2 qui seront alors en construction). On est donc loin de réduire drastiquement notre consommation d'électricité, ce qui nous permettrait d'utiliser d'autres sources d'énergie pilotées au niveau local par les citoyens, comme le fait Enercoop avec les panneaux solaires et les méthaniseurs. On est loin de financer la recherche scientifique sur d'autres technos nucléaires pas tout à fait mûres mais prometteuses comme des réacteurs au Thorium. La France s'entête et s'endette dans un choix passé…
Furieux des « dérives inacceptables » sur les chantiers de l’EPR, Bruno Le Maire considère que le nucléaire ne doit pas être « un Etat dans l’Etat ». Il a donc annoncé sur RTL (29/9) qu’un « audit indépendant » serait réalisé sur la filière française du nucléaire d’ici au 31 octobre. Et il a promis « des conséquences à tous les étages », y compris chez EDF.
Premiers visés : les EPR qui accumulent des retards très importants, en France avec Flamanville, en Grande-Bretagne avec Hinkley Point. L’annonce de Le Maire a été comprise comme un coup de semence en direction du pédégé d’EDF,- Jean-Bernard Lévy, qui s’est inquiété de son avenir à la tête de l’entreprise. Ces déclarations ont eu le don d’agacer l’Elysée. Confirmation d’un conseiller de Macron, lundi matin : « Nous sommes vraiment sur une ligne de soutien à Lévy. Il n’est pas question de le remplacer ou de le déstabiliser. On veut l’aider à reprendre l’industrie nucléaire en main. »
A priori, y a du boulot !
A marche forcée
Il est vrai que le malheureux ministre de l’Economie n’est pas tout à fait au parfum des dossiers nucléaires, pilotés en direct par l’Elysée, en étroite collaboration avec l'APE, l’agence de Bercy qui porte la participation de l’Etat dans le groupe EDF.
Censé disposer de la tutelle sur l'APE, Le Maire n’a pas été informé de l’appel d’offres que l’électricien tricolore a lancé, le 20 septembre, visant à construire les fondations et les bâtiments pour deux nouveaux réacteurs de type EPR 2 (version simplifiée des EPR) à Penly (Seine-Maritime).
Au terme de la loi adoptée en 2019, l’énergéticien a l’obligation de fermer entre 12 et 14 vieux réacteurs d’ici à 2035, mais il compte en même temps bâtir de nouvelles centrales pour assurer la sécurité d’approvisionnement et préserver les compétences nucléaires hexagonales. EDF doit donc présenter au gouvernement, d’ici à mi-2021, un dossier sur ses capacités à maîtriser, notamment financièrement, cette nouvelle vague de nucléaire.
Si l’électricien est aussi efficace que pour Flamanville, cela promet...
Dans le Canard enchaîné du 2 octobre 2019.