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  • Refuser l'entretien professionnel quand on est un contractuel de la fonction publique d'État

    L'entretien professionnel individuel (EPI) existe dans le privé comme dans le public. Dans le public, il concerne aussi bien les fonctionnaires que les contractuels (CDD et CDI). Sa fréquence est de deux ans dans le privé et d'un an dans le public (parce qu'on a que ça à faire, faut croire ‒ non, sérieux, je trouve sincèrement que ça contribue à la mauvaise image de la fonction publique ‒). Dans tous les cas, il est obligatoire. Dans ce shaarli, je vais me concentrer sur le refus d'un entretien pro par un contractuel de la fonction publique d'État.

    Ce rendez-vous avec ton chef (oups, on dit n+1 de nos jours afin de tenter de masquer la hiérarchie, de faire croire qu'on est tous amis, choupinou tralala) est censé permettre de faire dialoguer chef et sous-fifre (lol), de proposer des évolutions (promotion, changement de poste, etc.), de fixer les objectifs de l'année à venir, de vérifier si t'as atteint les objectifs de l'année passée, de vérifier tes besoins de formation, de remonter des problèmes dans l'équipe ou entre les équipes, etc. Bref, « de faire le point », par écrit.

    Pour ma part, je refuse de participer à cette mascarade.

    • Si ça ne va pas, j'vais pas attendre un an pour le signaler à mon chef, et j'attends de lui qu'il n'attende pas un an pour rectifier un mauvais tir de ma part. Surtout qu'au bout d'un an, le pli est pris et c'est difficile de revenir en arrière. Et me reprocher un truc un an après, merci bien, je ne dispose pas d'une mémoire phénoménale qui me permettrait de me défendre. Je veux pouvoir discuter à la cool avec mon chef et non pas parce que c'est une obligation légale. Je ne crois pas à la sincérité des EPI. À cela, on me répond que tout le monde n'est pas capable d'aller voir son chef, d'où il faudrait se réjouir de l'existence de ce rendez-vous imposé. Je n'y vois qu'une confirmation du malaise généralisé entre chef et sous-fifre : personne devrait avoir peur d'aller causer à son chef ;

    • Je ne crois pas à l'utilité des EPI pour l'individu. Ça sert les intérêts de la société commerciale ou de l'administration, mais pas ceux du salarié. Les EPI seront jamais utilisés pour proposer une promotion ou un truc avantageux au salarié, faut pas s'faire d'illusion. En revanche, ils sont la merde que l'on brassera lorsqu'il s'agira de mettre au placard ou de virer quelqu'un. Ils sont la merde qui permet d'individualiser les carrière et de mettre les gens en compétition (« X a fait mieux que toi, olalala attention à toi »). Une collègue, elle-même cheffe d'une autre équipe, m'a indiqué que si, c'est utile, blablabla, qu'elle a fait remonter à son chef (notre n+2 commun) des problèmes importants de communication entre elle et mon chef. Nous sommes 7 mois plus tard et j'vois pas de changement. Je suis mauvaise langue : il y a eu les vacances et son congé de plusieurs mois, donc on peut penser que le n+2 a légitimement temporisé. Affaire à suivre, mais j'y crois juste pas ;

    • Je n'ai pas besoin de formation. Quand je vois le bullshit dégoulinant dans la formation initiale (universités, écoles d'ingénieurs, etc.) et dans la formation continue (on m'a forcé à suivre une formation en gestion de projets, une autre en risque incendie et la dernière en risque électrique et… c'est juste aussi creux que les cours à l'université), je suis absolument certain de ne pas avoir besoin de formation, merci bien. Perte de temps et de « pognon de dingue » ;

    • Si t'es sûr d'une chose quand t'es contractuel, c'est que t'es une sous-merde. La seule promotion intéressante (rien que niveau rémunération, déjà), c'est de devenir fonctionnaire. Un EPI ne permet pas cela, il faut décrocher un concours. Donc mon évolution professionnelle ne dépend pas d'un EPI ;

    • Quant aux objectifs… Les bras m'en tombent. L'essence même de l'ordonnance de 1946 sur la fonction publique (merci le coco Thorez), c'est de rendre le fonctionnaire indépendant de sa hiérarchie. Le but du statut et de la rémunération au grade (= qualification) est d'éviter la rémunération au mérite, la promotion canapé et celle à la tête du client. Alors, oui, depuis 1983, le mérite apparaît pour trier les candidats à une même promotion. Depuis quelques années (2014 ?), des mécanismes de primes individuelles ont été introduits. Je pense au Complément Indemnitaire Annuel (CIA), prime facultative qui « permet de reconnaître spécifiquement l’engagement professionnel et la manière de servir des agents ». Cela va totalement à l'encontre de l'ordonnance de 1946, de ce qu'on a voulu construire après guerre… et on ne dit rien, comme d'hab. À titre perso, je me fous de ce point puisque les contractuels ne sont pas éligibles au CIA ;

    • Il s'agit d'une énième tartuferie pour faire croire au prolo qu'il est écouté par son chef, qu'il est dans une structure cool, que son avis compte, etc. Je ne crois pas à ce genre de baratin libéral. Les seuls moyens de se faire entendre et respecter des chefs, c'est la loi, c'est de se syndiquer, c'est de porter nos revendications auprès de nos chefs et dans les instances, c'est de faire la grève, c'est d'être vigilant au quotidien et de dénoncer ce qui ne va pas. On crée un rapport de force et après on discute. On ne discute pas seul face à une organisation (société commerciale, administration, etc.) dont le chef est une émanation. À part te faire écraser, tu y gagneras rien, car le combat est asymétrique.

    La première année, j'ai pu échapper à c'te merde d'entretien. En effet, j'avais un CDD de dix mois. Or, le décret qui encadre l'EPI chez les contractuels, le décret numéro 86-83 du 17 janvier 1986, dispose, dans son article 1-4, que : « Les agents recrutés pour répondre à un besoin permanent par contrat à durée indéterminée ou par contrat à durée déterminée d'une durée supérieure à un an bénéficient chaque année d'un entretien professionnel qui donne lieu à un compte rendu. ». Dix mois, c'est inférieur à un an. Argument refusé par la direction des ressources humaines. Pas moyen d'analyser le décret ensemble, rien, la pionne me récite doctement la bible locale et ne comprend pas que je puisse oser remettre en cause la Très Sainte Parole de mon service RH. Circulez, y'a rien à voir ! Un rendez-vous avec le directeur des ressources humaines clarifiera la situation : il partage mon analyse du décret, mais il me vante une politique volontariste de mon administration en mode "tu vois, on prend soin des gens". OK, c'est donc acté : pas d'EPI pour moi.

    À partir de la deuxième année, c'est plus compliqué. De mon plein gré, je signe des CDD d'un an. Chaque fois, mon employeur me propose un CDD de deux ans, mais je demande un an. Il y a évidemment une stratégie derrière ça. Donc, on pourrait croire que je suis toujours dispensé par l'article 1-4 sus-cité qui prévoit un EPI si CDD > un an. Je le pense aussi. Mais, d'un autre côté, je pense qu'un juge trancherait dans le sens inverse en invoquant trois points : 1) le cumul de mes CDD dépasse largement un an ; 2) le législateur voulait très certainement inclure ce cumul dans sa définition (le contraire exclurait tellement d'agents…) ; 3) le premier critère, le « besoin permanent » est rempli puisque ça fait des années que je suis à mon poste et que ce poste perdurerait si je partais. Bref, c'est flou. Et comme il n'y a pas d'instance auprès de laquelle se renseigner… J'ai refusé le dernier EPI sans m'appuyer sur ce décret, juste en disant "je veux pas de votre merde". J'ai pas eu. Mais cela ressemble à une faveur (lire ci-dessous).

    En vrai, c'est moins idyllique que cela.

    Bien sûr, direction des ressources humaines et chef m'ont adressé les habituelles menaces : "ça va te nuire", "en cas de promotion, si t'es à égalité avec un autre, ton refus d'EPI jouera contre toi", "idem si l'on veut te virer", etc. Ce à quoi je réponds : LOLILOL. :)))) Je suis ingénieur en informatique. Du taff, j'en trouverai où je veux, quand je veux. De plus, le service RH étant débordé, je doute profondément sur le fait que les EPI soient ressortis du placard lors d'une hypothétique promotion.

    Les deux fois, mon chef a été obligé de remplir l'EPI en mon absence. Enfin, obligé… C'est un bien grand mot. Il aurait pu choisir d'envoyer tout ça bouler. Surtout qu'il est fonctionnaire… Les deux fois, j'ai dû signer son taff, comme lors d'un vrai EPI. J'ai vaguement relu avant, rien à foutre.

    Cette année, il s'est fait retoquer la majorité des EPI de ses sous-fifres (les rendre très en retard n'aide pas à se fondre dans la masse…). Objectifs pas renseignés. Occupation du temps de travail pas renseignée. Il avait volontairement refusé d'évaluer notre « capacité à servir » (or, comme on l'a vu plus haut, le CIA peut être basé sur ça ;) ). Etc. Au final, les sous-fifres ont les mêmes objectifs vagues (maintien du système d'information, etc.) alors qu'on travaille sur des choses très différentes. Une partie des réponses, c'est du copié/collé de Wikipedia (il cite sa source). Et on a tous la même réponse évasive concernant notre capacité à servir. C'est passé. Ça confirme mon intuition initiale : les EPI sont du gros BULLSHIT inutile. Y'a rien de sérieux.

    Bref, refuser son entretien professionnel annuel quand on est un contractuel de la fonction publique d'État, c'est possible. Je t'encourage vivement à en faire de même, même si tu travailles dans le privé. :)

    Thu 30 Jan 2020 10:02:25 PM CET - permalink -
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