Poutou exprime des choses intéressantes. Rien de neuf, mais exprimé sur des médias de masse.
Le problème, c’est qu’on ne peut pas faire confiance à l’État ou aux patrons pour les reconversions. Si demain, on décide de fermer une usine d’armement, cela entraînera forcément des licenciements. D’où la question de rendre l’économie plus collective, de ne pas la laisser entre les mains des capitalistes. Nous voulons que les salariés et la population puissent assurer eux-mêmes les reconversions s’ils décident d’abandonner un secteur pour des raisons environnementales et de cohérence économique.
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On peut imaginer des structures nationales et locales où la population pourrait discuter de ses besoins et faire des choix politiques. Par exemple, pour le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il faudrait qu’une population vraiment politisée impose ses choix — plutôt que des collectivités territoriales qui votent ce qu’elles ont envie de faire en lien avec les intérêts des multinationales. Ce n’est pas évident à imaginer dans un monde hyper individualiste où chacun rentre chez soi le soir regarder la télé et ne s’occupe pas de politique. Car il y a déjà ce problème-là à régler : comment donner envie aux gens de discuter de ce qui les concerne collectivement, pour que les militants et les zadistes ne soient plus les seuls à s’en occuper ?
Sur le plan économique, les salariés devraient pouvoir prendre en main l’organisation du travail et même les choix stratégiques. L’exemple de Fralib est très intéressant. Alors qu’Unilever voulait fermer l’usine, des salariés l’ont reprise en Scop. Elle est militante d’un point de vue social : il n’y a quasiment pas d’écarts de salaires, tout est décidé collectivement — la répartition des postes, les heures supplémentaires, etc. Elle a également une dimension écolo, puisqu’elle utilise du thé bio, cherche à s’approvisionner localement… C’est bonnard ! C’est à toute petite échelle certes — ils sont une quarantaine —, mais c’est hyper bien. Autre exemple, l’usine Pilpa à Carcassonne, reprise en Scop par des salariés qui y produisent les glaces La Belle Aude : ils privilégient le bio, les produits locaux… Évidemment, les produits sont vendus un peu plus cher, mais cela montre qu’il est possible de produire en respectant les salariés, l’environnement et la santé de la population.
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[…] Concernant la fonction présidentielle, nous trouvons aberrant qu’un seul individu puisse avoir autant de pouvoir entre les mains. Idem pour les présidents de région, les maires… Il y a un surpouvoir dans toutes les instances démocratiques.
L’autre problème est celui de la représentation. L’absence de proportionnelle intégrale est très problématique. La concentration du pouvoir dans les gros partis et la professionnalisation des élus aussi. Sans parler de leur rémunération excessive : à partir du moment où ils touchent de hauts revenus, députés et sénateurs s’accrochent à leurs postes et sont complètement liés à un milieu social. Cela entraîne une véritable déconnexion des simples travailleurs. C’est pourquoi nous voulons plafonner le revenu des élus à 2.300 euros nets mensuels environ. Nous préconisons aussi le non-cumul des mandats.
Mais ces règles ne sont que des mesures d’urgence. Le véritable objectif, c’est construire une démocratie qui deviendrait le problème de millions de gens. L’histoire des luttes sociales nous donne des modèles de batailles et de moments démocratiques. La Commune de Paris, il y a près de 150 ans, ébauche d’organisation collective à l’échelle d’une ville ; les expériences de démocratie participative à Porto Alegre, au Brésil, avec un mandat tournant et des réunions de quartier… Mais il reste un impératif incontournable : il faut que la population s’en mêle. Un délégué qui parle à la place des autres, ce n’est pas bon ! Les gens doivent parler eux-mêmes pour eux-mêmes. Sinon, ces outils ne resteront que des coquilles vides.
[…] Ce qui est intéressant dans ces occupations de sites ou de places, c’est la manière dont les gens organisent une sorte d’autogestion. Et le fait qu’elles ne sont pas limitées à une lutte, mais qu’on y discute de tout : de solidarité avec les migrants de Calais, de questions démocratiques, antiracistes, féministes… Elles rassemblent aussi des gens assez divers, en âge et en milieux sociaux.
Dans l’activité militante au quotidien, on est très peu à militer, donc très peu à faire le boulot. Ce sont les mêmes qui parlent, qui prennent les initiatives, font les tracts, etc. Pour nous, Nuit debout a été énorme. Le rapport était inversé : tout le monde militait, prenait la parole… C’est hyper reposant, car on n’est plus celui dont l’absence pose problème — si l’on n’est pas là, il y en a plein d’autres ! Les Zads, c’est un peu pareil. Tout n’est pas rose, on y trouve parfois des réflexes sectaires, anti-politiques, anti-organisations, du coup les rapports ne sont pas toujours simples… Mais tout cela va dans le bon sens.
Je pose ça là en complément :