On a souvent besoin d'autrui pour mener à bien / faire avancer un projet / combat. Parfois, les personnes que l'on sollicite car elles nous semblent être les plus à même d'aider (compétences, détention d'informations, situation / position, affinité, etc.) refusent d'apporter leur concours. Pire, certaines personnes se désistent et retroussent chemin après avoir engagé leur premier coup de papatte. Souvent pour des motifs vaseux comme une peur irrationnelle.
Dans ces moments-là, je me sens déçu par la personne voire trahi, et donc triste. Je fonctionne à l'affinité / l'affect (je choisis une personne pour un projet pour ses compétences, mais aussi parce que je sens bien cette personne-là, à ce moment-là, sur ce projet-là), donc, forcément, ça me fait mal. Surtout quand une personne affirme adhérer à fond à ma démarche et qu'elle m'a bien chauffé au préalable en mode "t'as trop raison, faut faire ça, vas-y mon poulain !".
On peut y voir de la lâcheté, voire de l'hypocrisie (afficher son soutien sans rien produire de concret). Oui, c'est vrai, mais…
Il y a plus de 5 ans maintenant, une amie m'a dit quelque chose. Je constate que le souvenir de ces paroles m'a apaisé à plusieurs reprises ces derniers mois dans des contextes comme celui exposé ci-dessus.
Il y a plein de façon de contribuer à un projet / combat, plein de manière de changer le monde. On n'est pas obligé de poser des bombes ni de saboter les moyens de production. On peut gérer la logistique (autour de la pose de la bombe ou du sabotage). On peut héberger les militants radicaux (comme les Résistants qui faisaient sauter les voies ferrées). On peut diffuser la propagande (afin d'expliquer l'utilisation de bombes / sabots). On peut fournir des informations (car, comme la personne est restée irréprochable, le système lui en filera). On peut mettre en relation des personnes. On peut soutenir moralement l'acteur principal. On peut lui remonter le moral. On peut dévier le coup de grâce que tentera s'asséner le système à l'actrice principale (en restant irréprochable aux yeux du système, une personne sera à même de peser de tout son poids dans la décision). On peut contribuer aux caisses de grève plutôt que d'aller se faire gazer par les flics ou perdre quelques précieux euros sur un salaire précaire. Etc. Bref, il faut accepter que tout le monde n'ait pas le même niveau d'engagement dans un projet / combat… Et ne pas insulter le futur.
Comme dit dans le film Fight Club, c'est à chaque personne de définir son niveau d'engagement. Comme d'hab', forcer les gens amène rien de positif (travail bâclé, dernier coup de main, mauvaise ambiance, etc.). Ma fierté de ces dernières années est de parvenir à commencer à faire la différence entre un refus de ma personne et un refus de l'une de mes idées, et d'accepter un refus de coup de main. Je progresse à petits pas.