Le Sénat a refusé de jouer en deuxième lecture (rejet préalable du texte en commission puis en séance plénière) les 6 et 19 décembre. Le 22 décembre, l'Assemblée a donc adopté ce projet de loi en lecture définitive. Le texte va maintenant être examiné par le Conseil Constitutionnel puisque celui-ci a été saisi par les Parlementaires.
La version du texte examinée fut celle de la deuxième lecture à l'Assemblée qui est acceptable (je n'ai pas dit « convenable » ni « bien » ;) ) sur les 4 points que je surveille (liberté de la presse et liberté d'expression, droit universel à la cantine scolaire dans le primaire, pas d'expérimentation d'un civique obligatoire, contrôle à domicile de l'instruction en famille et sur un nouveau critère de compétence, le gouvernement est chargé de procéder par ordonnant pour décider des mesures d'autorisation préalable à l'ouverture des établissements d'enseignement privés hors contrat).
Aucun amendement n'a été déposé/étudié puisque, selon la procédure, les seuls amendements recevables étaient ceux déposés par le Sénat lors de sa deuxième lecture mais comme la Haute Assemblée a refusé de jouer, il n'y a aucun amendement.
J'avais expliqué ces points de procédure parlementaire dans un autre shaarli : Processus législatif français illustré par le projet de loi Travail.
Et, à part les points que je surveillais, qu'est-ce qu'il dit ce projet de loi ? Je ne vais pas résumer les 224 articles de cette loi fourre-tout mais je retiens :
- Congé sans solde d'engagement associatif : 6 jours par an fractionnables par demi-journée, pour les salariés et les fonctionnaires qui sont bénévoles dans une association. Limites : l'asso doit avoir plus de 3 ans, elle doit être 1) b) de l'article 200 du CGI (« organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique,[...], à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises) et les personnes en demande de congé doivent être de la direction de l'association ou assurée des fonctions d'encadrement. On dira que c'est un bon début bien maigre en complément du congé de représentation déjà en vigueur ;
- Quasi-harmonisation de la loi avec la jurisprudence : les mineur-e-s de plus de 16 ans peuvent créer et administrer une association (avec l'accord des parents alors que la jurisprudence est moins restrictive) et être directeur-rice de publication. Dans le deuxième cas, la responsabilité civile et pénale des parents reste engageable (loi 1881, tout ça). Bref, une mesure choupi là aussi.
- « En cas d'égalité des voix lors d'une élection locale, le candidat le plus jeune l'emportera, et non plus le plus âgé. ». Petite mesure symbolique choupi mais c'est toujours ça de pris. :-
- « Le texte introduit aussi dans le Code civil « l'exclusion de tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles ». Une disposition anti-fessées saluée par des associations comme la Fondation pour l'enfance ou l'Observatoire de la violence éducative ordinaire. ». On n'est pas au pénal ( ;) ) et je me demande bien comment cela sera appliqué. Visiblement, le Parlement mise sur "les parents changeront car c'est désormais dans la loi". Sauf que cette loi est passée inaperçue au 20h, hein.
- Expérimentation sur 1 an d'un déclenchement systématique des caméras piétons (portées par les forces de l'ordre, prévus par la loi de réforme pénale de juin 2016) lors d'un contrôle d'identité. Cette mesure avait été retoquée lors de l'examen de la réforme pénale. J'espère qu'avec cette expérimentation, les observatoires réussiront à avancer sur la question du contrôle d'identité au faciès, ça fait quand même depuis les années 80 qu'on en parle. :/
- Pénalisation de la négation de crimes contre l'humanité alors que le Conseil Constitutionnel et la CJEU se sont déjà prononcés sur des textes similaires… Voir http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2016/12/22/31003-20161222ARTFIG00062-loi-egalite-et-citoyennete-cette-atteinte-a-la-liberte-d-expression-passee-inapercue.php
Sources :