Le rapport de force pour la réforme des retraites semble se dessiner. Macron est sûr de lui : les gilets jaunes sont du passé, donc, si le gouvernement communique sur "réforme des retraites = fin des privilèges", la réforme passera tranquille, l'opinion se retournera contre les grévistes. Mais, en même temps, il semble avoir peur des blacks blocs et d'une convergence des luttes (urgences, pompiers, etc.). Donc, la stratégie à adopter me semble limpide : faire converger les luttes sectorielles, soutenir les grévistes plutôt que de penser à sa gueule à court terme, et soutenir une montée de la violence émancipatrice (la non-violence peut être un mirage).
La réforme des retraites, c'est :
Après le 45e samedi de mobilisation des gilets jaunes, au sujet duquel l’exécutif avait assuré redouter le pire — surtout en pleines Journées du patrimoine -, Emmanuel Macron n’a pas caché son soulagement. Les « gilets » ont peu mebiiisé, et les incidents provoqués par les Black Blocs ont été circonscrits, même s’ils ont contrarié la Marche pour le climat.
Devant ses collaborateurs, le 21 septembre, le chef de l’Etat a fait le point.
« La rentrée n’est pas chaude, a-t-il affirmé, mais délicate. Indiscutablement, il y a une multiplication d’exigences catégorielles. Après les gilets jaunes, beaucoup ont le sentiment qu’on n’est pas à 1 milliard près. Ça, c’est le point noir. Le point positif, c’est l’échec de la relance du mouvement des gilets jaunes. »
Et de préciser, d’un ton tranchant :
« Les problèmes structurels demeurent et doivent être traités, mais chacun de nous voit bien que ces manifs ne servent à rien ni à personne, sauf aux casseurs. »
Là-dessus, Macron a repris sa tirade favorite :
« Rien ne serait pire pour nous que de nous mettre aux abris et d’arrêter les réformes. » Avant d’aborder le sujet le plus brûlant du moment, la remise en question des régimes spéciaux : « Les Français comprennent parfaitement qu’ils n’ont pas à payer par les impôts un système archaïque de maintien des privilèges. C’est pourquoi la CGT peut bloquer les transports pendant un an si elle le veut, ça n’empêchera pas la réforme des retraites. »
Transmis aux usagers !
Si Macron paie d’emblée de sa personne pour cette réforme des retraites, c’est parce qu’il craint (lire plus haut) les débordements lors des mouvements sociaux. Et qu’il prône à tout-va pédagogie et concertation.
Ainsi a-t-il demandé à ses ministres, lors du Conseil du 18 septembre. d’être « attentifs », d’« anticiper les mouvements catégoriels » et de « poser rapidement les cadres de la discussion ».
« Il faut, a-t-il ajouté, expliquer les principes de la réforme, ses invariants et les points sur lesquels on entame des discussions. »
Moyennant quoi il a demandé après les premières manifs à Nicole Belloubet de rencontrer les avocats, à Blanquer de voir les profs et autres personnels de l’Education, et à Buzyn de se réunir avec les professionnels de la santé.
Et, attention, il va surveiller ces rendez-vous sur son application spéciale…
Dans le Canard enchaîné du 25 septembre 2019.