Ces temps-ci, on peut se demander pourquoi les politocard-e-s sont violent-e-s, entraîné-e-s dans une surenchère autoritaire et sécuritaire auto-alimentée, parlant de guerre qu'il faut impérativement gagner à tout bout de champ. Mais quand on y réfléchit, c'est compréhensible. J'ai pas dit acceptable. C'est de ça que je veux causer en mode causerie de bistrot. Ma réflexion est incomplète, pas structurée, c'est normal. Je jette juste mes premières pistes de réflexion.
Toute la politique politicienne est verrouillée. Exemple : président de la République, c'est 5 ans d'exclusivité. Ça veut dire qu'un-e français-e aura 12 occasions de se présenter (espérance de vie = 83 ans, ramenée à 80 ans et droit de vote à 18 ans, ramené à 20 ans) ! Sans compter que tu ne peux exercer aucune fonction politique quand tu es "jeune" car il faut avoir "l'expérience de la vie", lol. Sans compter qu'il faut être encarté-e dans un parti et donc être le-la chef-fe reconnu-e du mouvement ! Premier ministre, il faut être nommé-e par le président donc il faut sortir du lot, avoir "pataugé dans la même merde" et sortir la brosse à reluire. Même chose pour les autres ministres. Sénat : il faut sortir la brosse à reluire auprès des grand-e-s électeurs-rices. Assemblée, il faut entrer dans un parti et là encore, montrer qu'on est le-la chef-fe du bled et approuver les choix et les positions du parti et donc, éventuellement, ceux du président, ministre, etc… Ce système d'exclusivité est problématique car il ne peut pas produire de nouvelles idées mais aussi car on a envie d'y rester.
Du coup, forcément qu'un-e président ou ministre ou député-e ou sénateur-rice en exercice a dû sortir les crocs pour en arriver là. C'est un système de compétition. Qui commence dès les grandes écoles que ces gens-là ont fréquentées et qui se poursuit au sein du parti pour gravir les échelons. Faut être le-la meilleur-e, faut être habitué-e à être le-la meilleur-e, à en vouloir, tout ce bullshit. Il faut écraser autrui. Pas discuter, imposer. Pas débattre, gagner les faveurs des auditeurs-rices et donc le poste convoité. Forcément, une fois que t'as le poste, tu ne vas pas changer de mentalité et devenir posé comme ça, taktak. C'est bêtement mécanique : tu reproduis ce que tu connais. Et si la violence t'as permis d'évincer tes concurrent-e-s, qui avaient juste une autre vision que la tienne de l'organisation de la société, de ce qui est acceptable ou non, des pratiques sociales à avoir ou non, etc., un peu comme le terrorisme, qui est l'expression violente d'une non acceptation de comportements et d'une organisation donnée de la société, alors ça doit bien fonctionner pour le citoyen ou autre. Ce système méritocratique pyramidal est problématique.
Et forcément que le pouvoir corrompt, forcément que ça amène à une forme d'excès de confiance. T'es en haut d'une pyramide d'un système d'exclusivité quoi ! T'es forcément une personne qui sort du lot, qu'est géniale ! Forcément qu'il y a une forme de « melon de l'autorité » : je suis reconnu-e par mes semblables et autres, je suis en haut du système, j'en impose.
De plus, la violence est la solution de facilité et elle défoule. Trouver des solutions dans l'éducation, la construction de tissu social, la réduction de la pauvreté, des inégalités, tout ça, c'est chiant, il faut réfléchir, ça prend du temps, ça demande des efforts, des budgets, ça ne produit pas un résultat qui se voit immédiatement de manière flagrante, qui peut être annoncé en fanfare, etc. Faire la guerre à la guerre, c'est clair, c'est direct, ça parle au bon peuple. Pourtant, il semblerait que le temps des attentats d'envergure préparés longtemps à l'avance soit terminé puisque Daesh demande aujourd'hui de ne pas rejoindre les fronts mais de punir les traites/infidèles sur place, dans leur voisinage. Or, il semble qu'on ne fait pas disparaître des thèses, des idéologies, des idées avec des balles. Qu'elles soient bonnes ou mauvaises, ça dépend du point de vue et de la temporalité, justement. Mais les guerres des USA n'ont pas gagné face aux idées d'Al-Qaïda.
Et puis il y a le cirque médiatique. Comment peux-tu / oses-tu être plus calme, plus posé que monsieur ou madame X, candidat-e à la présidentielle, éditorialiste, juge antiterrorisme ou autre qui sort des énormités dans la presse pour exister, pour vendre sa merde ou parce qu'il-elle pense sincèrement ce qu'il-elle pense (et il-elle en a parfaitement le droit) ? Tu passes pour un-e faible et/ou pour quelqu'un qui se moque des souffrances des proches des victimes : il faut agir, bouger, sur-réagir, encore une fois.
Enfin, il ne faut pas se voiler la face : nos politocard-e-s ont peur. Pas tellement d'être la cible d'un attentat, ils-elles ont le système de sécurité kiVaBien payé par la communauté. Mais plutôt peur de perdre les faveurs des électeur-rices et donc leurs postes et les avantages qui vont avec. C'est plus facile et plus vendeur d'expliquer à des proches de victimes, à une ville victime que l'on va riposter sévère plutôt que de dire qu'on va se poser, réfléchir aux racines du mal et du mal-être et appliquer des solutions réfléchies. Il faut du résultat, époustouflant, tout de suite, quel qu'en soit le coût. C'était tout ce qu'on entendait à l'Assemblée lors de la 4e prolongation de l'état d'urgence (voir http://shaarli.guiguishow.info/?e7fvFQ ) : les français-e-s veulent des résultats. Et c'est vrai que c'est ce que réclame une partie de la population. Une partie de la population à qui l'on devrait expliquer que ça ne fonctionne pas comme ça. Et c'est vrai que la sécurité est un principe auquel chaque citoyen-ne a le droit. Du coup, les politocard-e-s ne savent plus où se mettre, que proposer. Ils se sont mis dans la tête qu'ils-elles devaient protéger le bon peuple et ça ne marche pas. Quid de leur légitimité ? Il faut brasser du vent et sortir les crocs pour montrer qu'on est toujours là, sur le devant de la scène, plus fort que la tempête.
Si un nouveau système politique doit succéder à celui que nous connaissons, il devra forcément être tout sauf méritocratique et pyramidal/exclusif, c'est une certitude. Un système par tirage au sort ne remplit pas le deuxième critère : sur un tirage au sort quinquennal, la probabilité d'être tiré-e parmi 67 millions reste ridicule ! L'exclusivité est un problème. Et bien sûr, il faudra toujours le non-cumul des mandats (en parallèle et dans le temps). Et bien sûr, il faudra toujours des contre-pouvoirs de partout pour éviter les dérives. Ça, ça ne doit pas changer.