Le Parlement européen étudie depuis plusieurs mois une directive destinée à mettre à jour les textes européens sur la lutte contre le terrorisme. Après un vote en commission LIBE, la directive a été envoyée immédiatement en trilogue, réduisant ainsi, avec l'accord des députés, les capacités de débat démocratique sur un sujet pourtant sensible pour les droits fondamentaux. [...]
Le texte initial, basé sur un rapport parlementaire de Rachida Dati (PPE - FR) catastrophique pour les libertés d'expression et d'information, et pour la vie privée (interdiction de Tor, de VPN, responsabilité accrues des hébergeurs et des plateformes), a été finalisé très, sans doute trop rapidement par la Commission européenne pour répondre aux pressions de la France, suite aux attentats de Paris en novembre 2015.
[...] Mais de résistance il n'y a pas eu, et les députés ont voté presque unanimement un texte rédigé trop rapidement, sans étude d'impact permettant d'en mesurer l'effet sur les libertés. Même les rapporteurs des groupes Verts, ALDE et S&D, parfois massivement soutenus par leurs groupes politiques respectifs, ont accepté ce texte sans véritablement pousser à l'amender. Non contents de leur démission législative, ils ont aussi voté un mandat à la rapporteur pour négocier directement le texte avec le Conseil de l'Union européenne et de la Commission, sans que l'ensemble du Parlement n'ait pu se prononcer dessus. [ NDLR : en plénière, donc, la commission LIBE s'étant déjà prononcée ]
Si nombre des aberrations présentes dans le rapport Dati ont été retirées car impossibles à mettre en œuvre, la directive terrorisme reste un texte disproportionné [...]
Le texte de la directive manque de précision sur des termes pourtant clés et déterminants pour le périmètre des mesures ensuite votées : « apologie » et « glorification » du terrorisme, « radicalisation », sont des concepts qui demandent une marge d'interprétation la plus faible possible afin de ne pas entraîner un déficit de prévisibilité de la loi et de garantir le droit à la sûreté prévu par la Charte européenne des droits fondamentaux [...]
Le blocage de site et le retrait de contenu sans décision judiciaire a priori a été rajouté dans le texte par les eurodéputés à la suite des discussions en Commission LIBE [...]
- Le projet de directive prévoit que fournir un service en ayant eu la « connaissance » ou « l'intention » que ce service peut être utilisé par des terroristes rentre dans la définition « d'aide et de complicité ». Les différentes transpositions de cette disposition par les États membres pourraient mettre en danger les fabricants d'outils d'anonymisation et de protection de la vie privée en les rendant responsables de la manière dont auraient été utilisés leurs outils.
Pour les détails sur le contenu de la directive : https://wiki.laquadrature.net/Directive_Terrorisme