À 9 ans, à Faches-Thumesnil, dans le Nord, elle était bonniche, comme on disait alors ; à 10 ans, elle s’est enfuie de chez ses patrons ; et, à 12 ans, elle s’est syndiquée à la CGT. Après un tel début de vie, il est moins étonnant que Martha Desrumaux soit devenue une figure du Front populaire, du féminisme, de l’engagement et, aussi, du communisme.
Première femme élue au Comité central, elle aida, en 1939, à exfiltrer Maurice Thorez à Moscou. C’est elle qui, dès 1940, organisa le parti clandestin et la Résistance dans le Nord-Pas-de-Calais occupé. Elle qui, fin mai 1941, impulsa la grève, héroïque et méconnue, des mineurs qui stoppa la production de charbon destiné à l’Allemagne nazie. Le mouvement, qui dura dix jours, épiques, s’acheva avec la déportation de 273 meneurs. Martha est parmi eux. Elle a 44 ans.
A Ravensbrück, le camp de concentration réservé aux femmes, elle est la plus ancienne Française, et ses amies ont pour noms Esther Brun, Geneviève de Gaulle-Anthonioz ou Marie-Claude Vaillant-Couturier. Toutes ont loué sa solidarité et sa force téméraire : « Martha nous fut d’un grand secours. C’est elle qui, par son travail aux douches, nous procurait du linge propre, des bas, des chaussures et, surtout, des lainage, des robes et des manteaux… Martha était celle qui nous aidait le plus : elle avait tant d’amies dans le camp, tant de sympathies chez les prisonnières de toutes les nationalités… » a écrit Estelle [NDLR : coquille du Canard, il s'agit d'Esther Brun, pas Estelle].
« Elle arrivait à parler aux femmes, en dépit de la présence des SS, essayait de les aider à supporter le premier choc et de les avertir de ce qu’il fallait faire pour éviter l’extermination : ne pas se déclarer malade, ne pas montrer ses infirmités pour ne pas recevoir la carte rose, ne pas se dire juive », a témoigné Marie-Claude.
A son retour de déportation, en 1945, elle devient l’une des premières femmes députées. Aujourd’hui, une pétition circule, adressée à Emmanuel Macron, qui était mardi à Calais, demandant que Martha soit inhumée au Panthéon. On a déjà vu plus immérité !
Waouh ! :O
Dans le Canard enchaîné du 17 janvier 2018.