J'ai envie de revenir sur la réponse de la FFDN à la consultation du BEREC sur les lignes directrices de ce dernier concernant l'application du règlement européen sur la neutralité du net afin de voir ce que j'ai oublié ou compris différemment dans ma propre analyse et réponse (voir http://shaarli.guiguishow.info/?TlF70w ). Allons-y.
Sur certains sujets, notamment le zero-rating, les lignes directrices vont dans le sens "boarf, on attend des cas précis et pour chaque, on verra ce qu'on fait, si l'on en tire une règle commune ou non, etc". Ça laisse des zones d'ombre sur l'application du Règlement et ça suppose que le marché saura se réguler tout seul donc que les régulateurs nationaux n'auront pas à intervenir. C'est l'approche classique de la régulation mais elle n'est pas applicable ici : ce Règlement européen a vu le jour car le Parlement EU et la Commission EU ont bien vu que le marché ne pouvait pas traiter/résoudre les problèmes de neutralité. Le considérant numéro 3 explique d'ailleurs très bien que les régulateurs ont observé des mesures de gestion du trafic qui bloquent ou ralentissent des applis et services et que ces mesures impactent un nombre significatif d'utilisateurs !
Les mêmes règles s'appliquent mais se lisent différemment selon que le régulateur étudie le cas d'une grande société commerciale ou celle d'un particulier car le pouvoir de négociation lors de la souscription à un service d'accès à Internet n'est pas comparable entre ces deux entités. Il faut que les droits prévus dans le Règlement soient activés par défaut, sans que l'utilisateur final n'ait à faire de démarche comme téléphoner au SAV du FAI pour avoir le droit de fournir des services et applications depuis son service d'accès à Internet.
Le BEREC considère qu'un service d'accès à Internet est couvert par le Règlement européen seulement s'il est accessible à tout le monde, pas à un groupe restreint de personne. Donc le point d'accès WiFi d'un café ou restaurant n'est pas couvert puisque limité à un ensemble fini de personnes : les clients du lieu. On en déduit que c'est identique pour une université ou autre.
L'angle de lecture n'est pas bon : il faut plutôt se demander quel est l'usage normal de l'accès à Internet et la durée du contrat.
La temporalité du contrat, qui diffère entre une chambre universitaire et un café, permet quelques assouplissements : ne pas pouvoir distribuer du contenu depuis un café ou un restaurant car pas d'adresse IP publique, ce n'est pas forcément grave. Ne pas pouvoir le faire depuis une chambre universitaire, c'est problématique et c'est une infraction au Règlement.
Notons que, dans le cadre du café/restaurant/chambre universitaire, il n'y a pas un glissement des responsabilités : la société ou l'université reste responsable de son accès à Internet et de ce pour quoi il est utilisé. En revanche, quand il s'agit d'un accès à Internet comme dans une chambre universitaire, à domicile ou dans un café/restaurant, l'entité qui raccorde à Internet est un FSI donc elle n'est pas responsable des agissements de l'utilisateur final.
Le BEREC essaye de faire une différence sur l'endroit où se produit la mesure de gestion du trafic alors que ça n'a pas d'importance. Les deux éléments clés sont : qui active cette mesure et qui en a le contrôle. Une mesure peut très bien s'exécuter dans le réseau au lieu du terminal (utile pour préserver le forfait d'un ordiphone, par exemple) tant que c'est à la demande et sous le contrôle de l'utilisateur final. C'est ici, sur le paragraphe 75, que la FFDN fait entrer le blocage du port 25 (smtp, mail sortant). :)
Tous-toutes les citoyen-ne-s devraient pouvoir comprendre la neutralité du réseau, être en mesure de produire des données pour démontrer une atteinte et de faire remonter cela au niveau européen. Il faudrait un outil commun qui produirait des données comparables.