La promesse date de l’élection présidentielle : il s’agit d’offrir à tous les jeunes de 18 ans un Pass culture d’une valeur de 500 euros. Il doit leur permettre d’acquérir des places de cinéma et de théâtre, des CD, des DVD, des journaux ou des livres. Le tout grâce à un logiciel installé sur leur téléphone portable. Sur le papier, et sans compter l’informatique nécessaire, la note aurait dû s’élever à 500 euros que multiplient 800 000 jeunes, soit 400 millions d'euros.
Mais, comme l’a raconté « Le Canard » (11/7 ), Eric Garandeau, un inspecteur des finances qui gère l’opération pour le compte du ministère de la Culture, a trouvé une astuce à la hauteur de la facture. Le ministère ne financera sur son propre budget qu’une petite part de l’opération : à peine 80 millions d’euros. Le solde sera « offert » par les éditeurs, les producteurs ou les auteurs.
La lecture des circulaires adressées, cette semaine, aux éditeurs par le ministère de la Culture le confirme. Après leur avoir annoncé que la phase d’expérimentation allait débuter le 1er février dans cinq départements tests (Bas-Rhin, finistère, Guyane, Hérault, Seine-Saint-Denis) et concernerait 10 000 jeunes, ladite circulaire en détaille le fonctionnement.
Pour les éditeurs de journaux, « la presse est intégrée à la partie du Pass réservée aux offres culturelles numériques à côté de la VOD et de la musique, sous la forme d’abonnements. La fourniture des contenus par les éditeurs sera gratuite, mais cette gratuité ne sera toutefois pas communiquée à l’utilisateur, qui “achètera” l’abonnement numérique au prix de référence ».
Traduction, en clair, de ce jargon : les journaux sont priés de fournir gratuitement leur contenu numérique, mais pas question qu’ils l’avouent publiquement.
Le ministère de la Culture fera donc croire aux jeunes que c’est grâce à la générosité présidentielle qu’ils peuvent lire des journaux.
Être généreux et frimer avec l’argent des autres, c’est pratique…
Dans le Canard enchaîné du 9 janvier 2019.