Au procès du Mediator, les experts défendant l'inocuité du coupe-faim sont rémunérés par Servier. Plusieurs d'entre eux ne savent pas ce qu'est la norfenfluramine, le principe actif du médoc' qu'ils défendent. Guignols.
Enfin un peu de justice ! Après cinq semaines d’audiences accablantes pour Servier au procès du Mediator, des témoins en faveur du laboratoire ont défilé à la barre, la semaine dernière. Petite particularité ces témoins parfaitement objectifs étaient tous payés… par Servier ! Le laboratoire n’a pas trouvé de témoins gratuits ?
Comme l’a raconté « Le Monde » (2/11), Charles Joseph-Oudin, l’un des avocats des victimes, s’est amusé à poser la même question à chacun de ces 11 experts au CV ronflant, venus pour la plupart… des Etats-Unis : « Combien avez-vous été rémunéré par Servier pour votre travail ? » L’une, spécialiste de l’obésité, affrétée de Bâton-Rouge, a empoché « 600 euros l’heure ». Une autre, spécialiste du diabète à New York, a eu droit à « 500 euros l’heure », soit 25 000 dollars au total pour « un rapport, la préparation et le témoignage ». Quant à Jean-Pol Tassin, ancien directeur de recherche de l’Inserm, il a touché « 300 000 euros » environ de Servier depuis 2011. Le talent n’a pas de prix !
A la barre, tous ces experts de choc ont expliqué que le Mediator n’était même pas un anorexigène (un coupe-faim) et que Servier n’avait donc pas fauté en le laissant sur le marché quand les autres coupe- faim avaient été interdits, en 1997. Une thèse totalement démontée par les 700 pages de l’expertise judiciaire menée par des scientifiques indépendants. Mais nos pontes chouchous de Servier, eux, s’y connaissent beaucoup mieux.
Quand la présidente du tribunal a projeté la photo d’une valve cardiaque abîmée par le Mediator, l’un d’eux a été incapable de reconnaître ce qu’il voyait… « Et plusieurs ne savaient même pas ce qu’était la norfenfluramine (le principe actif dangereux du Mediator) ! daube Me Oudin. C’était un peu ridicule mais très révélateur de ce que Servier a fait pendant des années, en payant des experts et des leaders d’opinion. »
Vivement la suite du procès !
Dans le Canard enchaîné du 6 novembre 2019.