Y aurait-il anguille sous Roche, à l’Autorité de la concurrence, le gendarme chargé de lutter contre les pratiques déloyales des entreprises ?
Le 21 novembre, cette autorité administrative indépendante a lancé une vaste enquête sur le « fonctionnement de la concurrence dans le secteur du médicament et de la biologie médicale ». L’instruction, qui s’intéressera notamment « à la distribution des médicaments, au mécanisme de régulation de leurs prix, ainsi qu’aux opportunités de développement de l’activité des pharmaciens », devrait déboucher, d’ici un an, sur des recommandations aux pouvoirs publics « susceptibles de dynamiser la concurrence dans la distribution des médicaments et la façon dont leurs prix sont fixés ».
Or, et c’est là que la potion est amère, cette enquête hautement sensible sera menée par un service dont la cheffe, Sarah Subrémon — rapporteure générale adjointe de l’Autorité de la concurrence —, est accessoirement la femme de Michael Lukasiewicz, directeur médical du laboratoire pharmaceutique Roche !
La principale intéressée ne comprend pourtant pas le soupçon de conflit d’intérêts : « La décision de me confier le dossier s’est faite en toute transparence et avec l’aval de la présidence de l’Autorité. » On respire. D’ailleurs, « à la différence d’une enquête contentieuse, qui peut aboutir à sanctionner des entreprises, une enquête sectorielle se veut extrêmement générale, ne débouche que sur un avis consultatif et ne cible aucun acteur particulier ». Les recommandations promettent d’être explosives !
Cordonnier mal chaussé
Quant aux laboratoires, ce ne sont « que des parties prenantes parmi d’autres du marché du médicament ». A se demander s’ils jouent même le moindre rôle.
N’empêche : le fait de confier à l’épouse d’un haut dirigeant de laboratoire pharmaceutique une enquête — même non punitive — sur le secteur de la santé est une pilule que certains cadres maison ont bien du mal à avaler. « L’Autorité de la concurrence ne se prive pas pour donner des leçons aux entreprises, c’est même son cœur de métier, confie l’un d’eux, très remonté. Et ses membres ne sont même pas capables de comprendre lorsqu’ils se retrouvent dans une situation flagrante de conflit d’intérêts ? C’est à désespérer. »
A l’Autorité, qui combat les ententes (entre sociétés), celle qui règne entre collègues n’est pas toujours des plus cordiales…
Faites ce que je dis, pas ce que je fais, xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxe démonstration ?
Dans le Canard enchaîné du 29 novembre.