Complotistes de tous les bords, unissez-vous ! Jean-Luc Mélenchon, l’intraitable leader de La France insoumise (Lfl), prend furieusement la défense de Laurent Wauquiez, après la fuite dans la presse des propos flingueurs de ce dernier devant les étudiants de l’EM Lyon. Car les patrons de LR et Lfl ont un adversaire commun : le « parti médiatique », qui fait, comme de bien entendu, le jeu de Macron… De quoi réconcilier ces deux ennemis de classe !
Sur son blog « L’ère du peuple » (26/2) , Méluche vocifère donc contre la « pauvre cloche de journaliste à la manœuvre » qui a osé sortir le flingage en douce de tous ses petits camarades par Wauquiez. Et il se félicite que le patron des Républicains, en conflrmant ses propos sur BFMTV, ait « fortiflé son autorité » et se soit « débarrassé d’une nouvelle poignée de traîtres ». Attention, Lolo, il cherche à t’emmélenchonner !
A cette occasion, Méluche en remet une salve contre l’« équipe de bras cassés » de Radio France qui, sur demande de sa direction, bien sûr, a osé confirmer les dérives financières de sa campagne présidentielle. Et de dénoncer plus généralement les nuisances de la « CIA médiatique » : « Le métier [des journalistes], c’est d’empêcher les gens de penser et de les maintenir en rang dans le troupeau. » Autrement dit, « de détruire tous les autres “émetteurs” de pensée : parti, syndicat, autorité morale », etc.
Le fait est que la Commission des comptes de campagne a recalé 435 000 euros sur 10,7 millions de frais présentés par l’équipe présidentielle de Mélenchon. Tandis qu’un enquêteur, qui a démissionné, juge, lui, que 1,45 million de dépenses n’aurait pas dû être remboursé…
Selon « Le Parisien » (26/2), qui reprend l’enquête, l’équipe du candidat LFI n’a versé en salaires que 8 000 euros en tout et pour tout (1,7 million chez Macron !), mais il a abusé du statut d’autoentrepreneur, que Mélenchon dénonçait pourtant comme de l’« auto-esclavage » ! Le porte—parole de campagne Alexis Corbière a facturé ses passages télé aux frais du contribuable… L’association ad hoc L’ère du peuple a refacturé 263 000 euros au mandataire financier de la campagne des « prestations intellectuelles » réglées 59 000 euros aux intervenants… Ou encore l’agence Mediascop — dont l’actionnaire unique est Sophia Chikirou, la dircom’ de Mélenchon — a empoché 1,16 million d’euros, dont une partie nettement surfacturée par rapport à sa propre grille tarifaire…
On comprend mieux, dès lors, cet adage de Mélenchon : « La haine des médias et de ceux qui les animent est juste et saine. » D’ailleurs , Le Média (unique), la chaine de Mélenchon sur Internet, qui est précisément dirigée par Chikirou, vient logiquement de se séparer de sa présentatrice Aude Rossigneux. Laquelle avait notamment pour défaut d’être journaliste…
Dans le Canard enchaîné du 28 février 2018.