Sur la proposition de loi « Protéger les logements contre l’occupation illicite » (anti-squat 2023) du député Kasbarian, désormais loi 2023-668, j'avais lu tout et son contraire, avec une absence de nuance remarquable (mais coutumière).
Au final, il s'agit d'une énième loi chronique qui ne change rien. Loi de 2015, de 2020, et, désormais, de 2023. Hausse des amendes ou nouvelles amendes (notamment si aucun départ des lieux après le jugement d'expulsion)… pour un public qui, déjà, ne paye pas de loyer, ça s'annonce prometteur. Une réduction de complaisance des délais (8 semaines => 6 semaines, olala ça change vraiment tout… … …)…
Ce qui a fait grand bruit : l'annulation, par le Conseil constitutionnel, d'une dérogation, en cas d'occupation illicite, à l'obligation d'entretien et de l'exonération de responsabilité en cas d'un accident causé (surtout à un tiers genre un passant) en cas de défaut d'entretien. On revient donc au droit actuel : le propriétaire est responsable des accidents causés par sa ruine. Ça ne donne pas droit au locataire de porter plainte pour de petits travaux. Bref, l'extrême-droite a hurlé au loup pour rien.
Un domicile est désormais tout local meublé, occupé ou non par le proprio des meubles (mais, pour le Conseil constitu, le juge devra apprécier si la présence des meubles permet au requérant de prétendre qu'il s'agit de son logement, donc le débat infini sur domicile ou non, résidence principale ou secondaire, etc. n'est pas terminé). Les domiciles bénéficient d'un allégement de quelques contraintes (délais, procédures, etc.), notamment la procédure administrative d'expulsion (cf. ci-dessous) leur est ouverte.
L'occupation illégale (et les sanctions attenantes) concerne désormais tout local (commercial, agricole, professionnel), pas juste les habitations. Les syndicats de salariés ont gueulé… Mais « le droit de grève n'[ a jamais ] emporté celui de disposer arbitrairement des locaux de l'entreprise » (source). Donc je peine à voir la différence… Facilitation de la répression ? Basculement du droit d'exercer son industrie à celui de droit de propriété ? À voir / suivre.
L'introduction d'une infraction pour propagande / publicité facilitant le squat ou incitant au squat, me dérange. Comme avec l'apologie du terrorisme ou la consultation de sites terroristes, on est dans la morale, dans le délit d'opinion. Je peux me renseigner (ou publier des infos) sans passer à l'acte, quoi. Qu'est-ce que l'incitation au squat ? Où est la limite avec une revendication politique d'occupation par absence d'expropriation publique des logements vacants & co, c'est-à-dire la contestation concrète d'une orientation politique ?
J'ignorais que l'on peut demander à l'autorité administrative (préfet), de procéder à l'expulsion forcée d'un domicile. :D Bon, il faut accomplir au préalable les démarches habituelles (dépôt de plainte, etc.) et le préfet n'a aucune obligation de donner suite, mais c'est l'une des procédures possibles. La loi 2020-1525 d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP) est encore renforcée par la loi anti squat 2023 (décidément, nos lois sont hyper renforcées, dis donc…).
Lors du ramdam autour de ce type de lois, on parle rarement des propriétaires abusifs ou des fausses histoires d'occupation illicite relayées par les médias.