Ce projet de loi sera examiné en séance plénière de l'Assemblée à partir de demain, lundi 21 mars, jusqu'à mercredi 23 mars.
Il y a du bon et du moins bon dans le texte issu de la Commission culture sans compter les points cruciaux qui n'ont toujours pas été abordés. Il me semble donc important d'envoyer un mail à mes député-e-s pour faire le point.
Voici ce que j'ai envoyé :
« *Cette semaine*, le projet de loi relatif à la *liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine* est en examen en *séance plénière*.
Le *texte issu de la Commission culture amène des changements salutaires* comme la *suppression de l'article 10 quater* (l'indexation d'œuvres photographiques par des moteurs de recherches sur le web ne donnera pas systématiquement le droit à une compensation via des accords privés avec les SPRD) et l'ajout d'une précision à *l'article 7 quater* (l'affectation des recettes de la RCP sera désormais publique, accessible en ligne, dans un format ouvert et facilement réutilisable, régulièrement mis à jour). Il convient de *conserver ces changements*.
En revanche, nous avons *perdu un acquis du Sénat* : la clause de l'*article 7 bis* qui prévoit que *TOUS les membres de la commission copie privée soient soumis à une déclaration d'intérêts ainsi que la publication du règlement intérieur* de la commission. Le premier point semblait ennuyer les ayants-droit avant l'examen par la Commission culture donc ce n'est pas une surprise... *Il faut impérativement réintroduire ces deux clauses*.
De plus, les *points suivants demeurent insatisfaisants* :
* L'article 7 bis AA *n'impose plus le Cloud* (le stockage distant en ligne de manière générale) *à la redevance copie privée*. Cela doit demeurer, *il ne faut pas revenir à une tournure floue* telle que « Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique au moyen d'un matériel de reproduction dont elle a la garde » (souhaitée par les SPRD) *qui pénaliserait les usagers et les usages innovants*. Concernant *l'imposition des magnétoscopes en ligne*, un point de doute demeure : *faut-il permettre une compensation sur un préjudice pas encore établi* ? *Aucun étude d'usage* n'a été réalisée permettant de *connaître la fréquentation des magnétoscopes en ligne* ni si *ces usages dépassent le seuil de marginalité* qui justifie une compensation. Je suis donc critique sur cet article.
* L'article 7 ter : ce n'est pas à la *HADOPI de réaliser les études d'usages qui servent à fixer le barème de la RCP en échange d'un versement* de 1 % des sommes collectées ! *Problème d'indépendance* (d'autant plus que son budget est raboté). Une meilleure approche me semble être de suivre le rapport Maugüé qui préconise que des *experts soient choisis parmi les membres de la Cour des comptes, de l’Inspection générale des finances* de l’Inspection générale des affaires culturelles, ou du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies.
* L'article 7 bis : *les 3 représentants des ministères culture, industrie et consommation qui participeraient aux travaux de la commission copie privée sont inutiles* car leur *avis sera consultatif*. Une *meilleure solution consiste à rendre la composition de la commission paritaire* (1/3 des membres par collège) ou, *à défaut*, à faire *fixer le cahier des charges des études d'usages par les conseillers d'État* dont il est fait mention dans la version Sénat de cet article.
* L'article 32 : la *dégradation de biens culturels publics* y compris de lieux de culte est *déjà sanctionnée par le 3 de l'article 322-3-1 du Code Pénal*. De plus, bien que les lieux de cultes fassent partie du patrimoine culturel, objet de ce projet de loi, la *question précise du renforcement de la protection des lieux de cultes devrait être étudiée séparément* pour faire le tour de la question avec les experts compétents sur ce sujet, qui ne s'intéressent pas aux questions culturelles générales, à mon avis.
Enfin, ce projet de loi *passe toujours à côté de l'essentiel* :
* Il convient de *protéger les ressources communes appartenant au domaine public contre les pratiques détestables d’appropriation*. Une tentative de définition[1] dans l'avant-projet de loi République numérique a été avortée sous l'action conjointe du CSPLA et du SNE. C'est inacceptable !
* Il convient également *d'autoriser*, comme exception au droit des auteurs, *les reproductions et les représentations d’œuvres artistiques, architecturales et de sculptures placées en permanence sur la voie publique et les lieux ouverts au public*. L'article 18 du projet de loi République Numérique définit cette liberté d'une *manière contraignante qui en interdira toute jouissance* (réservée aux particuliers, sans but lucratif et voie publique uniquement) sans compter que l'absence de socle juridique (une définition du domaine public informationnel) ruinera cette définition.
* *D'une manière générale*, il faudra *réfléchir à repenser intégralement la redevance copie privée* :la copie privée ne nuit pas aux artistes, l'intégralité de tous les supports de stockage ne servent pas à réaliser des copies privées, les professionnels n'arrivent pas à se la faire rembourser, les 25 % de redistribution servent de levier pour faire adopter des textes dans notre Parlement de l'aveu même de Jean-Noël Tronc. Il faudra également réfléchir à *libérer la création* : rémunération équitable des artistes à l'ère numérique, supprimer les délais de rétention entre diffusion au cinéma et VOD/TV/sortie en DVD, clôturer le gaspillage HADOPI comme le Président s'y était engagé. Mais je suis conscient que tout cela est trop ambitieux pour ce projet de loi.
Cordialement. »
Sources utiles pour écrire ce shaarli :
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http://www.numerama.com/politique/153254-non-les-deputes-nont-pas-vote-de-taxe-copie-privee-pour-le-cloud.html
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https://www.nextinpact.com/news/99113-copie-privee-extension-redevance-aux-magnetoscopes-virtuels-adoptee-en-commission.htm