CETA = accord de libre échange (comprendre : bien libéral comme il faut) entre le Canada et l'Union européenne. Une sorte de pré-TAFTA qui est un accord de libre échange entre les USA et l'UE. Les deux ont des points communs comme d'être négociés dans le secret avant d'arriver dans les Parlements, de remettre en cause la souveraineté des États et le Droit propre à chacun. J-O-I-E.
« Certes, le Ceta doit encore être traduit dans les 23 langues officielles de l’Union, puis obtenir le feu vert du Parlement européen, [ NDLR : du Conseil de l'UE, c'est-à-dire des ministres des 28 États membres… ], des 28 Parlements des Etats membres [ NDLR : uniquement si l'accord est décrété mixte (aka un accord qui touche aux compétences de l'UE *ET* des états membres) par la Commission européenne) et du Parlement canadien. Mais ce processus pourrait être entravé.
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Pourtant, à en croire la Commission, le Ceta stimulerait la croissance. Pas tant grâce à l’abaissement des barrières douanières, dont le niveau est faible (5 % en moyenne). Mais via la convergence des normes industrielles, sanitaires, phytosanitaires ou environnementales. Il s’agit aussi d’ouvrir en grand les marchés publics aux entreprises européennes et canadiennes, d’harmoniser les normes dans les services financiers, les télécommunications, l’agriculture… «Ils n’ont rien oublié», résume l’eurodéputé José Bové.
[...] les indications géographiques (Grana Padano, Roquefort…) ne pourront être utilisées au Canada que pour les produits importés des régions européennes d’où ils sont traditionnellement issus. [ NDLR : sauf que seulement 176 sur 1400 AOP ont été retenues et que les autorités canadiennes ont indiqué qu'elles ne veilleront pas à leur respect sur le territoire canadien. Le problème est que les AOP restantes subiront la concurrence canadienne directe avec des normes de production inférieures. ]
[ NDLR : Dans la même veine, les IGP (Indication Géographique Contrôlée ne sont plus garanti en totalité genre des matières premières ne sont pas obligées de provenir du territoire géographique de l'IGP et pourront donc être importées. ]
En échange, l’Europe a autorisé l’importation de plus de 50 000 tonnes de viande de bœuf (près de 1 % de la consommation globale du continent) [ NDLR : + 75 000 tonnes de viande porcine selon le Canard ]. A condition qu’il soit élevé sans hormones [ NDLR : ce dont doute le Canard Enchaîné du 25/05 puisque les fermes-usines sont fort nombreuses au Canada. De plus, la France est déjà dans un état de surproduction porcine (voir
http://shaarli.guiguishow.info/?yNJOrg ) ! ].
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Mais cette avalanche de chiffres est loin de tempérer l’exaspération des ONG ou des syndicats qui craignent la généralisation des tribunaux d’arbitrages (les ISDS) pour régler les différends entre Etats et entreprises. [...] Karine Jacquemart, directrice générale de Foodwatch France : «Il est hors de question que des entreprises dictent leurs lois à des Etats souverains… Et c’est pour cette raison que la France a plaidé, et obtenu, une rénovation de l’approche de la protection des investissements», corrige-t-on à Paris.
En février 2016, Ottawa et Bruxelles ont finalement décidé d’enterrer les ISDS. Terminé, ce système de règlement des différends assuré par des arbitres privés. Finies, ces procédures arbitrales à huis clos. L’ISDS est mort, vive l’ICS, pour Investment Court System. La différence ? Les discordes seront traitées par une cour permanente, à double degré de juridiction, où siégeront 15 juges, et non plus des arbitres. Surtout, les arbitrages seront rendus publics. «De plus, les émoluments ne seront pas versés par les entreprises,se félicite-t-on à Paris. Ottawa et Bruxelles mettront la main à la poche pour rétribuer ces juges d’un nouveau genre.» Pas de quoi rassurer les détracteurs du Ceta, qui parlent d’un tour de bonneteau. Plusieurs organisations, dont la fondation Nicolas Hulot et Foodwatch, ont appelé les Etats de l’UE, le 29 avril, à rejeter le Ceta, «cousin canadien du Tafta qui présente les mêmes dangers». Comme le relève Karine Jacquemart, si le nouveau mécanisme de règlement des différends n’a en apparence rien à voir avec l’arbitrage privé, «pour autant, ce n’est pas un tribunal public. Ce ne sont pas des juges, car ils ne dépendent d’aucune magistrature de supervision indépendante. Ces pseudo-juges seront des avocats d’affaires liés à des cabinets privés.» Bien sûr, ils toucheront un salaire public, autour de 2 000 euros. De quoi provoquer rires et railleries. «C’est une blague ? Qui peut imaginer que ces faux juges se contenteront de si peu, alors qu’ils empochent d’ordinaire des dizaines de milliers d’euros pour n’être que de simples conseils en droit des affaires ?» ajoute la directrice de Foodwatch. Pas question pour Bruxelles et Ottawa d’interdire à ces «juges» d’exercer la profession d’avocat d’affaires pendant cinq ans avant et après leur mandat.
Pas plus qu’il ne s’agit de remettre en cause le «forum de réglementation renforcée». Selon José Bové, «tout ce qui n’aura pas été discuté dans le traité pourra l’être, par la suite, dans ce cadre-là». Voilà pourquoi le Ceta est qualifié de «traité vivant». La directrice de Foodwatch : «Qui trouvera-t-on en arrière-plan de ce forum permanent où sont censés discuter les représentants des deux blocs commerciaux ? Des entreprises qui feront du lobby pour détricoter des normes sociales ou environnementales. Elles le font déjà à Bruxelles pour influencer la Commission.» »
J'ajoute ces éléments relevés par le Canard du 25/05/2016 :
* Le principe de précaution n'est pas reconnu au Canada donc l'UE et ses autorités (nationales et européennes) ne pourront pas retoquer un produit au nom d'un éventuel risque, il faudra de solides preuves que le risque est avéré.
* Près de 81 % des firmes qui ont un pied en UE, ont aussi un pied au Canada. Au travers des filiales canadiennes, ces firmes pourront attaquer les attaques via les tribunaux arbitraux avant que TAFTA entre en application.
* Une fois que le Conseil de l'UE et le Parlement européen auront décidé que le CETA est ratifié, il peut être appliqué 3 ans. Et que les firmes pourront utiliser les tribunaux d'arbitrage pour se plaindre pendant que l'accord est temporairement actif et même pour des faits survenus 3 ans après la fin de l'application provisoire, même s'il n'est pas appliqué ensuite car retoquer par les parlements nationaux (si l'accord est jugé mixte, voir plus haut).
Les élus de la France font mine de ne pas vouloir du TAFTA mais se disent prêts pour ratifier le CETA (
http://www.liberation.fr/planete/2016/05/26/hollande-et-trudeau-appellent-a-mettre-en-oeuvre-l-accord-de-libre-echange-ue-canada_1455396 )… Absence de cohérence et enfumage en vue (si CETA passe, pas besoin de TAFTA puisque 81 % des sociétés commerciales qui profiteraient de TAFTA profiteront de CETA ;) ).
Voir aussi
https://france.attac.org/se-mobiliser/le-grand-marche-transatlantique/article/apres-le-ttip-leaks-faire-echec-a-ceta et
http://transatlantique.blog.lemonde.fr/2016/02/19/laccord-ceta-europe-canada-sera-t-il-applique-avant-meme-le-feu-vert-des-parlements/