Certes, les Français se sont donné un ex-banquier comme chef de l’Etat, mais depuis quand revient-il aux banques de décider qui se présente aux élections en fonction de ce qui sert, ou pas, leur image et leur compte de résultat ? Quand la démocratie devient l’otage des banques, l’incitation aux braquages n’est pas loin !
Elles n’aiment pas les petits qui n’ont pas le sou parce qu’elles craignent de ne pas rentrer dans leurs frais, elles ne goûtent pas les extrêmes, qui font peur aux braves gens, parce qu’elles redoutent d’abîmer leur image. A ce rythme, il va bientôt falloir annuler les scrutins, faute de candidats.
L’argent n’a pas d’odeur, mais les prêteurs prétendent avoir du nez. Résultat, ils ne prêtent plus à grand monde, sauf au respectable parti du Président ainsi qu’au PS et à LR, parce qu’il y a encore peu ils étaient à l’Elysée. En revanche, tous ceux qui ne sont pas assurés d’obtenir 3 %, le minimum requis pour être remboursé de ses frais de campagne par l’Etat, sont priés d’ aller mendier ailleurs. Le pauvre Benoît Hamon en a fait les frais (bancaires), sommé d’hypothèquer ses biens personnels et d’avoir trois sondages au-dessus de 7 % pour toucher une obole. Il n’est pas le seul. Le très centriste Jean-Christophe Lagarde voulait emprunter 1,5 million d’euros, il n’a eu droit à rien. L’UDI apportait 56 parlementaires en garantie (une manne annuelle de plus de 2,1 millions), les banques lui ont expliqué qu’elles craignaient la dissolution. Au guichet de la mauvaise foi, elles sont sans rival…
Pour les partis qui n’ont pas de parlementaires, c’est pire. Le NPA de Philippe Poutou a dû renoncer à se présenter, carrément. La campagne de souscription n’a pas permis de réunir le million d’euros nécessaire. Mélenchon a eu plus de succès. Mais revient-il au militant de se saigner pour voir en piste le candidat pour lequel il souhaite voter ? A chaque élection, les Le Pen se plaignaient de devoir faire le voyage à Moscou pour trouver de l’argent, comme autrefois les communistes. Ils n’en ont plus le droit. Personne ne le regrette, mais à quoi rime l’idée de ne pas leur avancer le pognon que l’Etat, de toute façon, remboursera à un parti assuré d’obtenir près de 20 % des voix ?
Qu’on ne compte pas sur les banques pour favoriser l’offre électorale et la vie démocratique, elles ne se font pas payer pour ça.
François Bayrou, en son temps, avait proposé de créer une « banque de la démocratie » pour pallier l’impéritie de celles en place. Il en avait même fait une condition pour rallier Macron en 2017. Macron avait topé, la loi a été votée, et la mesure a été… abandonnée.
Et le grand débat ne lui a pas encore redonné du crédit, c’était bien la peine.
Problème pas nouveau mais je trouve intéressant de s'y replonger.
Dans le Canard enchaîné du 10 avril 2019.