Lire l'étiquette d’un vêtement avant de l’acheter est devenu une habitude, histoire de ne pas enfiler trop facilement ce joli tee-shirt bariolé cousu par des esclaves à l’autre bout du monde. Souvent, aussi, la question se pose : mais, au fait, combien gagne l’ouvrier qui a assemblé cette petite robe fleurie ?
Le 7 mai, le Centre Stern pour les affaires et les droits de l’homme de l’université de New York a répondu à cette question. Et le résultat de son rapport est glaçant. Bien loin derrière la Chine, qui paie ses petites mains 326 dollars mensuels, le Kenya (207) ou le Bangladesh (95), l’Ethiopie emporte la palme des ouvriers du textile les plus mal payés du monde, avec un salaire moyen équivalent à 23 euros mensuels.
Et que les grincheux ne viennent pas expliquer que cette aumône est en rapport avec le coût de la vie, car, note encore ce rapport, même en Ethiopie, cette somme « ne suffit pas pour vivre » (« Le Point », 8/5).
Ce qui explique que les ouvrières, jeunes paysannes venues à la ville pour la plupart, quittent leur atelier au bout d’un an, épuisées par les conditions de travail et les grèves incessantes, et dégoûtées par leur semblant de revenu.
Ces parcs industriels, qui emploient 70 000 personnes, ont attiré 2,5 milliards de dollars d’investissements étrangers directs (Chine, Inde) au cours de ces neuf mois. Et l’exportation du « made in Ethiopia » rapporte chaque année 103 millions de dollars de devises au pays.
Le nom des marques qui ne répugnent pas à sous-traiter avec Addis-Abeba ? Guess, H&M, Calvin Klein, notamment. Mais difficile de remonter la piste jusqu’aux ateliers de misère.
Sur le site de vente H&M, par exemple, et alors que la marque suédoise se fait fort d’informer sa clientèle de la provenance d’un pull ou d’un chemisier, la Chine, la Roumanie, la Turquie, la Birmanie ou le Cambodge se bousculent, au milieu de quelques articles mystérieux sobrement estampillés : « Malheureusement, les informations relatives aux fournisseurs et aux usines de fabrication ne sont pas disponibles pour ce produit. »
C’est ballet, ça…
J'en étais resté à l'Ouzbekistan et la collecte du coton sous forme de travail forcé par la dictature…
Puisque les salaires ont diminué, les prix de vente auraient dû diminuer… ou alors la richesse a été captée en chemin, par des actionnaires, par exemple, mais je n'ose y croire, cette sauvagerie ne peut pas avoir cours dans un système capitaliste. De même, tout cela fait écho à notre industrialisation au 18e siècle : ils exploitent des femmes (les hommes préférant posséder la terre, travailler au plein-air, hors des contraintes idiotes des possédants), qu'ils font venir à la ville (où elles sont désorientées, mises en concurrence, etc.), à qui ils construisent des villes ouvrières, etc. Bref, on retrouve toute l'analyse de Marx…
La chaîne d'exploitation de l'homme par l'homme m'effraie… L'occident exploite la Chine, l'Inde, le Bangladesh, etc. qui, eux-mêmes, exploitent l'Ouzbekistan et l'Éthiopie…
Dans le Canard enchaîné du 15 mai 2019.