Les femmes ont une prostate. Ça vous la coupe ? C'est vrai pour la moitié d’entre elles au moins. Comme pour tout ce qui touche à l'anatomie féminine, on s'est longtemps fourvoyé sur le fonctionnement des glandes para-urétrales, petit nom donné a cette prostate, et sur l'éjaculation des femmes. Deux études récentes permettent d'y voir plus clair.
On sait peu de choses sur ces glandes découvertes à la fin du XIXe siècle, situées le long de l'urètre et considérées comme un reliquat embryonnaire. En 2011,des chercheurs décident d'aller y voir d'un peu plus près. Las, seule une femme sur deux aurait les glandes. On a cru qu'elles étaient à l'origine de l'abondant liquide produit par les femmes fontaines. Or, elles sont si minuscules, 2 a 3 grammes contre 20 a 30 pour leurs collègues masculines (oui, les hommes ont la plus grosse !), qu'il leur est impossible de sécréter un éjaculat pouvant atteindre 300 millilitres, presque l'équivalent d‘une canette de soda. Sa qualité de fontaine donne à Amélie, 37 ans et escort de profession, une « sorte de pouvoir sur les hommes. » Elle ne compte plus les messages de clients qui veulent « s'abreuver à sa source ». Si l'on ne peut nier le potentiel poétique de la femme fontaine, elle n'est pas aidée par le porno qui véhicule une image fausse de l'éjaculation féminine. Non, ces ondées qu'on peut voir dans les films de boules ne sont pas des éjaculations. Très souvent, il s'agit juste une giclée maîtrisée d’urine. Appétissant si, comme Trump, on est fan de golden shower, mais là n'est pas le sujet. On ne peut parler d'éjaculation que pour le liquide infime émis par les glandes para-urétrales.
Alors, les femmes fontaines ne seraient-elles qu'un mythe ? Non, elles existent bien, mais le jet qui les caractérise vient d’ailleurs. Samuel Salama et Pierre Desvaux, des chercheurs français, ont décidé d'étudier ce phénomène en échographiant des femmes se disant fontaines. Ils ont ainsi remarqué que la vessie, même après avoir été vidée juste avant le rapport sexuel, se remplissait rapidement de liquide pendant celui-ci. Un liquide qui se déverse au moment de l'orgasme. « Mais ça n'a ni la couleur, ni l‘odeur de l'urine », explique Cléo, 34 ans, qui a récemment découvert son don. En effet, le liquide arrive si vite dans la vessie qu'il n'a pas le temps de prendre toutes les caractéristiques de l'urine. Ce n'est donc pas de l'incontinence, simplement une aptitude qui repose sur des paramètres physiologiques et psychologiques. Toutes les femmes en seraient capables mais, seules 10 a 40 % y arrivent. Cléo est très à l'aise avec sa sexualité mais, il y a cinq ans, elle s'enlisait dans une relation avec un conjoint peu porté sur la bagatelle. « La première fois, ça m'est arrivé alors que je me masturbais, après avoir compris et admis que j'aimais le sexe et ne pouvais pas m'en passer. » Et de préciser que ça n'a rien a voir avec l'intensité de l'orgasme car, depuis, sa fontaine a jailli deux autres fois, au cours de « baises pas géniales mais pas désagréables ». Si l‘on ne peut choisir le moment du jaillissement, on peut tenter de le contrôler en apprenant à connafire son corps. De nouveaux gourous proposent des stages pour s'entraîner à devenir femme fontaine, surfant sur la culpabilité qu'on impose à celles qui ne sont pas capables de se relâcher assez pour déverser des torrents de jouissance.
Dans le numéro de mai 2019 de Siné Madame.