Une ex-lobbyiste comme directrice de cabinet du patron de l'ANSES.
Priée de préserver une totale indépendance vis-à-vis des lobbys, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) vient d’opérer un choix éloquent ! Cet organisme, chargé d’évaluer la dangerosité des pesticides, des perturbateurs endocriniens ou des colorants alimentaires, a engagé une directrice de la communication qui a travaillé quatorze années durant pour deux agences de com’ et de lobbying. Avant son dernier poste à l’Unédic, cette recrue, Sophie Le Quellec, phosphorait pour i&e et Burson-Marsteller, qui avaient pour clients Coca-Cola, findus, Danone, Total ou encore Bayer et Monsanto…
Placée à un poste clé de l’Anses, Le Quellec dirigera aussi le cabinet du patron de l’Agence. « C’est incroyable de recruter un profil pareil, au moment où on doit être exemplaire sur le glyphosate et sur d’autres produits, et n’alimenter aucun soupçon de conflit d’intérêts », s’étrangle un cadre interne. L’intéressée, elle, assure au « Canard » avoir « surtout travaillé [dans ses anciennes boîtes] pour des clients publics comme l’Agence de la biomédecine ».
Mais pas que. Après une campagne anti-OGM et le démontage du McDo de Millau (1999), Sophie Le Quellec avait, par exemple, participé, au début des années 2000, à une opération de com’ commanditée par un consortium d’industriels — dont Monsanto — visant à redorer le blason des OGM… Un « atout », affirme-t-elle : « J’ai observé des points de vue très divers et je sais accueillir la complexité (sic) des sujets. »
Une qualité indispensable pour faire une bonne analyse ou, comme on dit chez Monsanto, un bon roundup des situations…
Éternel débat… Les personnes qui ont bossé dans l'industrie sont les mieux à même d'en exposer les combines au régulateur… ou de le véroler. C'est l'effet miroir du pantouflage qui permet aux industriels de comprendre le fonctionnement des institutions… ou aux services de renseignement d'avoir des informateurs.
Dans le Canard enchaîné du 12 juin 2019.