Avant de conquérir le fauteuil de Pierre Gattaz à la présidence du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux se targuait d’être un bouffeur de syndicalistes. Mais, à peine intronisé, le 3 juillet, il commençait à les cajoler ! **François Hommeril, l’intransigeant patron de la CFE-CGC, le rencontre une fois par mois. Mieux : l’homme, qui a longtemps fait campagne pour que le Medef déserte tous les organismes paritaires, veut désormais sauver l’assurance-chômage de l’étatisation macronienne.
Du beau, du bon, du Béré
Face à la « nationalisation rampante » que, selon lui, prépare l’Elysée, le nouveau patron du Medef propose un système hybride : l’Etat créerait un régime de solidarité financé par la CSG, au côté duquel subsisterait une assurance complémentaire obligatoire, payée par les entreprises et « gérée par les partenaires sociaux ». Une Unédic bis serait donc cogérée uniquement par les partenaires sociaux et financée par les seules cotisations, sans que l’Etat y mette son nez. A côté du système de base voulu par Macron, l’ensemble du dispositif ressemblerait à la réforme mise en place en 1984 par Bérégovoy, alors ministre des Affaires sociales, et supprimée par Chirac deux ans plus tard. Curieuse référence, pour un libéral radicalisé…
En privé, le patron de FO, Pascal Pavageau, voit dans cette proposition du Medef la main d’Emmanuel Macron, qui chercherait à sortir du bourbier dans lequel il s’est mis tout seul.
Son collègue Hommeril est d’un autre avis : « C’est un moyen de régler notre problème avec l’Etat, lance-t-il. Avec l’Unédic, les partenaires sociaux affichent un bon bilan, car le régime serait équilibré sans une dette que l’Etat a contribué à creuser. »
Une allusion à la tonte du régime d’assurance-chômage à laquelle les gouvernements procèdent chaque année afin de financer Pôle emploi.
Il n’est donc pas sûr que l’Etat se passe d’une telle vache à lait. Edouard Philippe donnera sa réponse à la fin de la semaine au terme d’un « symposium » avec les syndicats et les patrons.
En attendant, le président du Medef, ancien des commandos de marine, propose à ses nouveaux amis syndicalistes un kit de survie en milieu hostile. Aux armes !
Dans le Canard enchaîné du 19 septembre 2018.