« Les impôts locaux « ont quintuplé en trente ans » ; telle est la première conclusion de l’étude rendue publique par La Banque postale, le jeudi 20 juin. Ses conclusions, passées inaperçues dans la presse, à l’exception de « L’Opinion » (21/6), expliquent pourtant le ras-le-bol fiscal qui s’est emparé de bien des contribuables hexagonaux.
De 1986 à 2018, la part de la fiscalité locale est passée de 10,4 % à 14,8 % du total des prélèvements obligatoires. Cette explosion s’explique évidemment par les lois successives de décentralisation et les transferts par l’Etat de nombreuses dépenses qu’il prenait auparavant en charge, mais aussi par l’intercommunalité qui devait faire baisser les dépenses des communes mais qui, dans la plupart des cas, les a au contraire multipliées, de même que les charges de personnel. A preuve, ce seul pourcentage : depuis 2011, les prélèvements des collectivités locales ont progressé en moyenne de 3 % par an. Et même de 4 % sur les quatre dernières années.
Jusqu’en 2010 — année de sa suppression —, la taxe professionnelle, payée par les entreprises, avait, elle, augmenté de 60 %, et, depuis son abrogation, les impôts locaux payés par les sociétés de 22 %.
Faut—il rappeler que les impôts locaux, qui ne tiennent que très partiellement compte du montant des revenus des ménages, sont beaucoup plus injustes que l’impôt sur le revenu ou les cotisations sociales ? Mais, avec la suppression promise par Macron de la taxe d’habitation, la France va sûrement se doter d’un système de financement des collectivités locales aussi simple que juste. Promis, juré, craché !
Il faut dire que la décentralisation, c'est moins de contribuables pour payer la même chose, donc forcément, le montant payé par chaque contribuable est plus élevé. Avant, et en simplifiant, il y avait un budget national dédié à la culture, par exemple, financé par 67 millions de personnes. Il était ensuite réparti en fonction des besoins, donc les lieux culturels bien-portants étaient ignorés, et les lieux culturels mal en point étaient financés. Désormais, il faut financer les activités culturelles d'ordre national (celles qui ne peuvent pas être rattachées à un lieu précis), et les activités culturelles de son lieu de résidence. Forcément, il y a moins de contribuables pour payer la note puisque c'est l'activité culturelle du coin, donc elle est annexée sur le nombre d'habitants. Forcément, le montant par tête est plus élevé, surtout dans les petits bleds, ce qui favorise les métropoles surpeuplées. Et forcément, certains territoires précaires ne parviennent pas à leurs fins, donc les contribuables ont l'impression de se faire arnaquer alors que c'est lié à la disparition du système de péréquation national.
L'autonomie ne fait pas tout.
Dans le Canard enchaîné du 26 juin 2019.