Je ne sais pas trop pour quelles raisons tu cites mon shaarli, qui date de 2016, mais soit.
Le numéro 22 de La Revue Dessinée (ce que j'en retiens) évoque justement cette expérience et le livre qui la conteste auquel tu fais référence. Dans ce qui suit, je vais beaucoup m'appuyer sur ce numéro de LRD.
Pour ma part, je suis mitigé.
Oui, Zimbardo aurait eu des convictions qui lui viendraient de son enfance dans le Bronx où il se serait intensément interrogé sur "l'origine du mal" en vivant la violence quotidienne de cet arrondissement de New-York. Il a aussi été influencé par la fin des années 60, le début des années 70, la violence institutionnelle de l'armée américaine et de tout l'appareil d'État, notamment au Vietnam. Bref, il aurait orienté son expérience pour servir l'une de ses croyances, en quelque sorte. Fort bien, la psychologie expérimentale peut entraîner des conclusions subjectives, contrairement aux sciences dures.
Oui, il y a eu une scénarisation de l'expérience : le fait que Zimbardo joue le directeur de la prison, le fait de prétendre que c'est sa collaboratrice / petite amie qui l'a ramené à la raison et lui a fait stopper l'expérience, etc. Quel impact concret cela a-t-il eu sur l'expérience ? On relate aussi que Zimbardo a orienté les comportements des cobayes, notamment en étant lui-même le directeur de la fausse prison et en avalisant implicitement, par ce biais-là, le choix fait par les cobayes gardiens de recourir à une escalade de la violence afin d'assouvir leur besoin d'autorité. Je m'interroge : la hiérarchie pénitencière et la hiérarchie policière n'en font-elles pas tout autant ? N'orientent-elles pas les comportements des flics et des matons ? De part leurs discours, les hauts-gradés, notamment le sinistre de l'Intérieur, n'avalisent-ils pas des comportements détestables des flics ? Donc, pour moi, cela n'est pas un argument suffisant pour réfuter Zimbardo.
Des expériences ultérieures mieux bâties ont confirmé certaines des conclusions de l'expérience de Zimbardo. Exemple : en 2010, celle de Campbell-Meiklejohn, à Cambridge, montre que la soumission à une opinion majoritaire active le système de récompense de notre cerveau. Donc l'obéissance dans les pires actions trouve bien son origine, en partie, dans l'environnement (l'idée majoritaire), ce qui va dans le sens de Zimbardo et de son "il n'y a pas de mauvaises personnes, juste des personnes au mauvais endroit, dans le mauvais carcan".
Enfin, l'expérience de Zimbardo semble avoir été utilisée par l'armée américaine pour mieux oppresser les prisonniers, notamment Irakiens (remember Abu-Graib) dans les guerres post-2001. Difficile de prétendre alors qu'elle est une fraude scientifique en totalité.