Un autre de ses soutiens salue le «challenge» possible : «Qu’est-ce qui d’ordinaire s’offre aux anciens Premier ministre de la France, qui sont souvent un peu tricard lorsqu’ils sortent de Matignon ? questionne-t-il. Un rôle de vieux sage ? Un strapontin au Quai d’Orsay ? Qu’un ancien Premier ministre d’un pays se porte candidat dans une grande ville européenne d’un autre pays, c’est l’Europe dans cinquante ans ! C’est quelque chose d’atypique qui peut aussi plaire !»
Cette Europe sera sans moi. Car son existence signifierait qu'on aura été plus loin que jamais dans l'aristocratie : on aura acté, de manière encore plus forte qu'aujourd'hui, qu'il y a des gens bien plus compétents que d'autres pour piloter un pays et que la France ou l'Espagne ou l'Estonie ou la Grece, ça ne change pas grand'chose, ça se gère bien pareil, rien à faire des spécificités locales. Cela signifie que cette classe-là sera uniquement là pour avoir le pouvoir et se comporter en gestionnaire. Il n'y aura plus de politique, c'est-à-dire plus d'envie commune, plus de projet partagé. On sera dans la gestion tout ce qu'elle a de plus froide : des chiffres et de la rentabilité.
On a déjà ce jeu des chaises musicales dans l'administration française : un jour t'es au service comptabilité, le lendemain t'es aux ressources humaines, le surlendemain t'es à la direction des achats, etc. Un jour t'es à Radio France, le lendemain au CSA, le surlendemain à l'IGAS, etc. Ça permet de faire durer des carrières, au détriment de la qualité du travail accompli.
Non, décidément, une internationale des élites qui joue aux chaises musicales à l'échelle de l'Europe, ça ne me tente pas.
Via le Canard enchaîné du 25 avril 2018.