Ces dernières années, chez les militants de tout poil (y compris les animateurs de causeries TV, donc), j'ai vu des mots inconnus apparaître de plus en plus souvent… J'y comprenais rien (et c'est toujours le cas). Et surtout, je pigeais pas l'apport de ces mots (et c'est toujours le cas). SJW, cancel culture, woke, essentialiser, anthropocène, classiste, validiste, transphobe, grossophobe, psychophobe, spéciste, etc.
J'avais ouvert quelques onglets pour mener des recherches :
- Cancel culture : des censeurs qui t'interdisent de lire ou voir ce que tu veux ou d'écouter qui tu veux, en pratiquant, entre autres, la réprobation sociale, le harcèlement, ou la violence physique. C'est pour ton bien, pour pas que tu sois heurté, pour diffuser à la place des idées qui feront progresser le monde, et pour pas que le fascisme revienne (trololo). Au début, je pensais que ça voulait dire « ignorer », du coup ça ne me choquait pas (tu peux me préconiser d'ignorer tel ou tel contenu tant que tu me laisses décider). Mais vu qu'il y a une organisation et des actes pour réprouver, harceler, interdire, ce n'est clairement pas de ça qu'il s'agit. Ceci dit, je vois rien de neuf… La censure a toujours existé à des intensités différentes (Index, interdictions ciblées de livres ou de spectacles, retouche d'œuvres pour ne pas choquer, pour virer la clope d'un fumeur invétéré, assassinats, etc.). Nous sommes actuellement dans une censure diffuse (le censeur = le voisin) de forte intensité, je dirais ;
- Social Justice Warrior : un défenseur de la justice sociale et des droits humains qui en fait trop dans le but de s'organiser un fort pouvoir personnel, de récolter une gloire, tel le chef d'une révolution. Le woke joue dans la même catégorie, les aspects pouvoir personnel et gloire en moins ;
- Pour classiste, j'ai disjoncté pour me préserver. Faut pas pousser… (Ceci dit, je comprends le message : oui, le nutriscore est un outil incitatif visant à changer les comportements plutôt que de traiter le problème de la malbouffe à la racine par une politique publique, la création d'une filière complète, du protectionnisme, etc. De là à parler de classiste et de grossophobe, je ne suis pas. Je viens de décrire le problème avec des mots existants, donc c'est faisable.) ;
- J'ai toujours pensé que les mots suffixés par « -phobie » sont mal conçus. Je conçois que la peur soit l'une des origines du rejet, de l'aversion, de la volonté d'ignorer d'autres gens voire de limiter leurs droits et libertés, mais il n'y a pas que ça dans le cocktail, me semble-t-il. À l'opposé, « misogyne » me semble bien fichu (alors que femmophobe, qui semble exister, ne me parle pas). Et surtout, quels propos et comportements relèvent précisément de cette terminologie ? Quels propos et comportements relèvent d'un acte hostile envers une communauté (si je puis dire) ou à l'encontre d'une personne pour laquelle on a une liste de griefs objectifs ? De plus, j'ai toujours du mal à qualifier d'homophobes les propos tenus dans les stades de foot, qui sont à la limite entre jurons et injures, je trouve. Bref, cette tendance à dénoncer tout comportement avec un mot en « -phobe » ne me convient pas ;
- Anthropocène, c'est comme futurologue, je bute sur la sémantique. L'humain comme force géologique majeure entraînant l'écocide : la majorité des humains est donc responsable. N'est-ce pas plutôt une organisation économique et sociale qui l'est ? Certes, ce sont des humains qui la mettent en œuvre, mais soyons précis.
Au final, j'ai décidé de m'en foutre. Quand il faut un doctorat en charabia (ou dans une spécialité) pour comprendre des mots excluants qui servent à montrer qui est dans le coup et qui ne l'est pas et qui s'utilisent dans des débats de terminologie interminables (façon anars et marxistes-léninistes-trotskistes), c'est que les propos ne me sont pas destinés (comme quand des chercheurs en économie ou en sociologie ou en… échangent avec un vocabulaire précis ultra chiadé pour faire avancer leur science) et qu'ils ne seront jamais majoritaires (comme l'anarchisme et le communisme, précisément). Du coup, il est inutile de s'attarder.