Quelques notes.
- Bouygues = capitalisme familial familier des milieux politiques (ami de Sarko) et, en même temps, Bouygues Telecom est une création totale de Martin Bouygues, donc de l'héritier ; Orange = capitalisme d'État qui devient capitalisme tout court mais en même temps Stéphane Richard a bossé au pôle immobilier de la Générale des Eaux qui tombera dans le giron de Vivendi et l'homme a aussi des connivences avec la politique (Richard choisira Sarko comme avocat) ; SFR = capitalisme financier né de la dérégulation financière ; Free = self-made man qui carbure à la méritocratie (Xavier Niel ne tolère pas des employés qui ne sont pas 100 % indispensables) mais aussi de fortes connivences politiques.
- Dans le milieu des années 90, le trouble-fête, c'était Bouygues et son forfait mobile 3h.
- Dans les années 2000, Patrick Drahi croit à l'avenir du câble ("pourquoi ça fonctionnerait ailleurs mais pas en France ?!") et rachète tous les câblo-opérateurs dont Noos. Drahi n'investit jamais son propre argent et utilise des montages financiers pour réaliser des achats à effet de levier, le genre de manip' qui permettent d'absorber des plus gros que soi sans diluer le pouvoir. Ensuite, on restructure en licenciant et en mettant les prestataires sous pression genre en ne les payant pas jusqu'à ce que ces prestas, qui dépendent de vous, vous accorde un rabais sans négocier. Drahi va même jusqu'à endetter le groupe Altice après le rachat de SFR à hauteur de 1,6 milliards d'euros afin d'être en mesure de verser les 2 milliards de dividendes !
- Apparition de Free Mobile = forçage/naissance d'une volonté politique : lobbying de Free en 2006-2007 notamment auprès de l'autorité de la concurrence (profitant ainsi que l'autorité a épinglé les 3 autres opérateurs pour leur entente illicite sur le marché). François Fillon est réceptif, Sarko non (poto de Bouygues, on le rappelle). L'État a toujours besoin de thune et 240 millions de licence mobile, même si c'est moins cher payé que les 3 premières licences, ça aide toujours. Free est le seul à répondre à l'enchère de 2009. On raconte que Fillon aurait signé en douce de Sarko le décret d'attribution. Qui peut le croire vu le tempérament de Sarko ?!
- Le contrat d'itinérance entre Free Mobile et Orange a été une très bonne affaire commerciale et n'a pas été influencé par le milieu politique (au-delà que la 4e licence était une volonté politique et que donc autant en profiter) : l'État n'a que 3 personnes sur 15 au Conseil d'Administration d'Orange. Il n'empêche que les 2 autres opérateurs ont fait une offre à Free Mobile tout en s'en cachant. Bouygues est rancunier.
- Lors du lancement de Free Mobile, Orange avait carrément une "war room" :D
- Orange résiste le mieux, SFR licencie environ 1000 personnes et Bouygues licencie 550 personnes.
- À nouveau, le trouble-fête redevient Bouygues et le lancement de la 4G. Manque de pot, Free riposte avec 4G + 20G pour 20€/mois. Bouygues annonce un licenciement de 40 % de ses effectifs… Mais les dividendes ne diminuent pas. ;)
- Lorsque Drahi désire racheter SFR. Les autres, et notamment Free Mobile et Bouygues discutent (en 3 jours, comme quoi l'ambiance est amicale comme le dit très justement Xavier Niel !) des partages qu'ils conviendraient de faire pour que le rachat soit accepté par l'autorité de la concurrence. Tout le monde est contre Drahi. Sauf que Bouygues ne trouve pas le cash pour suivre donc Vivendi vend à Drahi.
- Retour à 3 ? Bouygues refuse de se faire absorber, aussi bien par SFR que par Orange. On constate un problème d'ego et un rapport très affectif entre Martin Bouygues et Bouygues Telecom, son bébé lorsqu'il déclarera que ce n'est pas qu'une question d'argent et que « vous vendriez votre femme ?! Bon ».
- L'avenir ? Altice croit en la convergence infrastructures et médias (SFR Presse, tout ça), quitte à briser l'universalité de la distribution de la presse (un kiosque est visiblement tenu par la loi de distribuer tout titre de presse) ; Orange croit en la banque mobile (et aussi à l'Internet des objets même si ce n'est pas dit dans le doc') ; Bouygues croit à la 5G et à l'Internet des objets.
Je trouve excellente l'approche des différents types de capitalisme (même si la réalité n'est pas aussi tranchée que dans le reportage, j'ai nuancé au début de ce shaarli). Centrer l'analyse sur les patrons, ça me semble aussi stupide que de se focaliser uniquement sur un-e présidentiable qui devrait savoir tout faire (alors qu'en fait, il-elle a une équipe de campagne) : on loupe des bouts d'analyse et on oublie l'impact des prédécesseurs (SFR a eu d'autres patrons, Orange aussi). La téléphonie mobile me semble difficilement dissociable de l'Internet fixe : c'est cela qui a permis à Free de lancer Free Mobile et c'est l'Internet mobile qui fait aujourd'hui la marge sur les forfaits et notamment sur les forfaits à pas cher (50 mega dans le forfait à 2€ de Free, c'est une blague en 2016 ! Une facturation au volume d'un truc dont ces acteurs sont facturés au débit, c'est tout aussi un gag !).