Claquer 12 millions d'euros pour bétonner 8,4 hectares de terres agricoles pour y construire un parc à surf, des hôtels, des restaus, un camping, etc. à Saint-Père-en-Retz (à côté de Saint-Nazaire), soit à 5 kilomètres de l'océan atlantique et de ses vagues naturelles. Génies ! Tout ça et un gâchis d'énergie pour avoir des vagues parfaites de 20 secondes… Quel intérêt de surfer sur des vagues parfaites ?! Le projet devrait obtenir son permis de construire d'ici début 2020.
Un Surf Park artificiel à deux pas de l‘océan, au milieu des terres ? C’est ce qu'on appelle le bon sens…
« Mais on est en plein milieu des terres, ici ! C'est là qu ils veulent construire une mer artificielle ? Avec un moteur, avec des vagues ? »
Eh ben oui.
C’est bien ici.
Dans les champs, parmi les bosquets.
« C’est un projet qui s'est déjà monté en Ecosse, nous explique Yoann, la trentaine, grosses lunettes et chemise rouge à carreaux. Un grand bassin au milieu de la campagne, pour y faire du surf. Pour une heure de fonctionnement, la consommation, c’est l'équivalent énergétique de quatre foyers sur un an. Donc imaginez en multipliant par le nombre d'heures ou le bassin va fonctionner… »
Précision, quand même : on est à cinq kilomètres de l’océan… Mais le « Surf Park », lui, prévoit de bétonner 8,4 hectares de terres agricoles pour créer un bassin de 200 mètres de long sur 75 de large. Evidemment, derrière, tout est à l’avenant : un complexe sportif et hôtelier, un camping de huit hectares… Douze millions d’investissement prévus. C’est à une société privée, Nouvelle Vague, qu’est venue cette idée de génie. Il ne lui a pas fallu longtemps, remarquez, pour convaincre la commune, et la communauté de communes, et le Département, et même le ministère des Sports. Ils en rêvent, certains se frottent même les mains : quinze emplois créés, 100 000 visiteurs espérés.Après l'échec de Notre-Dame-des-Landes et du YelloPark (l' ex futur stade de foot du FC Nantes), il fallait bien ça pour se refaire la cerise… « Mais les terres, elles sont pas cultivables ou quoi ? reprend le rédac’ chef.
Maïté : Mais si, bien sûr !
Yoann : On pourrait y faire du foin, ou mettre les animaux… On a d’ailleurs monté un collectif, Terres communes, qui se bat pour les terres agricoles, contre les accaparements de terres, comme ce projet de Surf Park.
François : Mais y a peut-être pas de maraîchers, alors, qui veulent s’installer ici ?
Yoann : Si, si, il y a des milliers de jeunes qui veulent s'installer. Mais les terres disparaissent, avec le béton, et leur accaparement par les industriels. »
Alors, avec ses collègues, au sein de leur collectif, ils pétitionnent, manifestent, pour « défendre l'avenir de la petite paysannerie ». Qui sait, peut-être les vaches ne s’exerceront-elles pas au surf de sitôt…
Dans le numéro 89 (juin-août 2019) de Fakir.