Un documentaire, datant de 2013 (sortie française : 2016), centré sur les USA, qui nous cause des conditions générales d'utilisation des services numériques, de la non préservation de notre vie privée par ces mêmes services, de la police prédictive qui arrête des manifestants avant qu'ils agissent en Angleterre durant le mariage princier, et de la surveillance de masse pratiquée par les États, notamment US, sous couvert de tous ces services numériques via lesquels nous vivons et racontons nos vies sans nous poser de questions.
À de rares moments, ce documentaire est difficile à suivre en cela qu’il semble décousu, et il peut rendre extrêmement défaitiste la personne qui le visionne en cela qu'il balance de gros pavés dans la figure qui laissent à penser que l'adversaire est trop grand, que tout est perdu, qu'on ne peut rien faire, sans tenter de contrebalancer cette émotion. Malgré cela, j'en recommande le visionnage.
Mes notes :
- En 2000, la société commerciale Toysmart fait faillite et vend sa base de données clientèle : 195 000 clients avec leur identité, adresse postale, leurs factures, leurs habitudes d'achat, leur situation familiale, etc. ;
- Les réglages par défaut des services numériques sont une plaie, car ils laissent volontairement accessibles beaucoup plus d'infos que ce que la plupart d'entre nous désirent. Sans compter que cela évolue en permanence : Facebook a rendu accessible de plus en plus de données entre 2005 et 2010 sous couvert des réglages par défaut ; Google a regroupé nos données accumulées sur leurs différents services alors que son PDG, Éric Schmidt, déclarait, 2 ans auparavant, que c'était un cauchemar donc que Google ne ferait jamais ça ;
- En 2011, les USA tentent d'adopter une loi protectrice de la vie privée. Édulcorée sous l'action des lobbies, elle se contente d'apporter quelques garanties contre l'usurpation d'identité et le démarchage sauvage… sauf si les clients y consentent… dans les conditions générales d'utilisation de plusieurs dizaines de pages ;
- « Total Information Awarenes » est le nom d'un programme lancé en 2002 par le gouvernement US visant à collecter toutes les transmissions numériques. Le but avoué est de faire le lien entre les activités bancaires, l'achat de billets d'avion, les activités en ligne, etc. pour lutter contre le terrorisme. Ce programme a, soi-disant, été abandonné en 2003 sous la pression des médias et du Congrès… Jusqu'à ce qu'on découvre, une décennie plus tard, que le développement de l'infrastructure sous-jacente a continué et a servi de base aux programmes de surveillance de masse de la NSA ;
- On peut penser que la « doctrine du tiers », c'est-à-dire le fait que les citoyens US sont espionnés en direct par des sociétés commerciales privées plutôt que par le gouvernement (qui utilise les sociétés commerciales comme rebond) permet de contourner le 4e amendement en plus de faire des économies. Oui, il faut toujours se souvenir que la Constitution US est bâtie sur une défiance envers l'État, les droits qu'elle accorde (expression, vie privée, port d'arme, etc.) s'appliquent vis-à-vis de l'État… pas des tiers ;
- La société commerciale américaine Carrier IQ produit un logiciel espion installé sur nombre de smartphone Android, notamment aux USA. Le FBI reconnaîtra, devant le Congrès, qu'il a pu avoir accès '""""par mégarde"""" à des données collectées via ce logiciel dans le cadre de sa coopération avec les opérateurs télécoms US ;
- L'empire médiatique de Rupert Murdoch était lié à la police et à un cercle fermé de politiciens dans le piratage de boîtes vocales téléphoniques dans l'optique d'obtenir des scoops. Ces pratiques ont perduré plus de 10 ans avant d'êtres révélées !
- Je note quelques fautes : en français, on dit « chiffrement », pas « cryptage » ; il est faux de parler d'anonymat dans la manière dont Google promettait d'exploiter les cookies dans sa première politique de confidentialité en 2000 : c'était déjà du bluff intégral. Un cookie est un identifiant unique plus ou moins temporaire de tel navigateur sur tel ordinateur. Dans un tel contexte, il n'y a pas d'anonymat.