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  • Fallait demander | Emma

    Quand le partenaire attend de sa compagne qu'elle lui demande de faire les choses, c'est qu'il la voit comme la responsable en titre du travail domestique. Elle = cheffe du projet « gestion maison », lui = « exécutant ». C'est donc à elle de savoir ce qu'il faut faire, et quand il faut le faire.

    Le problème avec ça, c'est que, planifier et organiser les choses, c'est déjà un travail à plein temps. Moi, au boulot, quand j'ai commencé à gérer des projets, j'ai vite arrêté d'y participer. Je n'y arrivais pas.

    Alors, quand on demande aux femmes de faire tout ce travail d'organisation, et en même temps d'en exécuter une grande partie, ça représente au final 75 % du boulot.

    Les féministes appellent ce travail la charge mentale. La charge mentale, c'est le fait de toujours devoir y penser. Penser au fait qu'il faut ajouter les coton tiges à la liste des courses, que c'est le dernier délai pour commander le panier de légumes de la semaine, et qu'on est en retard pour les étrennes du gardien. La charge mentale repose en quasi totalité sur les femmes. C'est un travail épuisant et c'est un travail invisible.

    Du coup, alors que la plupart des hommes hétérosexuels de mon entourage affirment partager les tâches à égalité avec leur compagne, lesdites compagnes ont un point de vue assez différent.

    Boarf, ça c'est aussi la conséquence du fait qu'il est de plus en plus socialement inadmissible de dire que c'est la dame du foyer qui s'occupe de tout. C'est juste de l'autocensure dans l'expression.


    Pour moi, l'existence de cette charge devient flagrante quand je décide de m'atteler à une corvée simple comme débarrasser une table. Je commence par prendre un objet à ranger mais sur le chemin, je vais marcher sur une serviette sale, que je vais aller mettre dans le panier que je vais trouver plein. je vais du coup faire une lessive et tomber sur mon panier de légumes qu'il faut mettre au frais. Et ainsi de suite. Au final, je parviendrai à ranger ma table au bout de 2 pénibles heures.

    Si je demande à mon copain de ranger la table, il va juste ranger la table. La serviette va rester par terre. Les légumes vont pourrir sur le plan de travail. C'est ainsi que ma copine J., qui, en allant se coucher, demande à son conjoint : « Tu pourras sortir le biberon du lave vaisselle quand il aura fini ? » trouve, au premier réveil nocturne, le lave vaisselle ouvert, avec juste le biberon sorti et tout le reste encore à vider.

    En fait, ce que disent nos partenaires, en nous demandant de leur indiquer les tâches à faire, c'est qu'ils refusent de prendre leur part de charge mentale.

    […]

    Et alors que les femmes accèdent de plus en plus au marché du travail, elles restent malgré tout les seules responsables du foyer.

    Quand nous devenons mères, cette double responsabilité nous explose au visage. Car 11 jours après l'épreuve de l'accouchement, notre partenaire va retourner au travail. Et ça lui semblera normal. Durant cette période, tout en récupérant de nos sutures entre deux nuits entrecoupées, nous allons intégrer mentalement tout le nécessaire pour gérer un bébé : le choix d'une nounou, l'achat des vêtements, les rendez-vous médicaux et la préparation des repas. Et à la reprise du travail, nous entrerons dans un rythme si infernal, qu'il sera moins épuisant pour nous de continuer à faire toutes ces choses, que de batailler avec notre partenaire pour qu'il en prenne sa part. Voilà comment on trouve des pères d'enfants âgés de plusieurs années, qui ne savent toujours pas où leur acheter des vêtements, quoi leur préparer à manger, la date du prochain vaccin ou même le numéro de la nounou.

    Alors, c'est sûr que rien ne nous oblige à faire toutes ces choses. Le problème, c'est que quand on arrête, ça pénalise toute la famille.

    Bon. Alors je sais déjà ce que certains vont me dire : « C'est pas vrai, moi je fais la moitié des choses à la maison. ». Hé bin, je vais vous dire, tant mieux (mais confirmez quand même avec votre partenaire). Que ça soit comme ça chez vous ne change rien au problème : statistiquement, ce sont encore en grande majorité les femmes qui gèrent le foyer : d'après l'INSEE, les femmes consacrent encore 2,5 fois plus de temps aux tâches ménagères que les hommes. Et si cet écart diminue avec le temps, ce n'est pas parce que les hommes en font plus mais parce que les ménages les plus aisés externalisent ces tâches, le plus souvent en les déléguant à des femmes immigrées et précaires. On ne peut pas vraiment dire que ça soit une bonne solution.

    Pour changer les choses, il me semble évident que les hommes doivent apprendre à se sentir responsables de leur foyer. Il serait déjà bien utile que les pères revendiquent le droit d'être auprès de leur famille dans les premiers mois de leur enfant. Pour l'instant, seules les féministes réclament l'allongement du congé paternité, sans grand succès d'ailleurs.

    Pour moi, c'est un problème bien plus vaste que le cadre d'un foyer de personnes hétéros (mais ce n'est pas pour autant que ça minimise le problème ou qu'il ne faut pas chercher à le résoudre) : on a la même problématique dans nos associations. Essaye de participer à un hackerspace, soit un lieu autogéré, et tu constateras que c'est toujours les mêmes qui doivent se taper le ramassage des emballages de pizzas et l'administratif relou. Lieu autogéré mais où la merde incombe toujours aux mêmes personnes. Même chose dans une association : c'est toujours les mêmes personnes sur qui reposent les tâches ingrates. Et toute nouvelle personne qui débarque dans l'asso sort « comment puis-je aider ? ». Tu peux répondre la liste des projets en cours et tout ce que tu veux, tu auras les réponses-type : « ça, ce n'est pas pour moi », « ça je comprends pas », « ça, je comprends mais je ne vois pas comment l'exécuter ». Au final, très peu de personnes se sentent concernées par le projet associatif. Le seul moyen de faire bouger les lignes, c'est d'interroger les membres genre « toi tu sais faire ça, tu ne voudrais pas t'occuper de telle action ? ». Et vlam, t'es devenu-e un-e chef-fe du projet « vie associative de l'asso bidule ». Et en face de toi, tu n'as plus des membres, mais des exécutant-e-s. Si tu oublies quelque chose, ça ne se fera pas et le reproche tombera sur toi : bah ouais, c'toi qui organise le taff des gens donc t'es responsable, normal. Ho, une charge mentale.

    C'est le même problème dans nos taffs : on passe notre temps à dire du mal des chef-fe-s de projets et des chef-fe-s. Mais d'un autre côté, nous sommes majoritairement incapables de nous prendre en main, de prendre en main la responsabilité partagée de la société dans laquelle nous taffons. Hé ouais, être chef-fe, c'est du boulot (charge mentale), suffit pas de se commander un nouveau gratte-dos en ivoire payé avec le sang des salarié-e-s. Le trip « tout le monde autoentrepreneur » de Sarko (ou la startup nation de Macron), c'est choupi mais nous n'y sommes mentalement pas prêt-e-s, en grande majorité.

    Wed 17 May 2017 12:49:18 PM CEST - permalink -
    - https://emmaclit.com/2017/05/09/repartition-des-taches-hommes-femmes/
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