All links of one day
in a single page.
<Previous day - Next day>

rss_feedDaily RSS Feed
floral_left The Daily Shaarli floral_right
——————————— Monday 08, October 2018 ———————————

Une charité qui se fout de l’hôpital

Tels des gamins oubliés par le Père Noël, les hôpitaux ont regardé tous les jouets offerts par Macron avec son grand plan Santé, décliné mardi dans le budget de la Sécu. Cruelle déception : à peine « quelques miettes », se désole un responsable de la Fédération hospitalière de France (FHF), regroupant tous les hôpitaux publics. Au lieu d’augmenter de 2,3 % — comme l’avait annoncé Darmanin en juillet —, le budget de la santé, a claironné Macron, gonflera de 2,5 %, soit une rallonge de 400 millions. Sauf que la réalité est moins rose.

Avec le vieillissement de la population, en effet, en plus de l’inflation et d’autres assommantes considérations, les dépenses de santé augmentent mécaniquement de 4 % par an. Afin de limiter la hausse à 2,5 %, les hôpitaux devront encore réaliser… près de 1 milliard d’économies. « La rallonge de Macron diminue juste le montant des économies qu’on nous réclame, et de très peu, déplore la FHF. Les 400 millions serviront surtout à financer les assistants médicaux (qui épauleront les généralistes). Pour les hôpitaux, il restera, à tout casser, 150 millions. » Une goutte d’eau dans un océan de maux.

Certes, le plan Macron prévoit de désengorger les urgences en réorganisant la médecine de ville. Mais cette belle ambition mettra « au moins cinq ans » à porter ses fruits, a illico réagi le Pr Grimaldi, sur le site de « L’Obs » (l9/9). En attendant, Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, qui depuis des mois agitait son futur plan, n’a plus de martingale. Une grève ? Une crise dans les Ehpad ? Un cri d’alarme des soignants ? Patience, psalmodiait—elle, le plan Santé soignera l’hôpital, ce grand malade « à bout de souffle ».

La potion fait déjà merveille. Le 20 septembre, deux jours après sa grande annonce, les hôpitaux psychiatriques de Rouen, Niort et Auch ont voté la grève. Le même jour, des syndicats ont manifesté au CHU de Nancy. Le lendemain, le CHU de Saint-Etienne a voté la grève générale. Et, le 4 octobre, la CGT appelle à une grève nationale et reconductible dans tous les Ehpad, hôpitaux et hôpitaux psychiatriques.

C’était donc ça, le « big bang » de la santé promis par Macron ?

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

Les agités du vocal

L'assistant vocal Alexa équipe désormais certains fours à micro-ondes. Grâce à cette invention indispensable, il est possible de faire cuire un épi de maïs en prononçant à voix haute les mots « épi de maïs ». Le four règle alors lui-même le temps de chauffe. Le Huffington Post (21/9) raconte que, lors d'une démonstration, quand on a demandé à Alexa de prolonger la cuisson de trente secondes, l'assistant vocal a fait diffuser par le haut-parleur des chansons du groupe rock Thirty Seconds to Mars (« Trente secondes vers Mars »).

C'est plus poli que « Va te faire cuire un oeuf ! ».

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

L'INA et Molotov TV

L’Institut national de l'audiovisuel, dont le siège est à Bry-sur-Marne (Val-de-Marne), loue des bureaux dans Paris, près de la gare de Lyon, mais va bientôt déménager dans le plus accueillant VIIe arrondisse-ment. L'augmentation de loyer n’est pas faramineuse (de 77 500 à 90 000 euros par an), mais le bail est audacieux : l’INA, entreprise publique, va louer ses nouveaux locaux à Molotov, le roi privé de la télé par Internet, avec lequel il est par ailleurs en affaires. Depuis cet été, l'INA a lancé sa chaîne sur la plateforme vidéo Molotov, où sont diffusés ses archives et les moments cultes de la télé.

Après le partenariat public-privé, le partenariat public-privilégié !

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

Gattaz d'échappement

On a beau le savoir, c’est toujours bien d’en avoir confirmation : les dirigeants d’entreprise, qu’ils soient français ou européens, qu’ils se présentent comme des amis de la planète ou non, se fichent du dérèglement climatique comme de leur premier coup de soleil.

Voyez BusinessEurope, le Medef européen. Il rassemble toutes les organisations patronales des Vingt—Sept. C’est le sémillant Pierre Gattaz qui le préside depuis peu. La semaine dernière, le site Euractiv a publié un mémo interne qui fournit à ses membres les éléments de langage qu’ils devront utiliser à Bruxelles lors des prochaines discussions sur les réductions d’émissions de C02 (« Libération », 20/9). Trois bons conseils.

Un, tant qu’il s’agit d’un blabla sans conséquence, c’est-à-dire sans aucun effet sur la législation européenne en vue de 2030 (car ils voient loin…), ne pas hésiter à être « plutôt positif » sur la nécessité de réduire les émissions.

Deux, dès que des mesures concrètes de réduction d’émissions sont envisagées, « utiliser les arguments habituels, selon lesquels nous ne pouvons agir seuls dans un marché mondialisé et ne pouvons pas compenser pour les autres ».

Trois, pour freiner, retarder, empêcher les mesures de réduction mettre en doute les calculs en « demandant plus de transparence », réclamer des « études d’impact », agiter le « risque de créer de l’instabilité ».

Cocasse, non ? Depuis l’accord de Paris sur le climat, en 2015, on entend tous les jours dans les médias les patrons expliquer que, loin de voir dans la lutte contre le dérèglement climatique une entrave à l’activité économique, ils la considèrent, eux, comme une formidable opportunité et se posent en leaders du combat pour un monde moins ravagé par les gaz à effet de serre.

L’enfumage, c’est tout un art…

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

La vie n‘est pas un Collomb fleuve tranquille

Macron n’a toujours pas digéré la précipitation avec laquelle Collomb a annoncé, le 18 septembre, son départ du gouvernement au printemps 2019, pour se lancer dans les municipales à Lyon.
« Il n’y avait pas d’urgence », s’est-il indigé devant des conseillers.

Et le ministre de l’Intérieur vient d’aggraver son cas. Le 23 septembre, « La Dépêche du Midi » a publié des confidences de l’hôte de Beauvau recueillies lors d’un déjeuner, le 7 septembre. Collomb commence par un mea culpa :
« On n’a pas bien traité un certain nombre de problèmes, comme l’accueil des mineurs isolés, les 80 km/h. »

Puis il passe à l’attaque :
« Les provinciaux — et j’en suis — ont déjà une tendance naturelle à considérer que les Parisiens ont la grosse tête, les snobent. Or, des expressions comme la “nouvelle grammaire de la politique” ou la “start-up nation”, ils ne s’y reconnaissent pas… »

Interrogé pour savoir s’il s’en est ouvert à Macron, le premier flic de France sort le calibre :
« Si tout le monde se prosterne devant lui, il finira par s’isoler. Car, par nature, l’Elysée isole. »

Seconde salve :

« Nous ne sommes pas nombreux à pouvoir encore lui parler. Ceux qui parlent franchement à Macron sont ceux qui étaient là dès le début : Ferrand, Castaner, Griveaux et moi. D’ailleurs, il va finir par ne plus me supporter. » C’est déjà le cas de Brigitte Macron. Assise entre Ferrand et Collomb, lors de la journée d’hommage aux victimes du terrorisme, le 19 septembre, elle n’a pas échangé un mot avec le ministre. Pour l’un de ses collègues du gouvernement, le divorce avec Macron est consommé et le ministre de l’Intérieur pourrait être « libéré » avant le mois de mai 2019, pour redonner du souffle à la fonction.

« Lorsque vous annoncez le moment de la fin, commente-t-il, c’est déjà la fin. »

Un propos très fin.

Le stratège

Pourquoi le ministre de l’lntérieur a-t-il annoncé si tôt sa volonté de quitter son poste en mai 2019, au risque de mettre le pagaille au sein du gouvernement ?

Primo, selon un membre de sa garde rapprochée, parce qu’« il voit bien qu’à Lyon Laurent Wauquiez et son équipe préparent très activement la reconquête de la ville, dont ils veulent faire un symbole de la renaissance de la droite. Il surveille aussi tout le petit jeu de Marion Maréchal. Du coup, il se dit qu’il faut impérativement accélérer. Ce n’est pas pour rien que son association politique s’appelle “Prendre un ttemps d’avance”… » Secundo, Collomb a voulu envoyer un message aux macronistes locaux. « Georges Képénékian, le maire de Lyon, et David Kimelfeld, le président de la métropole, ont tous les deux tenu des propos ambigus qui montraient qu’ils étaient prêts à tuer le père et étaient tentés par l'idée de se présenter eux-mêmes à la municipalité… Collomb se devait deny de calmer rapidement leurs velléités. »

Entre deux réunions sur la menace terroriste ?

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

Eternel retour fiscal

Coucou la revoilà,la défiscalisation des heures supplémentaires ! Sarkozy l’avait inventée en 2007 pour torpiller les 35 heures. En 2012, Hollande l’avait supprimée parce qu’il ne fallait rien garder de l’héritage. Mais elle a la vie dure : la défiscalisation revient, sous le joli nom de « désocialisation », dans le budget 2019.

Evidemment, à la mode Macron : un peu de Sarko — on supprime les cotisations sociales des salariés sur le temps de travail au-delà de 35 heures par semaine ; et — « en même temps » — les heures sup continueront d’être soumises à l’impôt sur le revenu, comme l’avait voulu Hollande.

Un peu de pouvoir d’achat, mais pas trop de trou budgétaire : ce travail de dentellière bute toujours sur la même absurdité. Depuis la mise en place des 35 heures, à partir de 2000, l’Etat verse chaque année aux entreprises (en réductions de charges) une quinzaine de milliards. Et, « en même temps » que l’Etat (c’est-à-dire le contribuable) dépense cet argent pour réduire le temps de travail, il en dépense encore plus — 2 milliards chaque année — pour inciter à son augmentation.

Sapeur Camember, réveille-toi, ils sont devenus fous !

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

La Cour des comptes saque Vuitton

Pas moins de 790 millions d’euros. C’est, selon la Cour des comptes, ce qu’aura coûté le musée de la Fondation Louis Vuitton, situé dans le bois de Boulogne, à Paris. Et non pas 100 « petits » millions, comme l’avait promis Bernard Arnault au moment de lancer le chantier. « Un projet immobilier au coût non maîtrisé », déplore la Cour, qui, dans un rapport d’observation provisoire que s’est procuré « Le Canard », confirme des calculs naguère effectués par « Marianne » (13/5/17). L’amour des arts, ça ne se contrôle pas…

Annonçant la création de la Fondation et du musée, Renaud Donnedieu de Vabres, alors ministre de la Culture, avait lancé à Bernard Arnault : « Lorsqu’ils seront officiellement saisis de votre projet, les services de l’Etat l’examineront avec un intérêt très positif. » Aujourd’hui, le même Donnedieu siège au conseil d’administration de la Fondation. Lequel, selon la Cour, a tout d’un organe croupion : deux de ses six membres n’y ont jamais siégé, et il n’a jamais eu à débattre de la convention passée avec la Mairie de Paris prévoyant que la Ville reçoive 1 million d’euros annuel pour l’occupation de son terrain et récupère le musée au bout de cinquante-cinq ans. Cette redevance, note la Cour, correspond au montant brut annuel des cinq plus gros salaires de la Fondation.

C’est pas du luxe !

Derrière le flamboyant musée d’art contemporain imaginé par l’architecte américain Frank Gehry et réalisé par Vinci, les magistrats ont débusqué une **astucieuse opération d’optimisation fiscale***.

Aux termes de la loi, toute entreprise a, en effet, droit à une ristourne fiscale — 60 % du montant de son mécénat pour une fondation ou une association, dans la limite de 0,5 % de son chiffre d’affaires : une niche qui coûte 930 millions par an à l’Etat. Détail amusant : Jean—Jacques Aillagon, naguère ministre de la Culture et père de cette mesure, est aujourd’hui conseiller de François Pinault, fondateur du groupe de luxe Kering et grand rival d’Arnault. Le monde est petit.

Fiscalité cosmétique

Arnault a tiré un profit maximal de la loi Aillagon. Ainsi, 27 de ses sociétés (La Samaritaine, le joaillier Chaumet, les champagnes Moët & Chandon, la chaîne de cosmétiques Sephora, le couturier Christian Dior ou le groupe Les Echos…) ont versé, en onze ans, 863 millions d’euros à la fondation du groupe. Et, grâce à la défiscalisation, LVMH a récupéré 518,1 millions. L’Etat — donc le contribuable — aura ainsi financé aux deux tiers le musée du bois de Boulogne.

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

Auxiliaire de la malbouffe

Avez-vous déjà entendu parler des agents de plumaison et d'épilation ? Pour ne pas perdre trop de temps, en début de chaîne d'abattage, à débarrasser les poulets de leurs plumes et à rendre imberbes les cochons, l’industrie volaillère et charcutière a trouvé la solution : les pauvres bêtes, une fois zigouillées, sont automatiquement plongées dans un bain chimique contenant, au choix, de l'alkylaryl sulfonate de sodium ou de l'éter d’éther alkyltriglycolique.

Un traitement au poil qui n’est pas mentionné sur l'étiquette des filets de porc ou des cuisses de poulet en barquettes, tout comme les autres « auxiliaires technologiques » dont raffole l’industrie agroalimentaire, pour produire plus vite et plus facilement ses aliments transformés : antimousse dans l'eau de lavage des légumes congelés, agents de clarification pour jus de fruits ou décolorants dans les huiles alimentaires… N'en jetez plus !

Si ces auxiliaires technologiques sont cachés, c’est parce qu'on ne les consomme pas en tant qu'« ingrédients alimentaires » mais sous forme de résidus indésirables. Dès lors, les industriels ont obtenu de Bruxelles qu’ils échappent à tout étiquettage. Avec déjà 300 additifs à indiquer, cela aurait fait beaucoup de noms sur la boîte. Une goûteuse exemption que l’association Foodwatch vient de dénoncer. De plus, tous les auxiliaires technologiques ou presque peuvent être commercialisés dans l'Union européenne sans que les agences sanitaires aient leur mot a dire. Seuls les agents de décontamination, utilisés, par exemple, pour laver les salades en sachets, les enzymes pour faciliter la décantation du vin et les solvants d'extraction qui permettent d'extraire l'huile des graines de tournesol ou de colza doivent montrer patte lanche avant d'être mis sur le marché.

Une fois n’est pas coutume, la France a fait du zèle en concoctant sa propre liste d’auxiliaires technologiques « soumis à autorisation préalable ». Cocorico ! Sauf que la Répression des fraudes ne contrôle pas, ensuite, pour voir s’il reste des résidus dans les produits. Et, surtout, un auxiliaire technologique retoqué par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation peut très bien, s'il est fabriqué chez l'un de nos voisins qui se contente d'appliquer la réglementation européenne, revenir dans nos assiettes en toute légalité.

On est dans les choux (de Bruxelles) !

Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.

-