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——————————— Sunday 08, April 2018 ———————————

Big Brother habite Place Beauvau ? Exégèse en libertés [EN DIRECT] - YouTube

Entrevue avec deux exégètes amateurs. Les questions sont de plus en plus mal formulées et mal enchaînées par Thinkerview, mais les pistes de réflexion apportées par Benjamin Bayart et Alexis Fitzjean O Cobhthaigh sont très très intéressantes. J'en recommande vivement le visionnage. Ci-dessus, je tente de résumer les pistes de réflexion que j'estime être pertinentes.

Orange fail.

  • Le décret, pris en application de lois qui instaurent une censure policière, sans juge, sans contradictoire, de site web pédopornographique ou faisant l'apologie du terrorisme prévoit que les citoyen⋅ne⋅s qui consultent, volontairement ou non, de tels contenus soient redirigé⋅e⋅s automatiquement vers une page web hébergée par un prestataire pour le compte du ministère de l'intérieur.
    • Tout serveur web stocke, par défaut des journaux qui indiquent quelle adresse IP a consulté telle page en venant de telle autre page web à telle date+heure ;

    • Cela ressemble à un fichier de police qui ne respecte pas la procédure de création d'un tel fichier et s'exonère du contrôle de la CNIL, etc ;

    • Le Conseil d'État réagit d'un point de vue du droit et considère que, puisque le décret ne prévoit pas explicitement la création du fichier, il n'existe pas, donc le décret n'est pas illégal.

    • Quelques mois plus tard, Orange se goure dans l'implémentation de ce filtrage et redirige Wikipedia, Google et d'autres vers le site web du ministère. La presse numérique s'inquiète du fichage involontaire d'une grande partie des citoyen⋅ne⋅s. Le ministère publie un communiqué de presse disant qu'il a demandé au prestataire technique d'effacer les journaux de la veille… … … Avouant ainsi l'existence du fichier… ;

    • Les exégètes amateurs attaquent la décision révélée par ce communiqué. La réponse du ministère est curieuse. Elle ressemble à ça : "il n'existe pas de fichier, la preuve, on s'en sert pour faire des stats, et les stats, c'est pas grave, donc on a le droit de procéder sans autorisation". Le ministère se moque ouvertement de la loi informatique et liberté de 1978 qui interdit, par défaut, le fichage, sauf dans des cas prévus par la loi, car il estime que si son cas n'est pas prévu par les exceptions, alors il n'a pas à demander d'autorisation… … …

    • Dans son mémoire en défense, le ministère confirme aussi l'existence du fichier sur des serveurs redondés auxquels peuvent accéder uniquement un nombre restreint de personnes assermentées. :D

    • Il semblerait aussi que le ministère reconnaît qu'il utilise Xiti, un outil commercial de mesure d'audience… Donc, une société privée non prévue par les textes réglementaires semble recevoir implicitement la liste secrète des sites web bloqués… … …



Droit à une expression politique et à une contestation politique en cours d'érosion ?

On utilise l'état d'urgence pour emmerder les écolos pendant la COP21. En revanche, quand ils viennent jouer à la ba-balle, pendant la coupe d'Europe je crois, là, non, autorisation de manifester, de se rassembler, de faire la fête au stade, etc. Donc, en fait, pour la contestation politique, on utilise l'état d'urgence et l'antiterrorisme, et pour les rassemblements sportifs, ça c'est plus important donc on l'autorise pendant l'état d'urgence. C'est important. Ça dit des choses sur l'état de la société. C'est-à-dire que le droit à une expression politique et à la contestation politique n'est plus reconnu. […] Quand tu supprimes cette chaîne de contestation politique, quand il n'y a plus de négociation possible, c'est-à-dire qu'on peut manifester, ça ne change rien, les manifestations peuvent être pacifiques ou violentes, ça ne change rien, ça veut dire que la décision du pouvoir politique n'est plus négociable, donc qu'il n'y a plus de politique.



Rétention des données de connexion.

  • La procédure devant le Conseil d'État n'a pas avancée depuis les dernières observations produites par les exégètes en février 2017. Pourtant, le vice-président du Conseil d'État a publiquement déclaré ceci lors d'un congré :

    C’est aussi le cas avec l’arrêt, plus récent, Tele2 Sverige du 21 décembre 2016[33] qui a précisé, dans un sens restrictif, la jurisprudence résultant de l’arrêt Digital Rights Ireland de 2014 invalidant la directive de 2006 sur la conservation des données au motif que la possibilité donnée aux États membres d’imposer aux opérateurs de communications de conserver l’ensemble des données de connexion des utilisateurs pour une durée maximale comprise entre six mois et deux ans méconnaissait le droit au respect de la vie privée des personnes et le droit à la protection des données personnelles[34]. Cette décision pouvait faire l’objet de deux interprétations : une interprétation souple selon laquelle la collecte et la conservation indifférenciées de données sont possibles à condition d’être justifiées par des objectifs sérieux et d’être assorties de garanties suffisantes ; une interprétation stricte conduisant à écarter toute forme de collecte et de conservation indifférenciée des données, y compris pour des motifs d’intérêt général. Dans son étude annuelle 2014[35], puis en formation juridictionnelle[36], le Conseil d’État avait pris position en faveur de la première interprétation. Par son arrêt Tele2 Sverige,la Cour de justice n’a pas retenu cette analyse et elle a considérablement réduit la marge d’appréciation des États en ce qui concerne la possibilité d’ordonner la conservation des données de connexion, y compris dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou la criminalité organisée.



Fonctionnement de nos institutions.

  • Le président du Conseil d'État est le premier ministre. C'est un titre honorifique, il ne fait rien, même s'il peut présider les assemblées. Cela découle d'une tradition : le Conseil d'État est la version moderne du Conseil du Roi déjà modernisé par Napoléon. Donc le président du Conseil était l'empereur ou le président du Conseil ou le garde des Sceaux, en fonction de l'époque. La personne ayant le plus de responsabilité au Conseil d'État est donc le vice-président.

  • On ne peut pas sanctionner le Conseil d'État s'il ne fait pas son taff. C'est le problème de toute cour suprême : comment la sanctionner ? Qui la sanctionne ? Elle n'est donc pas suprême ? Normalement, on ne la sanctionne pas, parce que les gens qui sont là sont irréprochables… En France, il y a 3 potentielles cour suprême : la cour de cassation, le conseil d'État et le Conseil constitutionnel.
    • Le Conseil constitutionnel n'est pas une formation de juristes : actuellement, il est composé de 3 politicien⋅ne⋅s, de 4 diplômé⋅e⋅s en droit (1 licence, 1 maîtrise, 2 diplômes supérieurs en droit public (préparation au doctorat) et de 2 assimilé⋅e⋅s magistrat⋅e⋅s. Au total, nous avons donc une seule personne qui a pratiqué le droit, 5 personnes qui ont étudié le droit et 3 politicien⋅ne⋅s. En revanche, Benjamin Bayart semble idéaliser un peu trop la Cour constitutionnelle fédérale allemande (« les juges de la Cour sont nécessairement choisis parmi les personnes qui ont fait les longues études de droit, mi-théoriques, mi-pratiques, requises pour exercer les fonctions de juge, d'avocat ou de haut fonctionnaire. Bien plus, parmi les 16 juges que comprend la Cour, un certain nombre d'entre eux, soit six, doivent être recrutés parmi les juges appartenant à l'une des cinq cours de cassation ») : 10 des 16 juges peuvent être des hauts-fonctionnaires qui n'ont plus pratiquer le droit depuis leur formation, comme 5 de nos juges actuels…

    • Il y a plusieurs sections au Conseil d'État : section rapport et étude (qui produit des analyses), sections conseil (intérieur, travaux publics, finances) qui… conseillent le gouvernement, et section du contentieux. Le Conseil d'État mélange donc un tribunal qui devrait être indépendant de l'exécutif avec un vivier de conseillers dévoué à l'exécutif.



Privacy Shield et positionnement de la France.

  • Les exégètes amateurs attaquent le Privacy Shield. Motifs : il n'assure pas suffisamment les droits fondamentaux (correction ou suppression de données personnelles nous concernant). Il ne prévoit pas l'intervention d'une autorité indépendante de contrôle côté USA. Il ne prend pas en compte la collecte généralisée interdite en UE par la Cour de justice. L'accès aux données n'est pas limité à ce qui est nécessaire.
    • La France est intervenue pour argumenter contre la plainte des exégètes. Depuis le scandale Facebook / Cambridge Analytica, les ministres et les commissaires européens expliquent que le droit européen est très protecteur. Mais à côté de ces textes protecteurs, il y a le Privacy Shield qui dit que c'est open bar pour Facebook et d'autres qui appliqueront le droit étasunien. Donc le droit européen est très protecteur, mais il ne contraint pas les acteurs américains. Donc, tout le gratin politicien explique que le droit européen est très protecteur, mais agit en justice pour préserver le Privacy Shield, donc tout ce gratin déclare implicitement que le droit américain est bien suffisant. Exactement le contraire de ce que tout ce gratin raconte face caméra. Business first?



Neutralité du net.

  • Aux vœux annuels de l'ARCEP, il y avait Moscovici qui expliquait qu'en UE, il y avait une unanimité pour défendre la neutralité du Net… Foutage de gueule… On s'est battu pied à pied contre son gouvernement, virgule par virgule. Dans le gouvernement précédent, c'est Axelle Lemaire qui a réussi à faire basculer la position de la France. Pendant des années, La France, notamment Bercy, avec Orange à la manœuvre se battait pied à pied contre la neutralité du Net en UE et les politicien⋅ne⋅s défendaient le grand acteur national pour des questions de sous. Il a fallu faire la guerre à ces gens-là pour réussir à sauver les meubles en matière de neutralité du Net, car le texte est relativement faible par rapport à ce qui était sorti du Parlement européen.

  • Afin d'illustrer que le débat neutralité du net ou déploiement de la fibre optique (ou de la 5G) est en faux débat, Bayart avait suggéré, en 2012, à des conseillers de ministres de proposer un deal à Orange : OK, il n'y aura aucun texte sur la neutralité du net, mais vous vous engagez à déployer la fibre optique sans investissement public. Lors du colloque sur le sujet organisé par Bercy, le représentant de la Fédération Française des Télécoms (qui regroupe quasi tous les gros opérateurs) expose qu'il a entendu parler qu'il y avait des histoires sur les investissements fibre et qu'on ne parle pas des mêmes ordres de grandeur, l'un est en millions, l'autre en milliards, ça n'a rien à voir, il y a un facteur 1000 entre les deux.

  • Les réseaux numériques aux USA sont de faible qualité et il n'y a pas de concurrence d'un point de vue du consommateur qui peut choisir entre un opérateur cuivre sans concurrent et un opérateur câble sans concurrent. Les abonnements y sont (contrairement à ce que prétend Benjamin Bayart) deux à trois fois plus chers qu’en France. Il n'y a pas eu d'investissements ni entretien des réseaux. Ces réseaux étant de mauvaise qualité, il faut, pour ne pas les saturer, soit prioriser des contenus, soit moderniser le réseau. Les opérateurs US justifient donc la nécessaire absence de neutralité du net par la vétusté des réseaux, donc par leur absence de travail durant des décennies

  • Si l'on regarde encore plus loin, sans neutralité des réseaux, on pourrait se retrouver avec des terminaux spécialisés : on n'acheterait plus un ordinateur et un abonnement Netflix, mais on achèterait un abonnement Netflix. On n'acheterait plus un ordinateur et un abonnement Spotify mais Spotify. On achèterait un abonnement GoogleNet ou FacebookNet. Les opérateurs disparaitraîent. Ce n'est pas que Netflix reverserait 10 % à Orange, c'est qu'Orange deviendrait un sous-traitant sans possibilité de promouvoir ses produits, sans possibilité de négocier sa marge et serait dépendant de quelques géants économiques. Un peu comme Dell qui sous-traite l'intervention sur site pour réparer un ordinateur ou UPS / DHL qui sous-traite la livraison des colis. Le⋅a citoyen⋅ne ne produirait plus de contenus, ne s'exprimerait plus, et accéderait uniquement aux contenus estampillés par le marchand.



Facebook / Cambridge Analytica.

  • Kezako : des gens ont voulu accéder à une application Facebook de type "pseudo-enquête d'opinion pour rire". Quand tu fais ce genre de chose, tu dis à Facebook que telle appli peut siphonner tes données. Dans le cas présent, l'appli a siphonné. Si les profiles des """"ami⋅e⋅s"""" ne sont pas configurés tout bien comme il faut, ça siphonne aussi les données des """"ami⋅e⋅s"""" par ricochet. Ensuite, ces données ont été revendues, à Cambridge Analytica (entre autres), qui s'en est servi pour faire du marketing politique (entre autres). Benjamin Bayart voit cela comme un mésusage et un abus de confiance : les utilisateur⋅rice⋅s de Facebook avaient acceptées une collecte de données dans le cadre d'un sondage rigolo. Une collecte beaucoup plus vaste et l'utilisation des données collectées à d'autres fins est une trahison des utilisateur⋅rice⋅s.



Comment savoir si un service te trahira un jour ?

  • De manière générale, si un service est financé par quelqu'un⋅e qui n'est pas l'utilisateur⋅rice du service, alors ce service sert d'autres intérêts que ceux de l'utilisateur⋅rice. Le service n'hésitera pas à faire du tort à l'utilisateur⋅rice pour satisfaire les personnes qui le financent. Si c'est financé par des abonnements, par du financement participatif, par des dons, c'est OK. Si 85 % des recettes d'un journal, comme Le Figaro, proviennent de la pub, c'est autre chose : la logique devient alors celle du temps de cerveau disponible : « à la base, le métier de TF1, c'est d'aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit. Or, pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c'est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible ». Les services en ligne vendent le même service aux annonceurs, à la différence près qu'ils permettent aux pubards d'adresser très finement leur message, presque personne par personne. Exemple : moi, annonceur, je veux que cette pub bien précise s'affiche uniquement sur l'écran des femmes française aisées, entre 25 et 35 ans, qui a tel niveau d'études, qui a telle sexualité, qui a une famille, qui pratique telle religion, etc. C'est l'offre Facebook for business. La manipulation commence ici. La transparence des algorithmes est du vent.



Esprit critique et manipulations.

  • Esprit critique, définition : toujours se demander ce qui est réellement en train de se passer, quel est l'objectif derrière, quel est le message qu'on cherche à me faire passer, pour quoi veut-on me faire passer ce message, qu'est-ce qu'on attend de moi, quelle réaction s'attend cherche-t-on à provoquer chez moi, etc.

  • Tout ce qui vit de la publicité a besoin d'engagement (il faut te faire rester sur le service). Or, t'es beaucoup plus engagé quand tu n'es pas content. Donc, il faut t'afficher du contenu qui va t'énerver, du contenu percutant, provocateur, pas du contenu apaisant, pas du contenu rassurant. Il faut jouer sur les émotions : la peur, l'envie, la colère, la haine, les bons sentiments, etc. C'est pour cela que les algorithmes derrière ces sites web font monter, intentionnellement ou non ce type de contenus : ça fait de l'audience, donc du revenu publicitaire. Pour résister à ces manipulations : apprends à détecter quand on cherche à te manipuler : si un contenu t'énerve, ferme-le et fais une autre activité.

Où en est le CETA ?

Depuis son entrée en vigueur provisoire en septembre 2017, la capitulation de la France (oui, je sais, Paris bricole un "veto climatique" qui n'est pas prévu dans le texte, donc dont l'application dépendra de la volonté des acteurs en présence d'où je nomme ça « capitulation ») et la saisie de la CJUE par la Belgique au sujet des tribunaux arbitraux, je me demandais où en est le CETA, cet accord de libre échange entre l'UE et le Canada.

  • Sept pays l'ont ratifié : la Croatie, le Danemark, la Lettonie, Malte, l'Estonie, le Portugal et la République tchèque ;

  • La Cour constitutionnelle allemande traite actuellement une plainte ;

  • La ratification par le Parlement français serait planifiée en automne 2018…

Un perchoir pour Mailly

Jean-Claude Mailly, qui avait annoncé son retrait de la vie syndicale dès qu’il aurait abandonné son fauteuil de secrétaire général de FO, ne tiendra pas longtemps parole. Car il vient de s’autodésigner représentant de Force ouvrière au Comité économique et social européen (Cese), à Bruxelles.

Même la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, qui s'est engagée à le coacher dans sa nouvelle carrière, a été estomaquée par la rapidité de la manœuvre. Mailly, qui cédera sa place lors du congrès de FO, du 23 au 27 avril, aurait en effet dû attendre que le poste se libère, au début de l’été. Puis que son successeur, Pascal Pavageau, le nomme.

La prochaine étape devrait être sa candidature au perchoir du Cese, qui réunit des représentants des syndicats et des patrons de l’ensemble de l’Union européenne. Pour y parvenir, il pourra compter sur le soutien de Macron et de sa ministre du Travail.

Le syndicalisme indépendant mène à tout.

Dans le Canard enchaîné du 4 avril 2018.

Tout reste affaires

C'est vrai que les grands esprits se rencontrent. Le 26 mars, Vincent Bolloré traînait France 2 devant le tribunal de commerce de Paris, pour un reportage trop regardant sur son commerce africain. Deux jours plus tard, Macron faisait porter par une escouade de députés LRM sa belle proposition de loi sur le secret des affaires à l’Assemblée, adoptée en procédure accélérée par 46 voix contre 20.

Le lien entre les deux ? Le même fond de sauce : le business est une chose trop précieuse pour que quiconque de l’extérieur vienne y fourrer son nez. Et la même logique : les journalistes, ce sont comme des concurrents. Il convient donc de ne plus se contenter de poursuivre ces curieux devant le juge pénal (ou civil) de la diffamation, mais de les amener petit à petit à se soumettre à la seule justice qui vaille, la justice commerciale ! A l’heure de l’entrepreneuriat triomphant, la question n’est plus de savoir si ce que ces scribouillards écrivent est exact, mais si leur prose porte atteinte aux affaires et à leur confidentialité !

Lorsque Bolloré réclame, sans rire, 50 millions d’euros à France 2 devant le tribunal de commerce, ce grand libéral se dit que ces juges non professionnels, et plus sensibles au business, vont mieux prendre la mesure de son préjudice. L’enquête de la Deux relève de la loi sur la presse de 1881, mais le milliardaire la contourne et vient pleurnicher, pour « dénigrement » de son boulot d’entrepreneur, le Code de commerce à la main. Grâce à une manoeuvre similaire, Conforama a obtenu, il y a deux mois, la condamnation de « Challenges », coupable d’avoir osé dévoiler ses déboires financiers. Et la proposition de loi Secret des affaires vient tout simplement finir le travail.

Tribunal d’un commerce agréable

Ce texte réjouissant est en route pour le Sénat. Très faux derche, il ouvre la porte à toutes les fenêtres. Il dit à la fois que « l’obtention du secret des affaires est illicite lorsqu’elle intervient sans le consentement de son détenteur légitime » (la bonne blague) et s’il viole les mesures prises pour « en conserver le caractère secret », mais aussi que cette protection tombe s’il s’agit « d’exercer le droit à la liberté d’expression et de communication, y compris le respect de la liberté de la presse ». Bon courage aux magistrats pour trancher ce cruel dilemme. Faites vos jeux, la course à la jurisprudence est déjà ouverte !

A l’audience Bolloré contre France 2, il y a dix jours, le débat a précisément porté sur la compétence des Codes et des tribunaux. Les avocats de la chaîne publique ont exigé que le tribunal de commerce soit dessaisi au profit du tribunal de grande instance, tandis que ceux de Bolloré réclamaient de régler son compte à France 2, là, sur-le-champ.

Ironie de l’histoire, comme l’a révélé « Télérama » (28/3) : en 2014, la société de production Upside, une filiale d’Havas, du groupe Bolloré, avait été attaquée par une boîte d’e-commerce, Groupon, pour un reportage diffusé sur… France 2. Où ? Devant le tribunal de commerce. Et qu’avaient fait les avocats d’Havas ? Ils avaient plaidé l’incompétence de ce tribunal, répété que l’affaire relevait du droit de la presse…, et ils avaient gagné !

Dire que Bolloré avait bien gardé ce secret.

Dans le Canard enchaîné du 4 avril 2018.

Marchandages constitutionnels

Le 3 avril, à l’heure où bouclait « Le Canard », les négociations sur la réforme constitutionnelle et institutionnelle se poursuivaient encore entre l’Elysée et le président du Sénat, Gérard Larcher. Malgré la persistance de points de friction. un accord semblait probable. Au moins sous la forme d’ une cote mal taillée qu‘il sera toujours temps d’ajuster entre l’annonce des projets gouvernementaux — prévue ce mercredi — et le débat parlementaire du mois de juin.

La majorité sénatoriale envisageait une concession de taille sur l’instauration de la proportionnelle à l’Assemblée. Opposée d’abord à tout dépassement du seuil de 10 %, elle paraissait prête à accepter la barre de 20 % voulue désormais par Macron — au lieu des 25 % exigés au départ par François Bayrou. Environ 80 députés seraient élus de cette manière, le Château étant d’accord pour ne réduire que d‘un quart le nombre de parlementaires, au lieu du tiers prévu.

Autre sac de lest lâché par l’Elysée : les maires des communes de moins de 5 000 habitants échapperaient à la limitation du cumul des mandats dans le temps (pas plus de trois). De plus, les compteurs seraient remis à zéro après les prochaines élections. En clair : même élu depuis plus de vingt ans, un maire, un député ou un sénateur pourrait encore se représenter trois fois…

Conclusion provisoire : la perspective d’un référendum constitutionnel. à l’issue toujours incertaine, s’éloigne. Au grand soulagement du Château…

Que c'est beau, l'intérêt du peuple défendu par de braves chevaliers… :( Concours de taille de zboub entre politiciens, ouais… :( Le débat démocratique se résume à du racket "je suis Larcher, je peux te nuire, donc négocions". Lamentable… Qu'est-ce que tu veux faire avec ça… … …

Dans le Canard enchaîné du 4 avril 2018.

Mes notes du Siné mensuel de mars 2018

  • La presse en avait parlé durant l'affaire Bettencourt, Sine revient dessus : les abus commis par des responsables de tutelles / curatelle. Ces personnes n'ont aucun compte à rendre à la famille. Elles peuvent souscrire une assurance-vie sans le dire à la famille ( ;) ). Elles peuvent faire des achats en douce pour leur propre compte et priver leur protégé⋅e. Elles peuvent vendre les biens immobiliers de la personne sous tutelle par facilité : pas besoin d'entretien, le⋅a tuteur⋅rice est payé⋅e en fonction des revenus de la personne majeure protégée et le⋅a juge peut lui accorder des indemnités sur certaines transactions, comme la vente d'un bien ou le règlement d'une succession. Je retiens aussi le n'importe quoi : tu peux être placé sous tutelle en 2006 pendant un séjour à l’hôpital, en sortir en 2008 pour y revenir en 2011, en ressortir en 2015, tout ça parce que ta famille, notamment tes enfants se frittent sur ta pomme… … … Je note l'absence de contrôle et l'énorme difficulté des familles pour obtenir réparation compte-tenu de l'opacité dans laquelle peut agir le⋅a tuteur⋅rice. :O

  • En 1951-1953, Rosalind Franklin a permis la découverte de la structure complète de l'ADN. Dommage que ses clichés ont été montrés à d'autres chercheurs à son insu, chercheurs qui ont minimisé l'apport de son travail et qui ont remporté le Nobel sans elle… … …

  • Il existe une carte des conflits environnementaux réalisée par des universitaires et la société civile, financée par l'UE. « Entre 2002 et 2013, pas moins de 900 personne sont été éliminées. Mais, depuis 2014, les assassinats sont deux fois plus nombreux. 2014 : 116 morts ; 2015 : 185 morts ; 2016 : 200 morts ; 2017 : 197 morts ».
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