Doublement des sanctions, obligation de remplir un rapport d’activité, surveillance renforcée : les demandeurs d’emploi vont trinquer.
Pour les fêtes, Emmanuel Macron n’a pas oublié les demandeurs d’emploi. Ainsi entend-il aussi leur témoigner son affection dès l’entame de 2018. Mais c’est de l’amour vache.
Dans un document de travail envoyé le 14 décembre aux partenaires sociaux, le gouvernement avait prévenu : il leur proposerait « une réforme du barème et des modalités de sanction [de certains demandeurs d’emploi] dans les semaines qui viennent ». Cala s’annonce musclé.
« Le Canard » s’est procuré la note confidentielle sur laquelle travaille Antoine Foucher, un ancien du Medef et le directeur de cabinet de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud. En matière de contrôle des chômeurs, un durcissement des sanctions se profile bel et bien.
Actuellement, en cas de recherche d’emploi insuffisante, de refus d’une action de formation ou d’une aide pour trouver le fameux job, le chômeur se voit, théoriquement, infliger une réduction de 20 % de son allocation chômage, pour une durée de deux à six mois. En cas de « manquements » répétés, elle passe à 50 %, pour la même durée.
Mais, « dans les faits, les sanctions pour ce type de manquements sont très réduites », assure un syndicaliste.
Surveiller et punir !
La nouvelle réforme concoctée par le ministère du Travail promet une addition autrement sévère. Si Pôle emploi estime que le chômeur ne recherche pas assez activement du travail, ou s’il refuse une formation, ou encore s’il décline deux offres d’emploi jugées raisonnables, ses allocations seront d’amblé réduites de 50 %, pour une durée de deux mois ! S’il récidive, elles seront carrément supprimées, pour la même durée de deux mois.
La note étudiée par le ministère du Travail se garde bien de préciser ce qui caractérise « une insuffisance de recherche d’emploi » ou « une offre d’emploi raisonnable ». Sûrement des détails…
Deuxième innovation évoquée dans cette note : les chômeurs — ces présumés fainéants — vont devoir rendre des comptes, et serrés. Chaque demandeur d’emploi sera donc bientôt tenu de remplir un rapport d’activité mensuel, listant l’ensemble des démarches effectuées pour favoriser son retour à l’emploi. L’occupation risque de s’avérer déprimante.
L’idée est directement inspirée par… Pierre Gattaz. Lors d’une conférence de presse, le 17 octobre, le président du Medef suggérait l’exercice d’« un contrôle journalier » des chômeurs. Avant de nuancer : « Journalier, hebdomadaire ou mensuel, c’est un truc (sic) qu’il faut débattre. »
Le Medef exaucé
Le « truc » fait partie des idées phares du gouvernement pour mesurer l’« intensité de la recherche d’emploi » de ceux qui n’en ont pas. L’objectif est d’aider les équipes chargées du « contrôle de la recherche effective d’emploi » au sein de Pôle emploi à détecter les chômeurs dont le rapport d’activité leur paraîtrait trop mince. Et, pour faciliter la tâche des contrôleurs — qui sont aujourd’hui 200 —, Macron va multiplier les effectifs par cinq en cinq ans, comme il l’a annoncé. En voilà, des jobs nouveaux !
Et si les chômeurs oublient de remplir leur rapport d’activité ? Hop ! c’est la radiation express… Qui a dit qu’il n’existait pas de moyen simple, efficace et humain d’inverser la courbe ?
Je pense que le contrôle par écrit des chômeur⋅euse⋅s est un chiffon rouge pour nous énerver : le gouvernement n'en veut probablement pas (trop chronophage à contrôler, des chômeurs / précaires savent à peine écrire, etc.), mais va l'utiliser comme un pivot dans la négociation afin d'obtenir des compromis tellement en défaveur des travailleur⋅euse⋅s qu'il ne les aurait pas obtenus autrement.
Les syndicats pourront jouer entre mi-janvier et mi-février puis le tout sera inséré dans un projet de loi qui traitera aussi de la formation pro et de l'apprentisage et qui sera examiné au Parlement.
Vu l'étendue des sujets de négociation, on va forcément perdre des bouts… :( Peut-être sur le fonctionnement ou la parité de l'Unedic ? :(
Dans le Canard enchaîné du 27 décembre 2017.