Alors que la plupart des ministères sont à la diète, le budget des espions de la Direction générale de la sécurité extérieure ne cesse d’enfler. Selon le projet de loi de finances 2018, ses crédits de paiement devraient passer, révèle « La Lettre de L’Expansion » (20/11), à 295,6 millions d’euros, soit un bonus de 20,3 % par rapport à 2017. C’est Noël, chez les barbouzes !
Près de 70 % de cette manne tombe dans l’escarcelle de la Direction technique, les « grandes oreilles » de la maison. Il y a quelque temps, la France s’est mis en tête de jouer dans la cour des grands. Avec Frenchelon, d’abord, la version coq sportif du système Echelon des Anglo-Saxons, destinée à écouter la planète, lancée dans les années 90. il y a dix ans, ensuite, avec un projet de siphonnage du Web mondial. D’où sa course aux crédits : le trafic mondial ne cesse de croître, le pays a besoin de serveurs puissants pour stocker et mouliner les données piquées dans les câbles sous-marins. Pour faire tourner ce superbouzin informatique, la DGSE, qui aligne 5 430 fausses barbes, a encore embauché 123 agents.
Sans décoder...
Des analystes et des linguistes, mais aussi des matheux, as du cryptage, des « techniciens du signal » ou des experts en bases de données, qu’il a fallu séduire avec de gros chèques. Attirer tous ces civils dans une maison qui n’aligne plus que 25 % de militaires revient donc cher. L’an prochain, la masse salariale va s’alourdir de 20 millions d’euros, pour atteindre 445,5 millions. Et la loi de programmation militaire 2019—2025 prévoit encore un bond des effectifs de 25 % !
D’autant que la lutte contre le terrorisme a fait exploser le nombre de missions à l’étranger. Les frais de déplacement (11,5 millions en 2018) flambent de plus de 17 %. « Dans un monde où tout est surveillé, des mouvements des personnes aux flux financiers, garantir la discrétion est de plus en plus onéreux », regrette un militaire au parfum. D’où la gourmandise grandissante de la DGSE, qui accapare chaque année plus de 50 millions d’euros de « fonds spéciaux ».
Le contribuable n’a pas fini de contribuer. Afin de lutter contre le cryptage auquel les internautes recourent de plus en plus souvent, les barbouzes réclament de nouveaux joujoux techniques, susceptibles de tripler leur budget ! La DGSE devrait recruter le Père Noël…
Toujours plus de flicage, toujours moins de vie privée pour le⋅a citoyen⋅ne lambda. Toujours plus de fric gaspillé pour une efficacité identique face aux grandes menaces qui sont vendues aux citoyen⋅ne⋅s… Moins de liberté, moins de sécurité. Perdant-perdant. :'(
Dans le Canard enchaîné du 13 décembre 2017.