Deux établissements français, le lycée Ampère de Marseille et Les Eucalyptus à Nice, vont accueillir un dispositif expérimental de reconnaissance faciale pour l’accès à leur établissement. Annoncé officiellement en 2018, le projet sera mis en place début 2019. Beaucoup s’inquiètent des dérives sécuritaires, même dans le cadre limité de cette expérience.
Deux classes par lycée seront concernées par le dispositif. Et parmi ces élèves, seuls les volontaires — avec l’accord de leurs parents pour les mineurs — participeront à l’expérimentation. […]
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Le lycée proposera une file d’attente distincte pour les élèves volontaires, de sorte à ce que leurs camarades ne soient pas filmés sans consentement. Les participants enregistreront leur profil biométrique, qui sera retranscris sur un badge. La forme de celui-ci, QR code sur smartphone ou badge physique, n’est pas clairement communiquée.
Ensuite, le lycéen valide son badge à une borne lorsqu’il entre, et les caméras confirment que le profil enregistré correspond à celui à l’image. Mais elles ne devraient pas conserver de données, et seulement opérer localement. Les lycéens garderont la main sur les gabarits faciaux enregistrés dans leur support individuel, et Cisco ne devrait pas y avoir accès. Également, dans cette expérience, les caméras ne devraient se déclencher qu’après présentation du badge, de sorte à limiter les risques de filmer une personne non-consentante.
Le dispositif a pour objectif d’« apporter une assistance aux agents assurant l’accueil du lycée afin de faciliter et réduire la durée des contrôles, lutter contre l’usurpation d’identité et détecter le déplacement non souhaité d’un visiteur non identifié », a expliqué la région à notre consœur de BFM TV […]
La CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) a accompagné Cisco et la région dans l’élaboration de leur projet. Elle n’a donc pas eu de « feu vert » ou d’autorisation à donner, puisqu’il ne s’agit pas de son champ de compétence, elle n’a fait que donner un avis. […]
Les contrôles de carnets de correspondance ont été systématisés dans les lycées du PACA, et peuvent créer des problèmes de circulation à l’entrée des cours. Au micro de Sud Radio, Philippe Vincent, proviseur d’un lycée marseillais, développe la problématique : « Pour le faire de temps en temps le matin pour mes 2 400 étudiants et lycéens, je ne suis pas toujours bien sûr que le lycéen qui me présente sa carte soit le même que sur le document ! » Ce système de badge leur permettrait donc de fluidifier l’entrée des élèves.
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Si le dispositif a autant fait parler, et inquiète tant, c’est surtout car il s’inscrit dans une multiplication des usages de la reconnaissance faciale à Nice et en PACA. Plus globalement, Christian Estrosi (LR), maire Nice, et Renaud Muselier (LR), président du conseil régional, ne cachent pas leur affection pour ce genre de dispositifs sécuritaires.
Christian Estrosi fait part depuis plusieurs années de son attrait pour les technologies de reconnaissance faciale, qui font écho à sa ligne sécuritaire. Il expérimente depuis juin la présence d’un policier non armé dans les écoles, et veut l’étendre à tous les établissements qui le souhaitent dès janvier 2019. Il a également testé une application sécuritaire, Reporty, qualifiée de « délation généralisée » par l’opposition. […]
Je note que des précautions ont été prises pour assurer le consentement des utilisateurs. Néanmoins, pas mal de points sont au conditionnel et dépendent de l'implémentation logicielle dont nous ne saurons rien et dont nous ne pourrons rien vérifier, car elle sera opaque…
De plus, je rappelle que nous avons un seul visage, donc qu'il n'est pas possible de changer de moyen d'identification après une usurpation d'identité, contrairement à un mot de passe ou à un jeton physique. C'est le point noir de tout système biométrique.
Ce qui me frappe le plus, c'est de voir les lycées (au moins du PACA) être devenus de vrais bunkers… Il n'y avait pas de contrôle à l'entrée des collège et lycée que j'ai fréquentés, c'était vraiment portes ouvertes… La question de la reconnaissance faciale devient assez secondaire à mes yeux, la vraie question devenant : pourquoi voulons-nous bunkeriser nos lycées ? Quel intérêt cela représente-t-il ?
Via le numéro de janvier 2019 du Ravi, journal satirique en PACA, qui nous apprend que le début de l'expérimentation est reportée à mars « à cause de l'actualité » selon Muselier, le président du Conseil régional. Le même parle déjà d'étendre l'utilisation de ce genre de dispositif dès septembre si l'expérience est concluante soit seulement quelques mois pour expérimenter et conclure… mais bien sûr… … …