Dès le début, j’ai « expliqué que ça me blessait, j’ai dit qu’on ne pouvait pas rire de la Shoah, mais on est passé des blagues sur la Shoah à des saluts hitlériens, puis on invente un jeu qui s’appelle le “freespa” (contraction de “Frisbee” et “kippa"), le lancer de kippa, qu’on jette par terre. » Rose, 20 ans. étudiante en deuxième année de médecine à l’université Paris-XIII, a porté plainte, le 20 octobre, pour injures antisémites (Europe 1, 29/10).
Harcelée par un groupe d’élèves de sa fac, la jeune femme a dû renoncer à se rendre au week-end d’intégration annuel, de peur d’être de nouveau prise pour cible. « Vous, les Juifs, vous n’avez pas d’humour », lui a répliqué l’un des petits rigolos.
C’est vrai, quoi, c’est marrant comme tout, de classer sur Facebook les Juifs de la promotion avec un chiffre et une appréciation : « Juif niveau 31, impliqué mais capacité à traîner avec des guys », « Juive niveau 75, prestige 4, prête à tout pour sa communauté », « Juif niveau 2, il sait qu’il y a une fête qui s’appelle shabbat ». Mais n’est-ce pas encore plus tordant que de vouloir baptiser le week-end d’intégration de l’année prochaine « Auschwitz 2019 » ou « Rafle 2019 » , avec une photo d’un étudiant juif brûlant dans les flammes, comme en attestent les captures d’écran des conversations recueillies sur les réseaux sociaux ?
Une « blague » qui s’inscrit dans un comique de répétition. Le 17 octobre, des tags nazis ont été retrouvés dans les toilettes de l’université Panthéon-Assas (Paris-II). Cinq jours plus tôt, c’est dans une salle de classe de l’école de commerce HEC qu’une série de croix gammées ainsi qu’une inscription « Juden », en lettres rouges majuscules, ont été découvertes sur les murs. Là encore, des jeunes dénués de la moindre capacité d’autodérision l’ont mal pris.
Tout comme ont osé s’émouvoir des jeunes de Tolbiac (Paris-I) membres de l’Union des étudiants juifs de France, après que leur local a été saccagé, en mars, avec des inscriptions au mur telles que « A mort Israël ».
Aucun humour, décidément.
Yep, c'est pour rire. Comme les cartes postales antisémites dans les années 1920 n'étaient pas sérieuses, c'était juste "comme ça", "dans l'air du temps"… et puis c'est parti en sucette, mais, promis, c'était tonton Adolf le seul et unique très très vilain mézaaaaant pas beau, surtout pas toutes les ordures, y compris de la société civile, qui lui ont préparé le terrain, l'air du temps, les cervelles. Bis repetita ?
Dans le Canard enchaîné du 31 octobre 2018.