Treize supermarchés, quatre Chronodrive, deux halles, un hypermarché et un centre de préparation Auchan-Direct ! Pendant qu’Auchan brade tous ces sites déficitaires (quitte à les fermer s’il n’y a pas de repreneurs), et que Carrefour prévoit 3 000 départs « volontaires », les projets d’hyper et supermarchés se multiplient. Par exemple à Alès (Gard), où les ouvriers s’affairent, actuellement, à construire un nouveau centre commercial, dénommé « Porte Sud » — 7 000 m2 avec parkings.
Pourtant, en septembre, la ville d’Alès a signé avec l’Etat une très alléchante convention-cadre Action cœur de ville, qui lui permettra de toucher 30 millions d’euros sur trois ans. Lancé voilà un an, ce dispositif a pour but de lutter contre la désertification de 222 villes moyennes. Comment ? En soutenant la « vitalité commerciale » du centre-ville, en limitant l’« implantation des surfaces commerciales en périphérie »…
Selon Rémy Goulet, membre d’un collectif luttant contre ce nouveau centre commercial, « d’un côté, le maire refait des places et des rues avec l’argent de l’Etat ; de l’autre, il envoie les commerces en périphérie ! ».
La mairie d’Alès est loin d’être la seule à bétonner gaiement. Sur les 222 villes bénéficiaires du dispositif Action cœur de ville, 86 d’entre elles ont autorisé, depuis mars 2018, l’extension de leurs zones commerciales installées en périphérie. Place à de nouveaux Lidl, Brico Cash, Gamm vert, etc. !
Alès béton !
A Cahors (Lot), les élus ont approuvé en juillet un projet de retail park (on ne dit plus « centre commercial ») de 6 487 m2. Projet retoqué en janvier par la Commission nationale d’aménagement commercial, qui s’inquiète de l’impact pour le centre-ville… A Perpignan (Pyrénées-Orientales), les élus viennent de resigner un permis de construire pour un nouveau centre commercial déjà retoqué deux fois (8 710 m2). A Arles (Bouches-du-Rhône), les élus ont approuvé l’extension d’un centre Leclerc (8 922 m2), en attendant le méga-complexe Shopping Promenade de 19 000 m2, prévu pour fin 2019…
La palme revient évidemment à Gonesse (Val-d’Oise), qui croit toujours en son projet mahousse d’EuropaCity (750 000 m2), porté par… devinez qui ? Auchan ! Et ce malgré l’annulation, voilà deux mois, du plan local d’urbanisme. Grâce au dispositif Action cœur de ville, Gonesse va recevoir 1 million d’euros pendant cinq ans pour refaire les pavés du centre-ville, installer une crèche et un « espace vente de producteurs locaux en circuit court ». Admirable, sachant qu’EuropaCity va faire disparaître 80 hectares de terres agricoles… Face à ces aberrations, le ministère de la Cohésion des territoires explique que « le dispositif Cœur de ville se veut incitatif et non mercitif ». En effet !
Dans le Canard enchaîné du 8 mai 2019.