Une friche. Voilà à quoi ressemblent la police et la justice antiterroriste après vingt ans passés à exploiter la pseudo-piste agricole dans l’affaire Erignac.
La cour d’appel de Paris a confirmé, le 6 novembre, le jugement, rendu le 27 mars 2017, condamnant l’Etat à indemniser plusieurs personnes mises en cause à tort dans l’assassinat du préfet de la Corse. Un non-lieu général avait été prononcé le 30 juin 2016, dix-huit ans après l’ouverture de l’enquête.
Sitôt la mort brutale du préfet, le 6 février 1998, le patron de l’antiterrorisme, Roger Marion — surnommé par ses hommes « Eagle 4 », pour « Il gueule fort » —, avait vendu au ministre de l’Intérieur, Jean-Pierre Chevènement, cette piste agricole : un réseau de paysans nationalistes. Il en avait également convaincu la juge antiterro Laurence Le Vert, chargée de l’instruction.
En tout, 31 personnes seront mises en examen dans cette procédure hors norme. Perquisitions, interrogatoires, incarcérations, mesures de contrôle judiciaire : rien ne sera épargné aux terroristes supposés comme à leurs proches. Pas même la découverte inopinée d’un sachet d’explosifs dans une bergerie au milieu d’un domaine de 900 hectares. Lors de l’enquête, le gardien dudit domaine avouera avoir déposé le paquet à la demande de Marion. Toutes ces péripéties et autres invraisemblances n’empêcheront pas la juge Le Vert de rendre son ordonnance de non-lieu, quelques jours seulement avant son départ à la retraite, alors qu’aucun acte d’instruction n’est intervenu depuis seize ans.
Quant à Marion, convoqué en mars au titre de témoin assisté par un magistrat, l’ex-superflic, devenu préfet honoraire, est soupçonné de « dénonciation calomnieuse » dans cette histoire de fausse piste agricole.
Une nouvelle affaire qui va s’embourber ?
Entre le mythe du groupe terroriste d'extrême-gauche dit de Tarnac et ça, existe-t-il, en France, une chasse aux sorcières antiterroriste qui n'a pas mal tourné vers le n'importe quoi absolu ? :O
Dans le Canard enchaîné du 14 novembre 2018.