Sous couvert de lutte contre le terrorisme et de mise en conformité avec le droit et la Constitution, le Bundestag a voté vendredi 21 octobre une loi qui va très largement étendre les capacités d’écoute du BND, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur des frontières. La nouvelle loi renforcera aussi les possibilités de collaboration entre les différents services de renseignement allemands et leurs « partenaires » étrangers.
[...]
[...] dans un contexte géopolitique et sécuritaire « propice » à ce genre de mesures, deux projets de loi ont parcouru à grande vitesse le circuit législatif allemand. Le premier concerne la redéfinition du périmètre d’action du BND. Le second règle l’extension du contrôle parlementaire sur les services secrets. Les deux textes ont été votés ce vendredi. Ils apportent les changements suivants.
Dès le 1er janvier 2017, le BND pourra opérer légalement sur le territoire national et espionner sans limites des réseaux entiers. Jusqu’à présent, le BND ne pouvait en effet récupérer des données que sur quelques câbles à la fois, pour un maximum de 20 % du volume transmis.
De même, les James Bond allemands ne devront plus trop se préoccuper des motifs. Il suffira d’invoquer « de possibles dangers pour la sécurité intérieure et extérieure de la RFA », la « prévention d’un risque terroriste », ou le besoin de « préserver la marge de manœuvre de la République fédérale ».
Le BND obtient en outre le droit de transmettre des métadonnées (heure et longueur d’une communication, coordonnées, etc.) avec les services étrangers « partenaires ». Ceci, alors que le BND, en pleine zone grise juridique, livre déjà près d’1,3 milliard de métadonnées chaque mois aux Américains.
Enfin, le BND obtient le droit d’écouter tout citoyen non allemand et non ressortissant de l’UE, journalistes et avocats compris. Cette disposition fait d’autant plus scandale que la constitution allemande (article 10) institue un droit aux secrets des communications pour toute personne, sans préciser sa nationalité.
En contrepartie, la loi ne propose rien d’autre que la création d’une instance de contrôle parlementaire supplémentaire. Or, les activités du BND et des autres services secrets (BfV pour le renseignement intérieur et MAD pour les militaires) sont déjà contrôlés par les neuf députés de la Commission parlementaire de contrôle des services (Kontrollgremium), ainsi que par la Commission G-10 (5 membres) qui joue le rôle d’une chambre d’arbitrage pour les écoutes. Mais aussi par la « commission de confiance », sous-commission de la commission du Budget, chargée de vérifier les dépenses des services. Enfin, il y a le commissaire fédéral à la protection des données qui produit chaque année son propre bilan annuel.
[...]
[...] Interrogé par Netzpolitik, Klaus Landefeld, membre de la direction de DE-CIX, l’un des plus importants points d’échange internet au monde en termes de trafic [ NDLR : et situé en Allemagne ], et à ce titre largement « écouté » par le BND, estime que « le BND pourrait installer le meilleur filtre au monde, qui filtre à 99,9 %, mais cela signifie encore des millions de connexions interceptées à tort, par jour ! ». [...]
[...] Le nouveau texte, qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2017, pourrait être soumis avant la fin de l’année aux juges du Tribunal fédéral constitutionnel.
La loi votée vendredi lui interdit désormais d'espionner des pays membres de l'Union européenne, leurs ressortissants, ou les institutions européennes, sauf en cas de soupçons d'activité terroriste.
Tout espionnage industriel est également banni.
Trololololololo. C'est à cela qu'ont toujours servi les services de renseignement. :))))