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Police arbitraire
- Le 19/10/2020, trois jours après le meurtre de Samuel Paty, le sinistre de l'intérieur Darmanin annonçait des opérations de police contre des dizaines d'individus « pas forcément en lien avec l'enquête » animées par « l'envie de faire passer un message » ;
- Les mois suivants, des établissements recevant du public, identifiés comme des « structures séparatistes » sont fermés administrativement via des contrôles fiscaux, d'hygiène, du travail ;
- Cellules de lutte contre l'islamisme et le repli communautaire… aux conclusions hâtives : deux tapis de prière dans l'arrière-salle d'un snack et une salle de jeux vidéos à l'étage alors que le restau est proche d'un collège, vlam, il s'agit d'une salle de prière dotée d'un dispositif pour attirer des esprits malléables… Ce jour-là, un serveur sans-papier, onze amendes pour non-port du masque, et une mise en demeure pour non-respect de l'hygiène alimentaire. Rien de classe, mais rien qui relève du terrorisme. mais, peu importe : « ces descentes marquent les esprits et montrent que la République est partout chez elle », comme le dit le chef de l'opération.
Petits rappels sur la justice
- Biais en amont : la cocaïne circule dans toutes les tranches de la société, mais n'est activement recherchée, par la flicaille, que dans les cités, d'après le sociologue Didier Fassin ;
- L'étude La couleur du jugement a examiné les jugements concernant des infractions sur personne dépositaire de l'État rendus par un tribunal de la banlieue parisienne entre 1965 et 2005. Les flics se constituent plus volontiers partie civile (ajouter un volet civil à une affaire pénale afin de demander indemnisation du préjudice) quand le prévenu porte un nom maghrébin ;
- Un juge peut être influencé par son humeur (une étude israélienne illustre que le taux d'acceptation des demandes de libération conditionnelle était au max après la pause snack du matin ou la pause-déjeuner avant de diminuer progressivement jusqu'à environ 0 en fin de journée. De là à dire qu'il y a causalité avec la bouffe… Je pense plutôt à la fatigue ou à la colère / frustration accumulée qui descendent), son affiliation politique (un juge d'extrême-droite qui juge un maghrébin…), l'engouement médiatique (une étude française montre que la tonalité, à charge ou à décharge ‒ erreur judiciaire ‒, des reportages diffusés la veille d'un délibéré d'une Cour d'assise influe sur le verdict et la durée de la peine), sa moralité (lire ici les exemples donnés par Dupond-Moretti dans son livre, 4e point avant la fin), ses préjugés (un maghrébin au casier judiciaire vierge est soupçonné d'en avoir un au bled), sa solidarité de classe (il peut se montrer plus clément avec des prévenus partageant des codes sociaux, alors qu'un justiciable qui parle mal le français, qui ne connaît pas le verbiage de la justice ni le parler de la bourgeoisie part avec un handicap. Si tu veux échapper à la détention provisoire, avant le procès, il faut produire des gages que tu te présenteras bien au procès, donc un contrat de travail, un bail, des attaches sociales, etc., ce qui signifie qu'il faut vivre selon la norme pour éviter la zonzon préventive), etc. ;
- Disproportion des comparutions immédiates, toujours. D'après l'observatoire international des prisons, 70 % des condamnations qui y sont prononcées sont des peines de prisons fermes. Trois mois ferme pour un vol de téléphone. Six mois ferme pour insultes envers un agent de la RATP. Plusieurs mois fermes pour quelques grammes de drogue pour sa conso personnelle (revente non démontrée par les flics). Manque d'interprètes…
Justice restaurative / réparatrice et justice transformative
- D'après le sociologue Didier Fassin, dans le passé, la plupart des sociétés, y compris européennes, ont fait reposer la réponse aux violations de la loi sur la réparation : compenser le délit / crime commis. Pas de responsabilité individuelle, mais une responsabilité de la famille ou du clan, qui devait dédommager la victime ou ses proches. Mouaaiis, est-ce que ça n'accroissait pas l'emprise du clan / de la famille telle celle mise sur un enfant mineur pour lui interdire abusivement ceci et cela afin de limiter les risques de se manger un procès ? ;
- Le même explique que c'est au cours du Moyen Âge que s'est imposée, en Europe, sous l'influence de l'Église et de l'État, l'idée de faute individuelle, impliquant un rachat de l'infraction par la souffrance ;
- À l'échelle individuelle, nous avons des compétences qui nous permettent de ne pas recourir aux flics et au système pénal, notamment nous répugnons à recourir au système pénal quand il s'agit de nos proches (mouaaiis, j'ai tendance à penser qu'on encaisse en silence, par abnégation, pas qu'on parvient à exprimer ce qui ne va pas). On peut donc apprendre à s'autonomiser pour se passer des flics en situation de danger (mouaaiis… on est quand même concerné donc biaisé donc difficile de conserver intact son discernement donc la proportionnalité de la réponse…) ;
- Le système pénal pose trois questions : quelle est l'infraction, qui est l'auteur, comment faut-il le punir. La justice restaurative ajoute d'autres questions : qui souffre, comment les apaiser / guérir, quels sont leurs besoins (vérité, compréhension, reconnaissance, quête de sens) ? Il s'agit de réparer et de restaurer les liens sociaux ;
- Modalités de la justice restaurative : rencontres coupable / victime, conférence familiale (les proches accompagnent le coupable dans la résolution du tort commis), cercle de soutien et de responsabilité (bénévoles qui s'engagent pour entourer et accompagner des délinquants sexuels avant leur passage à l'acte ou récidive) mis en œuvre au Canada, les cercles de sentence et les conférences communautaires (conciliation, réparation, etc. selon les rites culturels de peuples autochtones), etc. ;
- En 1994, l'Afrique du Sud créa une commission Vérité et réconciliation. Tout le monde pouvait témoigner des exactions commises durant l'apartheid. Exorciser les horreurs du passé sans système pénal (la commission pouvait amnistier quelqu'un, mais pas le condamner) ;
- Plusieurs peuples amérindiens ont recours à la justice restaurative. Comme le peuple Navajo. Plus grande réserve amérindienne située dans l'Arizona. Le pénal et la zonzon restent réservés aux infractions les plus graves. Le peacemaking est volontaire. Il laisse place aux émotions, à la comparaison avec le récit mythique originel, à l'échange (en limitant les interrogations), à la communauté (le peacemaker est désigné par elle, elle participe aux séances, le dédommagement est collectif, etc. Il s'agit aussi d'une politique de décolonisation, de rejet du système pénal ricain ;
- Au Canada, des dispositifs de justice restaurative ont été mis en place pour les populations autochtones fortement impactées par le système pénal… au lieu de corriger les problèmes sociaux et de racisme structurels. C'est vendu comme une justice plus culturellement adaptée… mais l'État pousse à l'implantation dans des populations inuites qui ne s'identifient pas à ce genre de pratiques. L'État aurait-il trouvé un moyen de légitimer son interventionnisme auprès des populations autochtones ? Idem avec le droit traditionnel maori (Nouvelle-Zélande) et ses conférences familiales : l'État n'a pas dit "OK, utilisez votre procédure, nous allons la reconnaître", mais "nous allons incorporer votre procédure à notre justice puis l'utiliser sur vous, à notre sauce" ;
- En France, la justice restaurative a été codifiée dans la loi Taubira de 2014 (directive européenne de 2012). Comme au Canada et ailleurs, cela vient en complément de la réponse pénale, par volontariat des deux parties, etc. ;
- La justice restaurative est un marché économique : formation, expertise, etc. ;
- Lacunes de la justice restaurative : elle est cantonnée à la définition des infractions… par le Code pénal ; elle ne peut pas répondre aux injustices structurelles comme le racisme (la justice pénale non plus, ceci dit) ; elle est le supplément d'âme (cf. point sur les questions supplémentaires qu'elle pose) du système pénal auquel elle n'est donc pas une alternative… ;
- Justice transformative : le problème n'est pas l'infraction, mais les conditions sociales qui l'ont rendu possible. Elle vise donc à transformer la société et à la guérir en sus de guérir la victime et le coupable. Au départ, elle était pratiquée dans les communautés délaissées par le système pénal. CQFD ne nous en dira pas plus (concrètement).
Fri Aug 19 17:48:53 2022 - permalink -
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