Comme ce n'est pas ma spécialité, j'ai noté seulement deux changements :
Le Sénat a introduit une modification de la loi sur la liberté de la presse pour augmenter le délai de prescription de l'action publique de trois mois à un an si les infractions ont été commises par voie électronique. Décidément, c'est la saison :- ;
- Le Sénat a retiré l'imprescriptibilité des crimes de guerre liés à des crimes contre l'humanité proposée par l'Assemblée ;
La Commission des Lois de l'Assemblée n'est pas revenue sur ces points lors de son examen du 14 décembre dernier. :(
La séance plénière qui examinera ce texte aura lieu le 12 janvier prochain soit après les vacances parlementaires.
Comme toujours, voici les mails que j'ai envoyés. Vu l'indifférence autour de cette question (aucun amendement en Commission des Lois, aucun amendement portant sur l'article 37 de la loi égalité et citoyenneté, désintérêt ressenti des député-e-s de circonscription, etc.), j'ai décidé de contacter uniquement le rapporteur nommé sur la proposition de loi de réforme de la prescription pénale ainsi que le rapporteur de la loi égalité et citoyenneté qui avait œuvré pour un article 37 moins liberticide ainsi qu'Isabelle Attard.
Mail envoyé à Isabelle Attard :
Salut la team,
Je ne sais pas si vous avez vu passer l'article 3 de la ppl réforme de la prescription pénale mais on y cause allongement du délai de prescription des infractions de la presse (hors cas aggravés) lorsque celles-ci sont commises en ligne. Le Sénat est également revenu sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre liés à des crimes contre l'humanité… … …
La Commission des Lois de l'AN n'est pas revenue sur ces points en deuxième lecture. Peut-être faudrait-il poser un amendement avant l'examen en plénière du 12 janvier ? ;)
Arguments :
- On rejoue encore une fois sur les mêmes sujets, avec les mêmes arguments… C'était l'une des mesures de l'article 37 du projet de loi égalité et citoyenneté… Finalement retoquée à l'Assemblée… Ça devient lassant, les coups en douce. :(
- Le Conseil Constitutionnel a déjà statué, dans sa décision 2004-496-DC qu'il ne peut y avoir de trop grandes différences de régime entre presse papier et numérique en matière de délai de prescription. Le recours en justice de Mediapart pour déterminer si le taux de TVA presse écrite est applicable à la presse numérique sera aussi très éclairant sur la considération et le statut à accorder à la presse en ligne.
- Dans l'article 3, une exception permet d'avoir un délai de prescription de 3 mois si l'on publie en ligne un contenu préalablement édité en papier. Quid alors des radios et des chaînes de télévision ? Elles bénéficieront d'un délai de prescription de trois mois pour la diffusion en direct à l'antenne et d'un délai d'un an pour les podcasts et replay alors que le contenu sera identique ? C'est insensé.
- C'est insensé de pénaliser le numérique alors qu'il permet justement une découverte des infractions dans le délai initial de 3 mois, chose qui était auparavant difficile et/ou réservé à une élite. En tant que citoyen-n-e, homme-femme politique, société commerciale, association, je n'avais pas le temps d'éplucher toute la presse papier y compris la presse locale qui peut me tirer dessus (parce que j'ai un local pour ma société commerciale dans le secteur, parce que j'ai été un-e élu-e local-e, etc.) ou tirer sur un-e ami-e local-e qui m'éclaboussera. 3 mois pour vérifier tout ça, c'était compliqué. Même avec des personnes payées pour produire des revues de presse. Avec le numérique, vérifier que la presse (ou quiconque) parle de moi, c'est facile et ça ne prend pas 3 mois. Pour ce faire, il y a les alertes Google et les services du même genre.
- Si l'on augmente le délai de prescription commun à 1 an, quel intérêt auront les infractions aggravées (exemple : injure/diffamation en raison du sexe/religion/nationalité/handicap/etc.) qui ont, elles, déjà, un délai de prescription d'un an ? Cet alignement ne peut conduire qu'à une course à l'échalote : le délai de prescription de ces infractions aggravées sera rehaussé dans un prochain texte puis on alignera à nouveau le délai de prescription commun puis on rehaussera encore pour les infractions aggravées puis, etc.
Bonne journée.
Mail envoyé au rapporteur Tourret :
Bonjour,
Je vous écris, en tant que citoyen (je ne représente aucune structure, commerciale ou non) à propos de la proposition de loi de réforme de la prescription pénale dont vous êtes le rapporteur à l'Assemblée.
J'attire votre attention sur la deuxième moitié de l'article 3 qui propose d'allonger le délai de prescription des infractions de la presse (hors cas aggravés) lorsque celles-ci sont commises en ligne.
Cette mesure était déjà présente dans l'article 37 de la récente loi égalité et citoyenneté et elle a finalement été retoquée, par le rapporteur Hammadi, à partir de la deuxième lecture à l'Assemblée. J'ai du mal à appréhender ce "retour en douce" dans un autre texte.
Pour cela, et pour les autres arguments que je vais développer ci-dessous, je vous invite fortement à déposer un amendement visant à supprimer cette proposition de modification de la loi de 1881.
De même, je suis surpris qu'aucun-e député-e n'ait réagit concernant l'imprescriptibilité des crimes de guerre liés à des crimes contre l'humanité sur laquelle le Sénat est revenu… … …
Arguments concernant la deuxième moitié de l'article 3 :
- Le Conseil Constitutionnel a déjà statué, dans sa décision 2004-496-DC qu'il ne peut y avoir de trop grandes différences de régime entre presse papier et numérique en matière de délai de prescription. Le recours en justice de Mediapart pour déterminer si le taux de TVA presse écrite est applicable à la presse numérique sera aussi très éclairant sur la considération et le statut à accorder à la presse en ligne.
- Dans l'article 3, une exception permet d'avoir un délai de prescription de 3 mois si l'on publie en ligne un contenu préalablement édité en papier. Quid alors des radios et des chaînes de télévision ? Elles bénéficieront d'un délai de prescription de trois mois pour la diffusion en direct à l'antenne et d'un délai d'un an pour les podcasts et replay alors que le contenu sera identique ? C'est insensé.
- C'est insensé de pénaliser le numérique alors qu'il permet justement une découverte des infractions dans le délai initial de 3 mois, chose qui était auparavant difficile et/ou réservé à une élite. En tant que citoyen-n-e, homme-femme politique, société commerciale, association, je n'avais pas le temps d'éplucher toute la presse papier y compris la presse locale qui peut me tirer dessus (parce que j'ai un local pour ma société commerciale dans le secteur, parce que j'ai été un-e élu-e local-e, etc.) ou tirer sur un-e ami-e local-e qui m'éclaboussera. 3 mois pour vérifier tout ça, c'était compliqué. Même avec des personnes payées pour produire des revues de presse. Avec le numérique, vérifier que la presse (ou quiconque) parle de moi, c'est facile et ça ne prend pas 3 mois. Pour ce faire, il y a les alertes Google et les services du même genre.
- Si l'on augmente le délai de prescription commun à 1 an, quel intérêt auront les infractions aggravées (exemple : injure/diffamation en raison du sexe/religion/nationalité/handicap/etc.) qui ont, elles, déjà, un délai de prescription d'un an ? Cet alignement ne peut conduire qu'à une course à l'échalote : le délai de prescription de ces infractions aggravées sera rehaussé dans un prochain texte puis on alignera à nouveau le délai de prescription commun puis on rehaussera encore pour les infractions aggravées puis, etc.
Cordialement.
Mail envoyé au député Hammadi, rapporteur sur la loi égalité et citoyenneté :
Bonjour,
Suite à une invitation de ma députée de circonscription, je vous avais contacté il y a peu de temps car vous étiez le rapporteur de la loi égalité et citoyenneté à l'Assemblée afin de vous faire part de mes oppositions concernant, entre autres, l'article 37 qui modifiait la liberté de la presse.
Une des mesures de l'article 37 (dans sa version Sénat), l'allongement du délai de prescription des infractions de la presse (hors cas aggravés) lorsque celles-ci sont commises en ligne, a également été ajouté, par le Sénat, dans l'article 3 de la proposition de loi de réforme de la prescription pénale. Je trouve ce "retour en douce" extrêmement douteux.
J'ai déjà contacté le rapporteur Tourret et ma députée de circonscription mais puisque vous êtes connaisseur de la thématique et témoin des fortes oppositions qui se sont manifestées sur l'article 37 de la loi égalité et citoyenneté, je vous contacte dans l'espoir que vous déposiez un amendement avant la séance plénière du 12 janvier et/ou que vous transmettiez votre connaissance du dossier à votre collègue rapporteur.
Mes arguments contre la deuxième moitié de l'article 3 :
- Le Conseil Constitutionnel a déjà statué, dans sa décision 2004-496-DC qu'il ne peut y avoir de trop grandes différences de régime entre presse papier et numérique en matière de délai de prescription. Le recours en justice de Mediapart pour déterminer si le taux de TVA presse écrite est applicable à la presse numérique sera aussi très éclairant sur la considération et le statut à accorder à la presse en ligne
- Dans l'article 3, une exception permet d'avoir un délai de prescription de 3 mois si l'on publie en ligne un contenu préalablement édité en papier. Quid alors des radios et des chaînes de télévision ? Elles bénéficieront d'un délai de prescription de trois mois pour la diffusion en direct à l'antenne et d'un délai d'un an pour les podcasts et replay alors que le contenu sera identique ? C'est insensé.
- C'est insensé de pénaliser le numérique alors qu'il permet justement une découverte des infractions dans le délai initial de 3 mois, chose qui était auparavant difficile et/ou réservé à une élite. En tant que citoyen-n-e, homme-femme politique, société commerciale, association, je n'avais pas le temps d'éplucher toute la presse papier y compris la presse locale qui peut me tirer dessus (parce que j'ai un local pour ma société commerciale dans le secteur, parce que j'ai été un-e élu-e local-e, etc.) ou tirer sur un-e ami-e local-e qui m'éclaboussera. 3 mois pour vérifier tout ça, c'était compliqué. Même avec des personnes payées pour produire des revues de presse. Avec le numérique, vérifier que la presse (ou quiconque) parle de moi, c'est facile et ça ne prend pas 3 mois. Pour ce faire, il y a les alertes Google et les services du même genre.
- Si l'on augmente le délai de prescription commun à 1 an, quel intérêt auront les infractions aggravées (exemple : injure/diffamation en raison du sexe/religion/nationalité/handicap/etc.) qui ont, elles, déjà, un délai de prescription d'un an ? Cet alignement ne peut conduire qu'à une course à l'échalote : le délai de prescription de ces infractions aggravées sera rehaussé dans un prochain texte puis on alignera à nouveau le délai de prescription commun puis on rehaussera encore pour les infractions aggravées puis, etc.
Cordialement.
Évidemment, je vous invite fortement à interpeller nos élu-e-s à ce sujet en vous rappelant que la loi de 1881 sur la liberté de la presse est la seule qui protège un tant soit peu la liberté d'expression. J'ai fait ma part du boulot.
Ho, sachez-le, je ne me fais pas d'illusions : entre les vacances parlementaires, la nouvelle année, l'envie de boucler vite-fait bien-fait ce texte (ce qui implique qu'il ne soit plus modifié) et le je-m'en-foutisme généralisé autour de cette thématique, je pense que cette modification de la loi de 1881 va passer sans encombre.