Le gendarme du Net croule sous les plaintes.
Ça manquait un peu de gendarmes autour de Macron, ces temps-ci. Le Président s’intéresse donc à celui du numérique. Ces prochains, jours, il doit désigner le nouveau président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), appelé à succéder, le 1er février, àla conseillère d’Etat Isabelle Falque-Pierrotin.
Onze des dix-huit membres du conseil exécutif de la Commission doivent être renouvelés, parmi lesquels cinq personnalités qualifiées, deux conseillers d’Etat et deux conseillers de la Cour des comptes. Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique sous Hollande, convoite la présidence, mais ses relations avec son ministre de tutelle à Bercy, un certain Macron, n’étaient pas des plus chaleureuses. Comme si c’était un handicap !
T'sais, les personnes qualifiées, c'est celles qui sont censées contrôleur la censure étatique visant les contenus pedoporn et terroristes.
Il ne déplairait pas non plus au Conseil d’Etat de conserver le poste. Fabrice Aubert, le conseiller Institutions de l’Elysée, chargé de dresser une liste de candidats, en est justement issu. Et Didier Casas, ancien conseiller de Macron sur les sujets régaliens durant la présidentielle, itou. Problème : il est aujourd’hui le directeur général adjoint de Bouygues Telecom, à un salaire autrement alléchant. Deux anciens présidents du Conseil national du numérique, Gilles Babinet et Benoît Thieulin, pourraient, eux, se voir bombardés « personnalités qualifiées ».
Le nouveau président, en tout cas, aura du pain sur la planche. Depuis l’adoption de la réglementation générale sur la protection des données, en mai, la Cnil est submergée par les plaintes de‘partiouliers : près de 10 000 à la fin de novembre — soit 84 % de plus que l’année précédente !
Sauvegarde des donnees pas donnée
Trois organismes ont aussi saisi la Commission de plaintes collectives : la Quadrature du Net a porté plainte contre Google, Amazon, Facebook, LinkedIn et Apple, au nom de 45 000 personnes ; son confrère autrichien NOYB a Google en ligne de mire, et l’anglais Privacy International vise sept entreprises collectrices à grande échelle de données en ligne. La Cnil est encore concernée par 187 plaintes transfrontalières, sans parler des explications à fournir aux particuliers ou aux professionnels sur la nouvelle législation, loin d’être limpide.
Pour cette surcharge de boulot, le gendarme du numérique va voir, en 2019, son budget royalement augmenter de… 400 000 euros. Et ses effectifs vont passer de 200 a 215 employés. Une misère, par rapport à ses homologues allemand (600 personnes) et britannique (565).
Mais il paraît que la France compte déjà trop de fonctionnaires…
Dans le Canard enchaîné du 19 décembre 2018.