Au palais de justice d’Aix, la cage des accusés vient d’être démontée. A Paris, le nouveau tribunal était à peine inauguré que, sous la pression des avocats, 9 de ses 14 cages vitrées en ont été ôtées. Quant à la ministre de la Justice, qui hérite ce pataquès de ses prédécesseurs, elle a ordonné la suppression de l’ensemble des boxes ceints de barreaux — oui, comme au zoo — ainsi que le gel de toute nouvelle installation de box transparent.
C'est un bon début \o/
Combien va coûter cette petite plaisanterie ? Selon les chiffres obtenus par « Le Canard » — le prix d’un box équipé d’une vitre de 2,5 cm d’épaisseur s’élevant à 55 000 euros —, l’addition atteint 12,6 millions d’euros pour les 229 enclos dispersés dans toutes les juridictions ! Sans compter leur démolition : d’après l’avis hautement scientifique des ingénieurs qui les ont installés à Paris, le ministère « va sérieusement douiller ».
Quels génies ont conçu ces grosses vitres, fendues d’une ouverture de 15, 25, voire 45 cm ? Pour s’adresser aux juges, les petits prévenus doivent se hausser sur la pointe des pieds, et les grands se courber en deux. La sono étant très fréquemment défectueuse, il n’est pas rare qu’ils soient obligés de hurler pour être entendus.
La bagarre anti-box continue. Tous les jours, des avocats demandent aux juges de « sortir les prévenus des cages ». Souvent ils gagnent, mais pas toujours… Au nom du Syndicat des avocats de France (SAF), Gérard Tcholakian vient de saisir le président de la République pour réclamer la « transposition effective » d’une directive européenne du 9 mars 2016. Cette dernière impose, sauf exception de sécurité, de « s’abstenir de présenter les suspects ou les personnes poursuivies comme étant coupables [par le recours] à des menottes, box vitrés, cages et entraves de métal ».
Les grands experts du ministère de la Justice y pensaient sûrement quand ils ont organisé cette mise en boîte des présumés innocents.
Dans le Canard enchaîné du 16 mai 2018.