Macron n’a toujours pas digéré la précipitation avec laquelle Collomb a annoncé, le 18 septembre, son départ du gouvernement au printemps 2019, pour se lancer dans les municipales à Lyon.
« Il n’y avait pas d’urgence », s’est-il indigé devant des conseillers.Et le ministre de l’Intérieur vient d’aggraver son cas. Le 23 septembre, « La Dépêche du Midi » a publié des confidences de l’hôte de Beauvau recueillies lors d’un déjeuner, le 7 septembre. Collomb commence par un mea culpa :
« On n’a pas bien traité un certain nombre de problèmes, comme l’accueil des mineurs isolés, les 80 km/h. »Puis il passe à l’attaque :
« Les provinciaux — et j’en suis — ont déjà une tendance naturelle à considérer que les Parisiens ont la grosse tête, les snobent. Or, des expressions comme la “nouvelle grammaire de la politique” ou la “start-up nation”, ils ne s’y reconnaissent pas… »Interrogé pour savoir s’il s’en est ouvert à Macron, le premier flic de France sort le calibre :
« Si tout le monde se prosterne devant lui, il finira par s’isoler. Car, par nature, l’Elysée isole. »Seconde salve :
« Nous ne sommes pas nombreux à pouvoir encore lui parler. Ceux qui parlent franchement à Macron sont ceux qui étaient là dès le début : Ferrand, Castaner, Griveaux et moi. D’ailleurs, il va finir par ne plus me supporter. » C’est déjà le cas de Brigitte Macron. Assise entre Ferrand et Collomb, lors de la journée d’hommage aux victimes du terrorisme, le 19 septembre, elle n’a pas échangé un mot avec le ministre. Pour l’un de ses collègues du gouvernement, le divorce avec Macron est consommé et le ministre de l’Intérieur pourrait être « libéré » avant le mois de mai 2019, pour redonner du souffle à la fonction.
« Lorsque vous annoncez le moment de la fin, commente-t-il, c’est déjà la fin. »
Un propos très fin.
Le stratège
Pourquoi le ministre de l’lntérieur a-t-il annoncé si tôt sa volonté de quitter son poste en mai 2019, au risque de mettre le pagaille au sein du gouvernement ?
Primo, selon un membre de sa garde rapprochée, parce qu’« il voit bien qu’à Lyon Laurent Wauquiez et son équipe préparent très activement la reconquête de la ville, dont ils veulent faire un symbole de la renaissance de la droite. Il surveille aussi tout le petit jeu de Marion Maréchal. Du coup, il se dit qu’il faut impérativement accélérer. Ce n’est pas pour rien que son association politique s’appelle “Prendre un ttemps d’avance”… » Secundo, Collomb a voulu envoyer un message aux macronistes locaux. « Georges Képénékian, le maire de Lyon, et David Kimelfeld, le président de la métropole, ont tous les deux tenu des propos ambigus qui montraient qu’ils étaient prêts à tuer le père et étaient tentés par l'idée de se présenter eux-mêmes à la municipalité… Collomb se devait deny de calmer rapidement leurs velléités. »
Entre deux réunions sur la menace terroriste ?
Dans le Canard enchaîné du 26 septembre 2018.