Ya plus de respect ! Dans la soirée du 24 octobre, à la veille d’un vote (finalement reporté) sur le glyphosate, de dangereux activistes se sont attaqués à la façade du Parlement européen et de la Commission de Bruxelles. Des écolos désespérés ? Pas vraiment. Armés d’un puissant matériel vidéo, des lobbyistes y ont projeté des images géantes en faveur du pesticide : « Glyphosate is safe » (« sans danger »), clamait l’une. Une autre affichait des chiffres impressionnants : « 3 300 études » parleraient en faveur du glyphosate, « une seule » serait contre ! Une énorme intox : des centaines d’études mettent en évidence la dangerosité de l’herbicide…
L’action était menée par le plus gros lobby européen des pesticides, l’European Crop Protection Association (ECPA), qui a filmé son œuvre et balancé la vidéo sur YouTube et Twitter. Le genre d’opération commando qui aurait valu à Greenpeace un débarquement policier immédiat. Mais nos lobbyistes n’ont pas été inquiétés. Après le Parlement et la Commission, ce soir-là, ils ont projeté la même propagande sur la façade du Conseil de l’Union européenne. Une virée en toute impunité.
Deux eurodéputés, le Français Eric Andrieu (PS) et le Belge Marc Tarabella (socialiste), s’en sont émus dans un courrier adressé, le 6 novembre, au président du Parlement, Antonio Tajani : « La façade du Parlement n’est pas un paillasson ! (...) Quelles sont les sanctions que prévoit le Parlement européen vis-à-vis de cette organisation ? »
Vandales peinards
Deux jours plus tard, en conférence des présidents, la réunion des chefs de groupes politiques, le président Tajani a promis « une réaction appropriée »… dès que les services du Parlement auront identifié l'« auteur de cette action ». Défense de rire ! L’« auteur », en effet, est très difficile à trouver : l’ECPA a pris soin de signer sa vidéo, avant de la poster sur son compte Twitter ! Michal Kicinski, l’un des lobbyistes en chef de l’ECPA, s’y met d’ailleurs tranquillement en scène.
Trois semaines après ce squat mural, la Commission européenne, elle, n’a toujours pas porté plainte. « Nous étudions toutes les options », explique-t-elle, sibylline, au « Canard ». Les lobbyistes doivent claquer des dents…
Dans le Canard enchaîné du 15 novembre 2017.