C'est une banderille dont la maison Rothschild se serait bien passée. Chargée d’enquêter sur la cession de fleurons industriels français à des pays étrangers, une commission parlementaire a formulé une proposition assez perverse à l’adresse des banques d’affaires. Olivier Marleix (LR), son président — en accord avec le rapporteur Guillaume Kasbarian (LRM) —, préconise, dans un rapport rendu public le 20 avril (« Le Canard », 25/4), d’élargir le statut juridique qui s’impose aux lobbyistes et autres « représentants d’intérêts ». Il entend ainsi contraindre les professionnels des fusions-acquisitions à détailler leurs activités auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Au secours, les ennemis de la finance reviennent !
Sauvetage inespéré
Pourquoi ? La commission Marleix a découvert qu’Alstom avait déboursé « 300 millions d’euros d’honoraires » pour un deal de 8,2 milliards d’euros (« Le Canard », 21/3). Une rémunération très au-dessus de la moyenne. Parmi les heureux bénéficiaires, la banque Rothschild, conseil à la fois d’Alstom et de son actionnaire de référence, Bouygues.
La loi Sapin 2 de décembre 2016, relative à la transparence et à la lutte contre la corruption, avait offert une définition claire des obligations imposées aux représentants d’intérêts susceptibles d’exercer une influence sur des membres du gouvernement ou de cabinet ministériel. Mais, par un incroyable tour de passe-passe, le décret d’application, pris le 9 mai 2017 (juste avant le départ de François Hollande), avait exonéré les banquiers d’affaires. Au nom du secret des affaires…
« La transparence appliquée à un métier comme le nôtre devient très rapidement un nid à embrouilles », avait déclaré David de Rothschild devant la commission d’enquête, le 22 mars. « Evidemment, nous avons des conversations avec l’Etat, avait-il renchéri. Mais nous ne vendons pas. Le représentant d’intérêts fait le tour de toutes les administrations pour obtenir le maximum de soutiens. Nous travaillons pour nos clients sur des opérations un peu complexes qui nécessitent de dialoguer. » Un dialogue susceptible de rapporter plusieurs millions.
L’ancien banquier d’affaires Emmanuel Macron en sait quelque chose…
Dans le Canard enchaîné du 2 mai 2018.